Intervention de Thani Mohamed Soilihi

Réunion du 6 juillet 2017 à 9h30
Ordonnance modifiant le code des juridictions financières — Adoption en procédure accélérée d'un projet de loi dans le texte de la commission

Photo de Thani Mohamed SoilihiThani Mohamed Soilihi :

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, nous examinons le projet de loi visant à ratifier l’ordonnance du 13 octobre 2016 modifiant la partie législative du code des juridictions financières qui découle de la loi sur la déontologie et les droits et obligations des fonctionnaires et qui autorisait le Gouvernement à prendre par ordonnances diverses mesures législatives en rapport avec le code des juridictions financières.

En effet, après avoir proposé dans son projet initial de prendre par voie législative de nombreuses dispositions, notamment en matière de déontologie et dans le domaine statutaire, le précédent gouvernement avait, par lettre rectificative, réintégré ces sujets dans le champ d’une future ordonnance.

Une série de réformes étaient à l’époque en cours de discussion et leurs conclusions devaient pouvoir être intégrées à l’issue du dialogue social interne aux institutions concernées.

L’ordonnance dont la ratification nous est proposée ce matin modernise donc les dispositions relatives aux missions et à l’organisation des juridictions financières dans quatre champs.

Le premier est l’adaptation des dispositions relatives à l’activité, au régime disciplinaire et à l’avancement des magistrats et personnels de la Cour des comptes, ainsi que des magistrats et rapporteurs des chambres régionales et territoriales des comptes afin d’améliorer la garantie de leur indépendance.

Le deuxième est la modification des règles statutaires relatives aux magistrats de la Cour des comptes et des chambres régionales et territoriales des comptes afin de diversifier leur recrutement et de déterminer les règles qui leur sont applicables en matière d’incompatibilité ou de suspension de fonctions.

Le troisième est la modernisation du code des juridictions financières.

Enfin, le quatrième est la limitation de la durée de certaines fonctions juridictionnelles ou administratives exercées par les magistrats de la Cour des comptes et des chambres régionales des comptes.

Harmonisation des procédures d’enquêtes lorsque la Cour est saisie par le Parlement, simplification de certaines procédures qui tombaient en désuétude, modifications des statuts des membres de la Cour ou des chambres régionales et territoriales des comptes, renforcement des droits des personnes contrôlées par la Cour de discipline budgétaire et financière, force est de constater que ce sont là autant de dispositions qui ne sont ni complexes, ni clivantes, ni contraires au champ d’habilitation donné au Gouvernement, qui a scrupuleusement respecté le périmètre arrêté par le Parlement.

Ces modifications permettent notamment de prendre pleinement en compte le rapprochement opéré entre la Cour et les chambres régionales et territoriales des comptes, qui se voient confier de nouvelles responsabilités, en particulier quant à l’évaluation des politiques publiques.

Enfin, et cela a été souligné en commission la semaine dernière, l’examen de ce projet de loi peut nous conduire à nous interroger sur l’existence même de la Cour de discipline budgétaire et financière, qui est une juridiction administrative, mais dotée de pouvoirs de sanction dans une matière presque pénale pour condamner les faits avérés de mauvaise gestion et de malhonnêteté.

La Cour de cassation semble estimer que de telles sanctions ne devraient pas être du ressort d’une juridiction administrative.

Cependant, tel qu’il est prévu par l’ordonnance, le renforcement des critères d’impartialité de la Cour de discipline de façon à s’aligner sur les critères de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales permet d’asseoir la crédibilité de la Cour. Les spécificités propres aux entreprises et services publics justifient pleinement l’existence de cette chambre.

C’est pour toutes ces raisons qu’une unanimité s’est dégagée lors de l’examen de ce texte en commission. Les ajouts apportés par celle-ci ont permis de préciser le contenu et de coordonner les dispositions relatives à l’outre-mer que le précédent gouvernement n’avait pas prises en compte et que l’Assemblée nationale avait ignorées en février dernier.

Je terminerai en soulignant l’unanimité du jour autour de la procédure de recours aux ordonnances, cette même procédure qui est pourtant fortement décriée en ce moment et dont certains contestent la pertinence ou remettent en cause le caractère démocratique. J’avoue que j’en ai fait partie…

Le projet de loi que nous examinons permet donc de relativiser les critiques dont je vous parlais à l’instant : tout en étant encadré par le Parlement, le recours aux ordonnances peut permettre à l’action gouvernementale une plus grande efficacité en alliant rapidité et souplesse.

Nous saluons donc toutes ces modifications qui étaient attendues et nécessaires. Elles tiennent compte d’évolutions jurisprudentielles et s’adaptent aux exigences de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales.

Ce projet de loi permet aussi de mettre en lumière le travail indispensable de la Cour des comptes, dont l’audit annuel a été dévoilé il y a une semaine, ainsi que le travail de la Cour de discipline budgétaire et financière et des différentes juridictions financières, et par là même de faciliter leur travail.

Cette suite attendue du travail accompli par le Parlement dans le cadre du texte relatif à la déontologie des fonctionnaires contribuera à améliorer l’image de l’administration et du monde politique.

Cependant, ces efforts doivent être amplifiés, et la crise de défiance que nous vivons aujourd’hui nous oblige à toujours plus d’exemplarité. Nous aurons l’occasion d’en reparler ici même dès la semaine prochaine lors de la discussion du projet de loi et du projet de loi organique rétablissant la confiance dans l’action publique.

Le groupe La République en marche votera donc ce texte dans la version issue des travaux de notre commission.

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