Intervention de Colette Mélot

Commission des affaires européennes — Réunion du 12 mars 2015 à 10h05
Justice et affaires intérieures — Action de l'union européenne contre les sites internet faisant l'apologie de la violence terroriste : communication de m. andré gattolin et de mme colette mélot

Photo de Colette MélotColette Mélot :

J'en viens maintenant à la question de l'emploi d'Internet pour développer et diffuser un contre-discours face à la propagande djihadiste pour lutter contre la radicalisation. Là encore, bien que Daesh diffuse des vidéos sur l'ensemble de la planète, la réponse est plus souvent nationale. Mais cela ne veut pas dire que l'Europe doit rester inactive, ni qu'elle l'est !

La stratégie de l'Union européenne de lutte contre la radicalisation et le recrutement de terroristes de 2005 a été révisée en 2014. Elle prévoit notamment de renforcer le contre-discours, de lutter contre la radicalisation sur Internet, d'impliquer l'ensemble des acteurs de première ligne, et de soutenir les travaux du réseau européen de sensibilisation à la radicalisation (RSR, ou RAN pour l'acronyme anglais Radicalisation Awareness Network). Des lignes directrices, qui déclinent cette stratégie, ont été adoptées au Conseil JAI des 4 et 5 décembre 2014. Elles encouragent par exemple l'élaboration de campagnes de communication ciblées au niveau de l'Union, la création d'un forum avec les acteurs majeurs (publics et privés de l'Internet) ou le soutien aux initiatives de désengagement.

Le RSR a été créé en 2011 par la Commission européenne et organise son activité autour de huit groupes de travail composés de praticiens européens d'horizons très divers et impliqués dans la problématique de la radicalisation. Son objectif est de faire émerger des pratiques innovantes en soutien à l'action des États membres. Un groupe s'occupe plus particulièrement du suivi d'Internet et des réseaux sociaux et travaille sur la question de savoir quel contre-message peut être envisagé sur Internet et les médias sociaux, alors que le message djihadiste est largement banalisé. Bien que cet outil soit limité, il présente des vertus et ne doit pas être négligé. Surtout, il convient d'associer pleinement à cette démarche les grandes entreprises d'Internet et des réseaux sociaux comme Google, Facebook, Twitter... Car, que ce soit en Europe ou en Amérique, que ce soient les acteurs publics ou privés, nous manquons de capacité en matière d'élaboration et de diffusion d'un contre-message !

Si l'Europe peut faire beaucoup pour mettre en relation l'ensemble de ces acteurs, elle pourrait s'inspirer de nos voisins britanniques qui ont développé une stratégie de contre-discours depuis plusieurs années déjà. Notre travail nous a montré que la Commission européenne a créé un « groupe d'orientation dédié à la communication stratégique » (SSCAT - Syria Strategic Communications Advisory Team). Il s'agit d'un réseau d'experts - pour la plupart britanniques - qui a pour objectif de proposer des solutions s'insérant dans une logique de contre-discours. Le Service d'Information du Gouvernement, le SIG, participe à ce réseau et c'est une très bonne chose. Certes, là encore, il ne s'agit que de la mise en relation des acteurs et de la diffusion des connaissances, mais je rappelle à nouveau que dans ce domaine, en application du traité de Lisbonne, l'Union européenne ne peut venir qu'en appui de l'action des États membres. Toutefois, ces initiatives méritent d'être mieux connues, car cela montre que l'Union européenne ne reste pas passive face au terrorisme !

Enfin, avant qu'André Gattolin n'aborde la question de la suppression des contenus, et dans la continuité de ce qui a été dit sur la coopération policière par nos collègues Joëlle Garriaud-Maylam et Michel Delebarre, je voudrais mentionner une section spécifiquement dédiée à la surveillance du web, créée par Europol en 2007 et dite « Focal point check the web ». Il s'agit d'une unité qui pratique la recherche d'informations en langue arabe ayant trait au terrorisme islamiste sur Internet en vue de favoriser leur partage entre les autorités compétentes des États membres. La base d'informations « Check the Web » référencie ainsi les sites islamistes observés, les communiqués et les publications diffusés par les organisations terroristes, les traductions et les analyses de ces communiqués et publications. Or, nous avons appris que seules 4 personnes arabisantes travaillent dans cette unité ! On ne peut pas se limiter à cela et face à l'importance qu'a pris le phénomène de radicalisation djihadiste dans nos sociétés, cette section doit voir ses moyens renforcés.

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