De ce texte émane un mauvais parfum de nostalgie, de réaction, voire de restauration... Je salue le courage intellectuel de notre rapporteur qui dépose des amendements pleins de sagesse, équilibrés, revenant au principe constitutionnel d'individualisation des peines. Mais tout son courage et son talent ne suffisent pas à transformer le plomb en or, et ce texte reste inadmissible, pour trois raisons.
Il est étrange, tout d'abord, de déposer à cette période, si l'on se défend de tout effet électoral ou d'affichage, un texte de cette nature, qui nécessiterait une vision prospective plutôt que rétrospective, alors que nous ne connaissons pas encore les conclusions de travaux en cours.
Ensuite, cette proposition de loi manque de cadrage budgétaire. N'est-ce pas une provocation, qui aura un effet boomerang, que de prétendre augmenter les dépenses de la justice en accroissant le nombre de tribunaux d'application des peines ou les effectifs du parquet ? Avec quels moyens, quand on n'entend certains ne parler que de réduire le nombre de fonctionnaires ? Vous devrez assumer ce paradoxe...
Enfin, on voit revenir la vieille antienne « il faut se méfier des juges ». En témoigne le rétablissement des peines planchers, avec l'idée sous-jacente que le magistrat serait a priori incompétent, au motif qu'il pourrait prendre des décisions contraires à ce qu'attend l'opinion ! Une telle disposition remet en cause le principe constitutionnel d'individualisation des peines.
Quant aux amendes forfaitaires, on prétend les appliquer aux usages de stupéfiants, en arguant qu'elles ont déjà été étendues à des contentieux de masse comme les délits routiers. Mais dans le cas des délits routiers, l'absence de permis de conduire ou d'assurance est un fait précis et irréfutable. Dans les autres cas, il y a lieu à débat, et le juge devrait être contraint d'infliger une amende forfaitaire ?
Le même raisonnement vaut pour l'abaissement du seuil d'aménagement des peines.
Vous l'aurez compris, le groupe socialiste et républicain votera contre cette proposition de loi.