Il n'était donc plus possible de ne pas les écouter !
Le 1er mars, le Premier ministre affirme : « Il faut sortir des demi-mesures et des demi-solutions. » J'y reviendrai dans un instant mais, tout en restant aimable, cette proposition de loi est incontestablement une demi-mesure, une demi-solution, pour ne pas dire plus.
Le 7 mars, le Premier ministre est persuadé que « la présidentielle dépend de l'issue de la bataille du CPE ». Il est des prédictions qui peuvent se révéler exactes !
Le 9 mars, ici même au Sénat, il déclare que « le CPE s'appliquera dans les prochaines semaines ». On aura attendu le week-end dernier pour que le Président de la République et l'UMP le contredisent.
Le 12 mars, il insiste : « Nous ne modifions pas le cadre de la loi. » Le 16 mars, il ajoute : « Maintenant, il faut expliquer et convaincre. Je le ferai jusqu'au bout. » Le 21 mars, il indique encore : « Ni retrait, ni suspension, ni dénaturation. » Enfin, le 28 mars, il affirme: « Pas question de retirer le CPE. »
Que reste-t-il aujourd'hui de ces paroles ? Rien, sinon un texte bouée de sauvetage qui ne l'empêche même pas de couler !
Si, pour ne pas froisser le Premier ministre, on parle aujourd'hui de « remplacement du CPE », il ne s'agit ni plus ni moins que de son retrait, voire d'une abrogation de fait. Une abrogation pure et simple aurait été préférable, car cela aurait été plus clair.
À la place, le compromis rapidement rédigé n'apporte pas de réelles nouveautés. Il ne s'agit que d'un tour d'illusionniste. La majorité cherche surtout à sauver les apparences en réactivant de vieilles potions qui n'ont pas jusqu'à présent fait la preuve de leur efficacité.
Les derniers chiffres publiés par la DARES démontrent clairement que le nombre des emplois créés par les dispositifs visés dans cette proposition de loi est beaucoup plus modeste que vous ne voulez nous le faire croire, monsieur le ministre délégué, pour ce qui concerne notamment les jeunes les moins qualifiés.
En effet, si l'on compare sur deux ans les emplois des jeunes qui ont un niveau de formation VI et V bis - BEP, CAP -, on constate que, s'agissant des emplois aidés, leur effectif global a baissé, puisqu'il s'élevait à 125 948 en janvier 2006, contre 127 600 en janvier 2005.
Peut-être est-ce parce que vous êtes conscient de la situation que vous dites aujourd'hui vouloir « doper », « dynamiser » ces dispositifs en prétendant y injecter 150 millions d'euros supplémentaires ! Mais peut-on parler réellement d'un effort supplémentaire quand, initialement, le dispositif SEJE, le dispositif de soutien à l'emploi des jeunes en entreprise, était prévu pour une durée de trois ans et que vous le ramenez, pour je ne sais quelle raison, à deux ans ? N'est-ce pas là un tour de passe-passe ?
En outre, d'où viennent les 150 millions annoncés ? De report de crédits, dites-vous. Mais alors, quels sont les crédits que vous amputez d'autant ? Nous n'en savons rien. Et nous n'oublions pas que, dans la loi de finances, vous aviez déjà largement amputé les crédits destinés à ces mêmes dispositifs, avec, par exemple, une baisse des crédits de 36 % pour le SEJE.
Monsieur le ministre, l'article 1er de cette proposition de loi ne fera pas illusion longtemps. C'est pourquoi nous voterons contre.