Intervention de Michèle Coninsx

Commission des affaires européennes — Réunion du 12 février 2014 : 1ère réunion
Justice et affaires intérieures — Eurojust

Michèle Coninsx, présidente d'Eurojust :

La plupart des équipes communes d'enquête concernent la traite des êtres humains et le trafic des stupéfiants. La France y prend une part très active. Ces équipes sont permanentes et opérationnelles.

La plus-value d'Eurojust réside essentiellement dans les réunions de coordination. Ces réunions se tiennent à la requête des autorités nationales qui est adressée aux membres nationaux d'Eurojust. Elles supposent qu'au moins deux États membres aient demandé la tenue d'une telle réunion. Si un État tiers est concerné, l'organisation d'une réunion de coordination implique l'accord préalable de l'ensemble du collège d'Eurojust. Les réunions se tiennent en présence des membres nationaux concernés, des autorités des États membres qui ont fait la demande, des policiers intéressés et très souvent d'Europol. Elles donnent lieu à une analyse très concrète au cas par cas.

Eurojust s'intéresse aussi aux aspects stratégiques et tactiques de la coopération judiciaire en Europe. Des groupes de travail fonctionnent sur les différentes formes de criminalité. En outre, Eurojust a noué un partenariat privilégié avec Europol, l'OLAF, la Commission européenne, ou encore le Parlement européen. Elle a des liens étroits avec les magistrats de liaison des États membres et noue des relations avec les États tiers. Il en résulte de véritables centres d'expertise qui sont capables de mener des analyses pointues sur les différentes formes de criminalité.

La coopération prend aussi la forme d'accords avec les États tiers, avec Europol et l'OLAF. Des « memorandums of understanding » ont été conclus avec Frontex, Interpol, la Commission européenne, ou encore le CEPOL. Ils permettent l'échange d'informations sous une forme simplifiée et opérationnelle.

Eurojust a connu des changements réglementaires importants. La décision qui l'a créée en 2002 a été modifiée en 2008. Le traité de Lisbonne a introduit de nouvelles modifications sur le régime juridique d'Eurojust. En juillet 2013, la Commission européenne a présenté deux propositions de règlement, l'une transformant Eurojust en agence européenne, l'autre prévoyant la création d'un parquet européen.

Les difficultés auxquelles Eurojust peut être confrontée viennent souvent moins de la décision institutive elle-même que de la façon dont les États membres la mettent en oeuvre.

L'article 85 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne a ouvert de nouvelles perspectives pour Eurojust. Il lui permet de déclencher des enquêtes pénales ; il prévoit sa compétence en matière de prévention et de résolution des conflits de juridiction ; il renforce son rôle de coordination et améliore la coopération opérationnelle avec Europol, l'OLAF et à travers les équipes communes d'enquête. En outre, Eurojust doit faire l'objet d'une évaluation par le Parlement européen à laquelle sont associés les parlements nationaux. Enfin, l'article 86 du traité précise que le parquet européen doit être constitué à partir d'Eurojust.

La Commission européenne a souhaité lancer parallèlement la réforme d'Eurojust et la création du Parquet européen en mettant l'accent sur le lien d'Eurojust avec ce nouveau parquet. Eurojust peut apporter un support au Parquet européen au niveau opérationnel, par les liens qu'elle a noués avec les États tiers, par son expertise concernant les équipes communes d'enquête, par son rôle dans la mise en oeuvre des mandats d'arrêt européens. Elle peut en outre appuyer le Parquet européen au plan administratif et dans l'échange d'informations.

Le texte de la Commission européenne prévoit que le Parquet européen serait dirigé par un procureur européen qui serait assisté par des adjoints et par des procureurs délégués dans les États membres. Compte tenu de l'opposition prévisible de certains États, comme le Royaume-Uni, l'Irlande, le Danemark, la Suède et l'Estonie, le Parquet européen devrait être créé dans le cadre d'une coopération renforcée entre les États volontaires. En conséquence, le rôle d'Eurojust sera d'autant plus important pour établir le lien entre les États membres qui participeront à cette coopération et ceux qui seront restés en dehors.

Depuis 2010, une « task force » est en place à Eurojust sur la création du Parquet européen. Des séminaires ont été organisés avec les experts des États membres, les institutions européennes et des universitaires. Des contacts ont été noués avec les parlements nationaux et avec le rapporteur du texte sur Eurojust au Parlement européen, M. Axel Voos.

Eurojust a dû relever beaucoup de défis en peu de temps. La criminalité, la cybercriminalité et la fraude se développent de façon inquiétante. Les événements qui se déroulent en Afrique ont un impact sur ces différentes formes de criminalité. Eurojust a dû relever ces défis avec un budget inchangé à 32,4 millions d'euros. Elle a donc dû réduire ses effectifs et faire plus avec moins de moyens. Un nouveau bâtiment devrait accueillir l'Unité de coopération en 2017.

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