Intervention de Philippe Bas

Commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du Règlement et d'administration générale — Réunion du 20 juin 2017 à 15h05
Bilan annuel de l'application des lois — Communication

Photo de Philippe BasPhilippe Bas, président :

Comme chaque année à cette période, il me revient de vous présenter le bilan de l'application des lois relevant du champ de compétences de notre commission, à la demande de la Conférence des présidents, en lien avec notre collègue Claude Bérit-Débat, président de la délégation du Bureau chargée du travail parlementaire, du contrôle et des études.

La plupart des mesures d'application des lois sont prises.

Toutefois, les délais dans lesquels elles sont publiées sont parfois plus longs que les délais d'adoption des lois elles-mêmes. Le pouvoir exécutif se plaint quelques fois de la lenteur des travaux parlementaires, force est de reconnaître qu'il lui arrive d'être plus lent que nous !

L'inflation législative, qui est un mal bien connu et régulièrement dénoncé, s'est aggravée en fin de législature : le coefficient multiplicateur du nombre d'articles au cours de la navette parlementaire est ainsi passé de 1,83 entre 2007 et 2014 à 2,14 en 2015-2016.

Il est aussi possible de relever l'accélération sensible, à la toute fin du quinquennat, du rythme de parution des mesures d'application des lois promulguées au cours de la quatorzième législature, lorsque l'équipe gouvernementale sortante s'est efforcée de terminer son travail avant de laisser la place à une nouvelle équipe.

Ainsi, pour les lois relevant de la compétence de notre commission, 92 mesures d'application ont été prises aux mois d'avril et mai 2017, soit une moyenne de 46 par mois, contre une moyenne de 7 mesures d'application par mois entre le 26 juin 2012 et le 30 septembre 2016. Le rythme a donc été 6,5 fois plus élevé au cours des deux derniers mois qu'au cours des cinquante-et-un premiers mois du précédent quinquennat. C'est la preuve que lorsque le Gouvernement veut, il peut !

Si l'on peut s'en réjouir pour le traitement du stock et les délais de publication des mesures d'application des lois, il convient d'être attentifs à ce que leur qualité ne s'en trouve pas dégradée. Ce sera l'objet du bilan que nous ferons l'année prochaine, puisqu'un grand nombre de mesures publiées aux mois d'avril et mai concernent des lois promulguées au cours de l'année parlementaire 2016-2017.

Trente lois promulguées au cours de l'année parlementaire 2015-2016 ont été examinées au fond par notre commission, soit 55 % de l'ensemble des lois promulguées hors conventions internationales. Dix-huit étaient d'initiative parlementaire, dont dix issues de propositions de loi sénatoriales.

Au 31 mars 2017, 20 étaient entièrement applicables, dont 16 d'application directe. Le taux d'application de ces 30 lois s'élevait à 72 %, soit un taux sensiblement équivalent à celui de l'an passé (76 %). Les délais de publication des mesures réglementaires d'application se sont en revanche détériorés, puisqu'un peu moins d'un tiers de ces mesures ont été publiées dans un délai inférieur ou égal à six mois, contre 73,5 % en 2014-2015.

Au-delà de ces données chiffrées, je voudrais plus particulièrement évoquer la mise en oeuvre de trois réformes intervenues au cours de l'année parlementaire 2015-2016.

La première résulte de la loi organique du 25 avril 2016 relative au statut des autorités administratives indépendantes créées par la Nouvelle-Calédonie, que nous avons votée dans les délais les plus brefs, pour assouplir les conditions de nomination des membres des autorités administratives indépendantes créées par la Nouvelle-Calédonie afin de faciliter la constitution du collège de l'autorité locale de la concurrence, instituée par une loi du pays du 24 avril 2014, et lutter ainsi contre la hausse des prix. Malgré cet assouplissement, les membres de l'autorité locale de la concurrence n'ont toujours pas été nommés à ce jour et les compétences de cette autorité administrative indépendante restent pour le moment exercées par le gouvernement de la Nouvelle-Calédonie... J'imagine que vous le regrettez, Madame Tasca.

La deuxième réforme intervenue au cours de l'année parlementaire 2015-2016 que je voudrais évoquer résulte des trois lois du 1er aout 2016 relatives aux « listes électorales ». Leurs dispositions entreront en vigueur selon des modalités fixées par décret en Conseil d'État et, au plus tard, le 31 décembre 2019. Ce chantier nécessitera du temps. C'est pourquoi, à l'initiative de notre rapporteur Pierre-Yves Collombat, le Sénat a prévu une entrée en vigueur différée et aucun décret d'application n'a encore été pris. Il est donc normal que ces lois ne soient formellement pas encore applicables.

La dernière réforme que je voudrais évoquer résulte de la loi du 25 avril 2016 de modernisation de diverses règles applicables aux élections. Elle porte sur les sondages électoraux diffusés en France, même depuis l'étranger, et sur les opérations de simulation de vote réalisées à partir de sondages. Nos collègues Jean-Pierre Sueur et Hugues Portelli ont sans doute été particulièrement attentifs à sa mise en oeuvre puisqu'elle s'inspire de recommandations qu'ils avaient formulées dans un rapport d'information d'octobre 2010 et d'une proposition de loi adoptée à l'unanimité par le Sénat le 14 février 2011 mais jamais inscrite à l'ordre du jour de l'Assemblée nationale. Lors de la première publication ou diffusion en France d'un sondage électoral, plusieurs informations doivent désormais être communiquées à la commission des sondages et, pour certaines, mises en ligne sur le site de la commission. Il s'agit notamment des marges d'erreur et des critères de redressement. Ainsi, un nombre significatif de notices a été publié, avec un pic de 137 notices au mois de mars dernier en raison de la campagne électorale pour l'élection présidentielle. Ces informations complémentaires devraient également, en principe, être publiées par les organes de presse qui commandent les sondages. Dans la pratique toutefois, les organes de presse demandent aux instituts de sondage de les publier préalablement eux-mêmes sur leur site, l'obligation de publication d'informations complémentaires ne s'appliquant qu'à la « première publication ou diffusion » des résultats du sondage.

Le rôle de la commission des sondages a été renforcé. Elle est habilitée à contrôler la conformité du sondage à la loi et aux règlements. En cas de violation de leurs dispositions ou d'altération de la portée des résultats obtenus, elle peut adresser une mise au point à « toute personne qui publie ou diffuse [ou a] commandé, réalisé, publié ou diffusé » un sondage électoral. Enfin, les sanctions pénales en cas d'infraction ont été renforcées.

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