Intervention de Pierre Bernard-Reymond

Commission des affaires européennes — Réunion du 9 novembre 2011 : 1ère réunion
Budget de l'union européenne — Les ressources propres du budget de l'union européenne - communication de m. pierre bernard-reymond

Photo de Pierre Bernard-ReymondPierre Bernard-Reymond :

La question du niveau du budget de l'Union - seulement 1 % du RNB à ce jour - souffre d'une mauvaise présentation. La réaction immédiate des États membres, peut-être animés par la jalousie, consiste, au nom d'un faux souci de cohérence, à réclamer de l'Union des efforts équivalents à ceux des États membres.

Ce raisonnement ne tient pas si l'on veut bien être de bonne foi et écouter les arguments des partisans d'un budget européen plus important. Le transfert de dépenses des budgets nationaux vers l'Union ne pourrait se faire qu'à dépenses globales constantes. Il faut être sans ambiguïtés sur ce point. A cette condition, les États membres pourraient même retrouver des marges de manoeuvre.

Il faudrait aussi analyser les relations financières dans les États fédéraux entre le niveau fédéral et les États fédérés. Le cas de la Californie, qui est au bord de la faillite, serait peut-être instructif.

S'agissant de la taxe sur les transactions financières, le partage des recettes que j'ai évoqué - deux tiers pour l'Union, un tiers pour les États membres - est avant tout une proposition tactique et réaliste de la Commission européenne face à des États qui rechignent à abandonner des compétences et des pouvoirs. La cohérence mériterait que l'intégralité de cette taxe aille à l'Union.

Je dirais à M. Bernard Piras que le Royaume-Uni espère certainement que la taxe sur les transactions financières verra le jour chez plusieurs États membres, afin de retirer les fruits d'éventuelles délocalisations... Ceci doit conduire les États membres favorables à ce projet à le faire modestement et avec une grande prudence. L'objectif doit être que la taxe existe. Sa montée en puissance, afin qu'elle joue son rôle systémique, devra venir dans un second temps.

Quant au « duty stamp » britannique, il n'a que peu de rapports avec ce que serait la taxe sur les transactions financières. Une minorité de transactions sont concernées et pas celles qui posent le plus de problèmes au regard de l'instabilité financière.

Enfin, cette crise doit nous aider à dépasser notre crispation sur les mots. Certaines réactions à la crise invoquent la défense de la souveraineté des Etats. Je crois que c'est se payer de mots quand on voit la situation de la Grèce ou de l'Italie. A l'avenir, encore plus, être souverain n'ira pas sans plus d'Europe. La souveraineté réelle sera européenne ou ne sera pas.

Le problème est que les exécutifs européens ont pris un tel poids qu'ils ne parviennent plus à se dessaisir de leurs pouvoirs. Cette concentration du pouvoir est aussi, croient-ils, un barrage au populisme. C'est une erreur.

En réalité, l'Union agit toujours en réaction à la crise. Elle n'anticipe rien. Le dernier Conseil européen illustre cela en actant simplement le projet d'une réforme a minima des traités. Au contraire, il ne faut pas avoir peur d'aller plus loin et plus vite. Une piste serait par exemple de donner au Parlement européen la compétence pour valider les décisions prises au niveau du Conseil européen sans passer par les parlements nationaux. De telles idées choquent encore, mais il faut faire bouger les lignes. De même, l'Europe des cercles concentriques doit être assumée.

Je terminerai en disant que je ne suis pas pour autant favorable à une Constitution européenne dans l'immédiat. Un tel projet ne peut être qu'un aboutissement. En réalité, il faut accepter de réviser régulièrement les traités afin de tirer les enseignements de la pratique et ouvrir des perspectives.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion