Intervention de Jean-François Carenco

Commission des affaires économiques — Réunion du 8 février 2017 à 14h45
Article 13 de la constitution — Audition de M. Jean François carenco candidat proposé aux fonctions de président du collège de la commission de régulation de l'énergie

Jean-François Carenco, candidat proposé aux fonctions de président du collège de la Commission de régulation de l'énergie :

Je suis surpris de votre question. Je suis préfet depuis 23 ans : si j'avais voulu faire autre chose, les occasions n'auraient pas manqué... J'ai une certaine idée du service public et de notre pays.

Le nouveau monde n'a rien à voir avec la politique. La politique relève du Gouvernement ou du Parlement. Mon rôle, c'est de vous dire qu'il faut regarder le monde : nous avons appris à programmer en Basic, j'ai appris ensuite ce qu'étaient les exaflops et les pétaflops, et maintenant on nous parle d'ordinateurs quantiques, avec des milliards de milliards d'opération à la seconde... Ce nouveau monde arrive quoique vous fassiez. Dans ma jeunesse, Jacques Attali parlait d'énergie et d'information. Quarante ans après, l'information domine l'énergie. C'est le rôle de la CRE et des industriels que d'éclairer les choix des politiques sur ce nouveau monde.

Le système français se fonde d'abord sur la sécurité des approvisionnements. Notre acceptabilité de la défaillance est de trois heures par an, c'est le meilleur système au monde. Il nous permet d'exporter de l'énergie, et est l'un des rares secteurs excédentaires du commerce extérieur. Oui, nos industries françaises sont extrêmement fortes, à la pointe de la technologie, avec un tarif de base régulé.

Sur tous ces sujets, nous sommes aussi à l'intérieur de l'Europe. Il n'y a pas de vérité unique. Le temps de la synthèse est ancien, nous vivons aujourd'hui avec ces contradictions, et cela vaut pour le système énergétique. Mais je ne dirai rien sur la politique.

Pour conforter l'indépendance de la CRE, il faut dire les choses et s'appuyer sur du collégial, mon expérience de préfet m'y aidera. Je n'approuve pas le dépôt par Enedis d'une question prioritaire de constitutionnalité. Ce n'est pas le rôle d'une entreprise publique, fût-elle assurée de son indépendance. Nous devons construire ensemble notre système. Si la concurrence est un peu liée à la baisse des prix, elle est d'abord liée à l'innovation. On doit naviguer entre tout cela.

La suppression des tarifs réglementés revient à Bruxelles. Je suis prêt à m'y rendre pour porter la voix de la Nation. Mais in fine, la Commission ne décide pas seule : il y a des gouvernements et un parlement. Les tarifs réglementés concernent les plus faibles de nos concitoyens. Mais demain, rien ne dit que le tarif de marché ne soit pas moins cher que le tarif réglementé. Regardez ce qui se passe sur les prix industriels...

Oui, monsieur Poniatowski, il faut regarder les constructions tarifaires. Quant à la CSPE, vu le rôle de la CRE dans les appels d'offres, ses travaux doivent être publics. L'autoconsommation est à notre porte : qui aurait pu l'imaginer ? Elle pose d'importantes questions, mais répond à une aspiration forte. N'est-ce pas la version énergétique de l'entre-soi ? N'oublions pas la solidarité : in fine, qui paie le réseau ? Et nous devons développer une industrie exportatrice. Saisissons les opportunités, mais avec prudence, et sans céder à un effet de mode. L'idée des boucles locales est féconde, et ne doit pas être écartée d'un revers de main. Les tarifs de soutirage et d'injection sont maîtrisés par la CRE. La vraie question, c'est le stockage : cloud-storage ou stockage par le producteur ? Le débat est ouvert.

À monsieur Courteau, qui m'interroge sur l'ACER, je répondrai que c'est le Président de la République qui mène les négociations internationales. Ma position personnelle est que le président de la CRE doit être à Bruxelles, et qu'il doit être très présent au sein de la conférence des régulateurs comme auprès des ambassadeurs à Bruxelles ou de l'ENTSO-E, l'association des gestionnaires des réseaux de transport d'électricité. La plaque européenne est indispensable, car elle diversifie les ressources. Mais ne cédons pas à l'idée que cela relève de la technocratie. Et le prix ne fait pas tout.

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