Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous nous retrouvons aujourd’hui, après l’échec de la commission mixte paritaire, pour examiner en nouvelle lecture ce texte de ratification d’ordonnances. Il s’agit ainsi de clore une procédure entamée en 2015, avec l’adoption de la loi NOTRe et notamment de son article 30. Celui-ci concernait la collectivité de Corse et prévoyait la rédaction d’ordonnances destinées à en compléter le dispositif.
Le texte qui nous est proposé renoue avec une tradition. Pendant 165 ans, la Corse n’a compté qu’une seule collectivité territoriale, le département. Durant 63 ans, elle en a compté deux, voire trois. Cela fut le cas de 1790 jusqu’en 1811 et depuis l’instauration de la région, qui a entraîné, en forme de compensation, la création de deux départements, différents d’ailleurs de ceux de 1790. Ainsi, la plus grande partie de l’histoire de la Corse est régie par l’existence d’une seule collectivité, pour l’île. Si le texte est voté, je le répète, nous renouerons avec cette tradition. Même si nous passons du département unique à une sorte de super-région, les Corses seront les mêmes, le territoire sera identique, ainsi que le fonctionnement de l’administration.
Ce projet de loi me laisse une impression de déjà-vu : il présente un air de famille avec celui que j’ai défendu et en partie rédigé en 2003, lorsque le gouvernement de l’époque – le ministre de l’intérieur s’appelait alors Nicolas Sarkozy – a proposé un texte qui créait une collectivité unique par fusion des départements. Rejeté, à quelques milliers de voix, à l’issue d’un référendum consultatif, ce texte a été provisoirement rangé dans les tiroirs. Son dispositif est réapparu à l’occasion de la loi NOTRe.
Le présent projet de loi consiste donc à clore le processus engagé en 1981, lorsque l’on a commencé à transférer de façon massive les compétences des départements à la région Corse, mouvement poursuivi lors de la création de la collectivité de Corse, puis, en 2002, au travers de la loi Jospin. Aujourd'hui, il ne reste plus grand-chose des compétences départementales classiques pour les départements corses, qui dérogent véritablement au droit commun.
Lors de l’examen en première lecture, voilà quinze jours, notre commission des lois a décidé de garder le texte du Gouvernement tel quel, excepté quatre modifications de pure forme, auxquelles il faut ajouter l’amendement de la commission des finances, qui n’a pas du tout remis en cause l’essentiel du dispositif. Or, malgré la faveur dont il bénéficiait de la part des deux commissions, le texte, par les miracles du scrutin public sénatorial, a été rejeté au Sénat. Je le regrette. Au reste, j’ai toujours été défavorable au scrutin public : je préférerais que, comme dans tout régime démocratique qui se respecte, ce soient les présents, plutôt que les absents, qui votent les textes.
Les députés ont voté le projet de loi en première lecture. En commission mixte paritaire, les membres des deux assemblées ont constaté leur désaccord et estimé qu’il ne valait pas la peine de poursuivre inutilement les débats.
Ce matin, la commission des lois du Sénat a voté le texte à l’unanimité, tous groupes confondus.