Séance en hémicycle du 6 juillet 2017 à 9h30

Résumé de la séance

Les mots clés de cette séance

  • discipline
  • l’ordonnance
  • ratification

La séance

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La séance est ouverte à neuf heures trente.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Caffet

Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.

Il n’y a pas d’observation ?…

Le procès-verbal est adopté sous les réserves d’usage.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Caffet

L’ordre du jour appelle la désignation d’un secrétaire du Sénat.

J’informe le Sénat que le groupe du Rassemblement démocratique social et européen a fait connaître à la présidence le nom du candidat qu’il propose pour remplacer, en qualité de secrétaire du Sénat, notre regretté collègue, François Fortassin.

La candidature de M. Jean Claude Requier a été publiée et la désignation aura lieu conformément à l’article 3 du règlement.

Applaudissements.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Caffet

Mes chers collègues, il m’est particulièrement agréable de saluer la présence, dans notre tribune d’honneur, d’une délégation de députés de l’Assemblée nationale populaire de la République populaire de Chine, conduite par M. Chi Wanshun, …

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Caffet

M. le président. … membre du comité permanent de l’Assemblée nationale populaire, vice-président de la commission des affaires étrangères et président du groupe d’amitié Chine-France

Mmes et MM. les sénateurs, ainsi que M. le secrétaire d'État chargé des relations avec le Parlement, porte-parole du Gouvernement, se lèvent

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Caffet

Le groupe d’amitié France-Chine du Sénat, animé par notre collègue Didier Guillaume, reçoit cette délégation aujourd’hui dans nos murs. La délégation est arrivée en France hier.

Cette visite se déroule à Paris autour de deux thématiques : « l’agriculture en 2050 » et « les relations entre la Chine, la France et l’Union européenne : l’expérience pratique en France sur l’entraide judiciaire en matière pénale ». Elle s’achève samedi.

Soyez les bienvenus au Sénat, chers collègues chinois !

Applaudissements.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Caffet

M. le président du Sénat a reçu de M. le Premier ministre :

- le projet de convention entre l’État et Bpifrance relative à l’action « Industrie du futur – volet « Industrie du futur - développement de l’offre » du programme d’investissements d’avenir, PIA 3 ;

- l’avenant n°1 à la convention du 12 décembre 2014 entre l’État et l’Agence nationale pour la rénovation urbaine relative au programme d’investissements d’avenir - action : « Ville durable et solidaire, excellence environnementale du renouvellement urbain ».

Acte est donné du dépôt de ces documents.

Ils ont été transmis aux commissions permanentes compétentes.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Caffet

L’ordre du jour appelle la discussion du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, ratifiant l’ordonnance n° 2016–1360 du 13 octobre 2016 modifiant la partie législative du code des juridictions financières (projet n° 432, texte de la commission n° 594, rapport n° 593).

Dans la discussion générale, la parole est à M. le secrétaire d'État.

Debut de section - Permalien
Christophe Castaner

Monsieur le président, madame la rapporteur, mesdames, messieurs les sénateurs, permettez-moi, à mon tour, de saluer les représentants du Parlement chinois et le président du groupe d’amitié Chine-France.

Mesdames, messieurs, l’article 86 de la loi du 20 avril 2016 relative à la déontologie et aux droits et obligations des fonctionnaires habilitait le Gouvernement à prendre par ordonnance toutes mesures relevant du domaine de la loi ayant pour objet, d’une part, la modernisation du code des juridictions financières, « afin d’en supprimer les dispositions devenues obsolètes, redondantes ou de les clarifier », d’autre part, l’adaptation de règles statutaires concernant notamment le régime disciplinaire, la garantie de l’indépendance ou bien encore le recrutement par le tour extérieur.

Cette ordonnance a été publiée par le Gouvernement le 13 octobre 2016. Puis, le projet de loi de ratification a été adopté par l’Assemblée nationale le 16 février 2017. Vous en êtes, mesdames, messieurs les sénateurs, désormais saisis.

Je précise que les évolutions que nous examinons concernent non seulement la Cour des comptes, mais aussi les chambres régionales des comptes, les chambres territoriales des comptes et la Cour de discipline budgétaire et financière.

Tout d’abord, le projet d’ordonnance modernise les dispositions relatives aux missions, à l’organisation et aux procédures des juridictions financières.

L’ordonnance comporte une importante dimension technique puisqu’elle procède à une clarification de la rédaction du code des juridictions financières. À la faveur de cette refonte, plusieurs dispositions de modernisation et de clarification sont introduites.

Le code des juridictions financières avait en effet perdu de sa cohérence au fur et à mesure d’ajouts ponctuels et successifs.

Les juridictions financières ont, il est vrai, vu leurs attributions s’élargir au cours des quinze dernières années. Il était donc nécessaire d’en tirer les conséquences en termes de lisibilité du texte.

Cet élargissement a touché leurs métiers puisqu’au jugement des comptes et au contrôle de la gestion se sont ajoutées l’évaluation des politiques publiques et la certification des comptes.

Comme vous le savez tous, cet élargissement également a touché leurs publics, notamment avec le développement des demandes d’enquêtes d’origine parlementaire.

Il a, en outre, touché le périmètre de leur compétence. Ainsi, l’an dernier, elles se sont vu confier, par la loi du 26 janvier 2016 de modernisation de notre système de santé, le contrôle des comptes et de la gestion des établissements sociaux et médico-sociaux et des cliniques privées.

Un effort de lisibilité générale des procédures a été réalisé afin de les rendre plus homogènes et de faciliter leur compréhension par les organismes contrôlés et les citoyens.

À cette occasion, les droits des personnes contrôlées ont aussi été renforcés, notamment avec une extension et une clarification de leur droit à être entendues directement en audition par les formations de délibéré des juridictions financières.

Par ailleurs ont été simplifiées des procédures devenues trop complexes ou dont la spécificité n’était plus du tout justifiée. C’est le cas, par exemple, des dispositions relatives au contrôle des entreprises publiques, qui résultaient d’une rédaction datant de 1976.

D’autres procédures ont été harmonisées. Le nouvel article L. 132-5 prévoit ainsi que « lorsque la Cour des comptes procède aux enquêtes qui lui sont demandées par les commissions des affaires sociales du Parlement, elle peut intervenir dans le domaine de compétence des chambres régionales et territoriales des comptes, par cohérence avec la disposition applicable lorsque la saisine émane des commissions des finances ».

Les dispositions relatives au droit de communication sont elles aussi mises à jour dans ce texte. En effet, les juridictions financières disposent traditionnellement d’un droit étendu de communication des documents utilisés par les organismes qu’elles contrôlent, mais ces articles avaient besoin d’être adaptés.

Adaptés, tout d’abord, du fait de la dématérialisation croissante de l’information : aujourd’hui, le droit de communication doit avant tout être un droit d’accès à des données et des traitements informatiques.

Adaptés également dans leur champ, notamment en ce qui concerne les dossiers des commissaires aux comptes de ces organismes, puisque le code des juridictions financières n’avait pas été modifié à la suite des extensions du périmètre de l’obligation de certification des comptes, en particulier aux établissements publics de santé.

Le projet d’ordonnance apporte par ailleurs quelques modifications relatives au statut des membres des juridictions financières.

La loi relative à la déontologie et aux droits et obligations des fonctionnaires avait d’ores et déjà prévu un certain nombre de dispositions en la matière. Sur ces questions statutaires, l’ordonnance intervient donc de façon plus ponctuelle. Ainsi, s’agissant de la Cour des comptes, elle porte principalement sur la mise à jour de quelques dispositions du code qui n’étaient plus cohérentes au vu d’évolutions législatives antérieures, que ce soit la loi organique du 1er août 2001 relative aux lois de finances, qui a supprimé la notion de « vacances » de postes ou le passage du grade d’auditeur au grade de conseiller référendaire en trois ans et non plus en sept ans, réforme déjà ancienne qui a aujourd’hui des conséquences sur la suite de la carrière des magistrats.

Enfin, si la loi du 13 décembre 2011 relative à la répartition des contentieux et à l’allègement de certaines procédures juridictionnelles a prévu l’adoption par la Cour et les chambres régionales des comptes de normes professionnelles, elle avait restreint leur champ d’application aux seuls magistrats. L’ordonnance élargit donc ce champ aux rapporteurs extérieurs, aux conseillers maîtres en service extraordinaire, aux conseillers référendaires en service extraordinaire et aux conseillers-experts.

S’agissant des magistrats des chambres régionales des comptes, le régime d’incompatibilité applicable à leur détachement est aménagé : pour tenir compte de l’élargissement des ressorts géographiques des chambres régionales des comptes, l’ordonnance rend en effet possible une mobilité sortante vers une collectivité ou un organisme de ce ressort, ce qui était jusqu’à présent impossible avant un délai de trois ans.

Toutefois, et c’est bien naturel, l’ordonnance l’assortit de conditions strictes : au cours de ses trois dernières années dans la chambre, le magistrat ne doit pas avoir participé au jugement des comptes de la collectivité vers laquelle il se destine, ni au contrôle de ses comptes et de sa gestion, ni au contrôle de ses actes budgétaires, ni même à ceux d’une autre collectivité ou organisme ayant pour représentant légal celui de la structure qu’il souhaite rejoindre.

Enfin, l’ordonnance simplifie et modernise les procédures de la Cour de discipline budgétaire et financière, sans toucher toutefois à ses compétences, que ce soit sur le plan des infractions et des sanctions ou sur celui des justiciables.

La Cour de discipline budgétaire et financière, juridiction administrative spécialisée chargée de réprimer les violations, par les gestionnaires publics, des règles de protection des finances publiques, est régie par des règles qui proviennent essentiellement de la loi du 25 septembre 1948. Celle-ci a été entièrement codifiée dans la partie législative du code des juridictions financières dans les années quatre-vingt-dix et n’a été modifiée, s’agissant des règles de procédure, qu’à la marge depuis 1948.

Dès lors, certaines de ces règles étaient imprécises et méritaient, au regard des exigences tant du droit interne que du droit européen, d’être clarifiées et modernisées.

Les modifications portent sur des règles d’organisation et de procédure, comme les possibilités de représentation du procureur général dans ses fonctions de ministère public, le plan de déroulement de l’audience, la possibilité pour les procureurs de la République de déférer des faits à la Cour – c’était déjà le cas dans la pratique, même si ce n’était pas encadré – ou la date d’interruption de la prescription.

Elles renforcent les droits de la défense en clarifiant les règles d’incompatibilité et de récusation des membres de la Cour et des rapporteurs, en élargissant le droit d’accès au dossier des personnes mises en cause et en affichant expressément le caractère de sanction de la décision de publication de l’arrêt que peut rendre la Cour.

L’ordonnance supprime, enfin, certaines dispositions obsolètes ou susceptibles d’être déclarées non conformes à la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, comme le suivi du déroulement de l’instruction par le ministère public, la demande d’avis des ministres, la présentation de son rapport par le rapporteur à l’audience ou la voix prépondérante du président en cas de partage égal des voix.

Avant de conclure ce propos, je souhaite saluer le travail rigoureux et très précis de Mme la rapporteur.

Les amendements qu’elle a présentés à la commission des lois, qui les a adoptés, ont permis de corriger quelques erreurs matérielles et de répondre à un point de droit soulevé récemment par le Conseil d’État, à savoir que seule la loi, et non le règlement, peut organiser certaines modalités selon lesquelles sont prises les décisions juridictionnelles de la Cour et des chambres régionales et territoriales des comptes.

Je vous invite donc à adopter sans réserve ce projet de loi.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Di Folco

Monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, nous examinons donc le projet de loi ratifiant l’ordonnance du 13 octobre 2016 modifiant la partie législative du code des juridictions financières.

Cette ordonnance a été prise sur le fondement de l’article 86 de la loi du 20 avril 2016 relative à la déontologie et aux droits et obligations des fonctionnaires, qui a habilité le Gouvernement à intervenir dans le domaine législatif pour modifier les règles statutaires applicables aux magistrats des juridictions financières, adapter les dispositions régissant l’activité de ces magistrats et moderniser le code des juridictions financières, « afin d’en supprimer les dispositions devenues obsolètes, redondantes ou de les clarifier ».

Les cinquante-trois articles de l’ordonnance modifient l’ensemble des livres du code des juridictions financières. Ils concernent ainsi la Cour des comptes, les chambres régionales et territoriales des comptes, mais également la Cour de discipline budgétaire et financière, la CDBF.

Ce texte n’introduit que peu de modifications de fond ; la plupart concernent les questions statutaires. Les autres modifications apportées visent à adapter le code aux évolutions des missions des juridictions financières et à moderniser la Cour de discipline budgétaire et financière.

L’ordonnance restructure principalement les différentes parties du code des juridictions financières en créant, par exemple, de nouvelles sections au sein de plusieurs chapitres relatifs aux missions de la Cour et des chambres régionales et territoriales des comptes ou au sein du chapitre qui régit les relations de la Cour des comptes avec le Parlement et le Gouvernement, et en déplaçant de nombreux articles, sans pour autant modifier le fond.

Au-delà des dispositions d’organisation du code et des simples clarifications rédactionnelles, l’ordonnance modifie sur le fond certaines dispositions pour tenir compte de l’évolution des missions des juridictions financières au fil du temps, notamment avec l’ajout des missions d’évaluation des politiques publiques et de certification des comptes de diverses structures.

Ainsi, l’ordonnance harmonise les procédures d’enquêtes demandées à la Cour des comptes par le Parlement, simplifie certaines procédures obsolètes, notamment celles qui concernent le contrôle des entreprises publiques et de leurs filiales, renforce les droits des personnes contrôlées à être entendues sur l’ensemble des observations formulées par la Cour, y compris celles qui ne sont pas publiées.

L’ordonnance modifie ensuite le statut des membres de la Cour et des chambres régionales et territoriales des comptes. Ainsi, elle applique les « normes professionnelles » des juridictions financières à l’ensemble de leurs membres.

Elle modifie le régime disciplinaire des magistrats de la Cour et des chambres régionales et territoriales des comptes en s’inspirant de celui qui est prévu par les articles 26 et 27 de la loi relative à la déontologie et aux droits et obligations des fonctionnaires pour les agents publics et les militaires.

Elle modifie également certaines conditions d’avancement des magistrats de la Cour des comptes.

Elle assouplit le régime de détachement et de mise en disponibilité des magistrats des chambres régionales et territoriales des comptes auprès des collectivités territoriales, établissements publics et organismes de leur ressort.

L’ordonnance modifie certaines règles de procédures applicables devant la Cour de discipline budgétaire et financière.

Ainsi, les possibilités de représentation et d’assistance du procureur général près la CDBF sont clarifiées et la liste des autorités pouvant déférer une affaire au ministère public près cette cour est modifiée.

L’ordonnance fait évoluer les conditions d’instruction en renforçant l’indépendance du rapporteur et en modifiant les règles de prescription.

Les droits des personnes mises en cause devant cette cour sont également renforcés : elles peuvent désormais avoir accès à leur dossier dès l’instruction et n’ont plus à attendre le renvoi de l’affaire devant la Cour.

Le délai de prescription n’est pas modifié. En revanche, sept cas d’interruption de ce délai sont précisés.

Les avis du ministre concerné par les faits et du ministre des finances sont supprimés.

L’ordonnance renforce également les critères d’impartialité de la Cour de discipline budgétaire et financière conformément à la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales. Un dispositif de récusation des magistrats est consacré au niveau législatif, lorsqu’il existe une raison sérieuse de mettre en doute leur impartialité.

La prépondérance de la voix du président de la formation de jugement en cas de partage des voix est supprimée.

Enfin, des modifications sont apportées au régime de publication des arrêts de la Cour de discipline budgétaire et financière. Ceux-ci peuvent être publiés même lorsqu’ils n’ont pas acquis un caractère définitif.

Sur le fond, l’ordonnance ne modifie qu’à la marge les procédures applicables devant la Cour des comptes et devant les chambres régionales et territoriales des comptes. En revanche, elle modifie de façon importante les procédures de la Cour de discipline budgétaire et financière, alors même qu’il s’agit d’un sujet en soi. Comme je l’avais d’ailleurs évoqué lors de la présentation de la proposition de loi de notre collègue Vincent Delahaye visant à assurer la sincérité et la fiabilité des comptes des collectivités territoriales, il apparaît nécessaire de mener une réflexion globale sur le fonctionnement et le champ de compétences de cette juridiction.

Sur ce sujet important, l’ordonnance prend des mesures qui dépassent de loin le simple « toilettage » légistique et, donc, le périmètre de l’habilitation. Nous pouvons nous étonner de cette façon de faire.

Toutefois, la plupart de ces modifications visent à renforcer les droits des personnes mises en cause devant la Cour de discipline budgétaire et financière, notamment en leur permettant d’accéder à leur dossier dès l’instruction et non plus après renvoi de l’affaire.

La suppression de la voix prépondérante du président de la formation de jugement peut davantage poser question, notamment parce que cette mesure ne va pas de soi, d’autant que les magistrats siègent en nombre pair. Je rappelle, par exemple, que l’assemblée du contentieux du Conseil d’État ne peut statuer « qu’en nombre impair » et que le président du Conseil constitutionnel dispose d’une voix prépondérante en cas de partage.

Lors de son audition, M. Didier Migaud, Premier président de la Cour des comptes et président de la CDBF, a précisé qu’historiquement il n’a jamais été fait appel à sa voix prépondérante, aucun partage de voix n’ayant été constaté. Il a également précisé qu’en cas de partage des voix et en l’absence de voix prépondérante du président, le bénéfice du doute serait laissé à la personne mise en cause.

Dès lors, ces deux observations n’ont pas paru constituer d’obstacle dirimant à la ratification de la présente ordonnance.

De plus, d’un point de vue formel, on peut constater que le Gouvernement a respecté le délai de l’habilitation pour prendre l’ordonnance, ainsi que le délai qui lui était imparti pour déposer un projet de loi de ratification.

Il convient également de saluer les efforts de clarification et de structuration du code des juridictions financières.

La commission des lois a cependant approuvé cinq amendements visant principalement à apporter des précisions au texte de l’ordonnance, à corriger des erreurs matérielles, à procéder à des coordinations concernant les dispositions relatives à l’outre-mer et à préciser, au niveau législatif, la liste des formations délibérantes des juridictions financières exerçant des fonctions juridictionnelles.

La commission des lois ayant adopté le projet de loi ainsi modifié, elle espère, monsieur le secrétaire d'État, que vous parviendrez à trouver une petite « niche » dans l’ordre du jour de l’Assemblée nationale pour que ce texte qui sera adopté « non conforme » par le Sénat puisse entrer rapidement en vigueur…

Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et du groupe Union Centriste.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Caffet

La parole est à M. Vincent Delahaye, pour le groupe Union Centriste.

Debut de section - PermalienPhoto de Vincent Delahaye

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, la ratification de l’ordonnance qui nous est soumise ce matin aurait pu passer inaperçue si le contexte de cette session extraordinaire n’avait pas posé de nouveau d’importantes questions relatives à nos juridictions financières.

En effet, nous examinerons la semaine prochaine en séance publique les deux projets de loi relatifs au rétablissement de la confiance dans l’action publique. Ces textes ont vocation à inaugurer un cycle législatif nous conduisant jusqu’à une révision de la Constitution dans les mois prochains.

À cet égard, le Président de la République nous a rappelé, lors de la dernière réunion du Congrès, son souhait de supprimer la Cour de justice de la République, la CJR, juridiction d’exception compétente pour juger des actes commis par les membres du Gouvernement.

Cette annonce concerne directement les dispositions de l’ordonnance qui sont relatives à la Cour de discipline budgétaire et financière. En effet, depuis la loi du 25 septembre 1948, cette juridiction n’a jamais été compétente pour juger des infractions financières commises par les ordonnateurs principaux des ministères, c’est-à-dire les ministres eux-mêmes.

Dès lors, je profite de cette séance pour poser la question : quel ordre de juridiction sera compétent pour juger des carences financières et comptables des ministres, le juge administratif ou le juge judiciaire ? En réalité, cela repose fatalement la question de l’avenir de la CDBF.

Cette ordonnance avait vocation à moderniser, enfin, une juridiction et une procédure dont l’originalité était en contradiction avec le droit de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales. En effet, la CDBF est une juridiction administrative spécialisée, à l’instar de la Cour des comptes, mais qui agit comme une juridiction pénale bien qu’elle ne soit composée que de membres de la juridiction administrative.

Le présent texte a pour mérite de clarifier non seulement la procédure devant la CDBF, mais également le statut de ses membres. Je crains néanmoins que cette ratification n’arrive paradoxalement trop tôt.

En effet, si les ministres ne sont plus justiciables de la Cour de justice de la République, ils devraient l’être, en tant qu’ordonnateurs, devant la CDBF, comme les ordonnateurs locaux. Je crois en effet que notre tradition juridique penche de longue date pour confier à la juridiction administrative, ou du moins à une juridiction spécialisée, le soin de juger ces justiciables spécifiques que sont les ministres.

Au-delà, je rappelle que nous avions terminé la dernière session ordinaire par l’examen d’une proposition de loi que j’avais déposée avec plusieurs de mes collègues et qui visait à étendre le champ de compétence de la CDBF aux exécutifs locaux.

Ces deux propositions permettraient ainsi de faire de cette cour le juge répressif de droit commun des responsables politiques en matière de finances publiques.

Bien que cela puisse paraître un peu audacieux, ou un peu prématuré dans l’attente des expérimentations en cours prévues par la loi portant nouvelle organisation territoriale de la République, ou loi NOTRe, et la suppression de la CJR elle-même, je crois que, dans le cadre du « galop » législatif sur la confiance et la transparence de la vie publique, il est temps de se poser ces questions.

Il est d’autant plus temps de le faire que nous avons eu hier, lors de notre audition du Premier président de la Cour des comptes, Didier Migaud, la confirmation que le projet de loi de finances pour 2017 était, en réalité, dans ses hypothèses de base comme dans sa construction, totalement insincère.

Cette insincérité n’était pas accidentelle. Le budget pour 2017 a été préparé dans un but d’affichage politique. Il a été présenté sans que l’avis du Haut Conseil des finances publiques non plus que le rejet massif, franc et immédiat du Sénat ne soient pris en compte. Aussi, il ne serait pas déraisonnable, en l’espèce, que certains puissent aller présenter leurs explications devant une juridiction spécifiquement formée à cet effet.

En deçà de cet appel à un renforcement de fond des compétences répressives de nos juridictions financières, je note avec intérêt que le présent texte étend les outils du contrôle budgétaire réalisé par le Parlement en rapport avec la Cour des comptes. L’ordonnance harmonise les procédures d’enquêtes demandées à la Cour des comptes par le Parlement. Toutes les commissions parlementaires compétentes peuvent faire une demande d’enquête, les commissions des affaires sociales bénéficiant désormais des mêmes prérogatives que les commissions des finances et les commissions d’enquête. C’est une bonne disposition.

Concernant les dispositions statutaires relatives aux membres de la Cour des comptes, ce texte est plus un toilettage de l’existant qu’une véritable révolution. C’est bien dommage ! À quelques jours du début de l’examen des projets de loi relatifs à la confiance dans notre vie démocratique, il aurait été encourageant que soit demandé à la Cour des comptes de revoir les conditions d’avancement de ses membres en détachement, notamment en matière de droits à la retraite. Cela aurait été un signal bienvenu.

Comme le veut l’adage, « la femme de César doit être irréprochable », et la Cour des comptes, en tant que gardienne du sérieux et de la crédibilité du contrôle budgétaire public, se doit d’être, elle aussi, parfaitement irréprochable. Nul ne doute qu’elle le soit, mais en la matière, tout est toujours perfectible !

Au-delà de ces quelques remarques, mes chers collègues, je ne vois aucune objection à ce que nous ratifiions cette ordonnance. Voilà pourquoi les sénateurs du groupe Union Centriste voteront en faveur de ce texte.

Applaudissements sur les travées du groupe Union Centriste et du groupe Les Républicains.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Caffet

La parole est à Mme Michèle André, pour le groupe socialiste et républicain.

Debut de section - PermalienPhoto de Michèle André

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, l’ordonnance du 13 octobre 2016 a été prise par le précédent gouvernement sur le fondement de l’article 86 de la loi du 20 avril 2016 relative à la déontologie et aux droits et obligations des fonctionnaires.

L’objet de cette loi était de restaurer la confiance des citoyens dans la puissance publique en consolidant la culture déontologique dans la fonction publique : lutte contre les conflits d’intérêts, création de référents déontologues, nouvelles obligations déclaratives, encadrement des cumuls d’activité, ou encore contrôle du « pantouflage ».

Le II de l’article 86 de cette loi habilite le Gouvernement à légiférer par ordonnances pour modifier diverses dispositions relatives aux juridictions financières.

L’ordonnance du 13 octobre 2016 vise, d’une part, la modernisation du code des juridictions financières afin d’en supprimer les dispositions dont nous avons tous fait remarquer qu’elles étaient devenues obsolètes ou de les clarifier, et, d’autre part, l’adaptation de règles statutaires, notamment le régime disciplinaire, la garantie de l’indépendance, ou encore la qualité du recrutement par le tour extérieur.

Le projet de loi de ratification a été adopté par l’Assemblée nationale à l’unanimité. Il faut dire que lors de l’examen du projet de loi Fonction publique, le législateur avait choisi d’inscrire nombre de points dans le « dur » de la loi, de telle sorte que le champ de l’ordonnance s’en était trouvé limité.

L’ordonnance que le Sénat est invité à ratifier contient donc pour l’essentiel des dispositions légistiques ou techniques.

L’ordonnance compte cinquante-trois articles et a trois objectifs.

Le premier objectif est de moderniser les dispositions relatives aux missions et à l’organisation des juridictions financières.

L’ordonnance du 13 octobre 2016 simplifie le code des juridictions financières en proposant une architecture plus claire, en y repositionnant les dispositions pertinentes et en abrogeant celles devenues inutiles. Sur ce volet, elle procède principalement à une révision légistique du code, qui avait perdu de sa cohérence au fur et à mesure que lui avaient été ajoutées des dispositions législatives ponctuelles au cours des dernières années.

Par ailleurs, dans un objectif de clarification et de simplification, elle précise le champ d’application du contrôle opéré par la Cour des comptes, notamment les dispositions relatives au contrôle des entreprises publiques et de leurs filiales, qui dataient de 1976.

Le deuxième objectif est de réformer le statut des membres des juridictions financières.

À titre principal, l’ordonnance met à jour des dispositions relatives au statut des membres des juridictions financières, certaines règles statutaires étant devenues obsolètes depuis l’entrée en vigueur de la loi organique du 1er août 2001 relative aux lois de finances.

Elle précise par ailleurs le champ d’application des normes professionnelles fixées par le Premier président de la Cour des comptes auxquelles sont tenus de se conformer les magistrats, les conseillers maîtres et référendaires en service extraordinaire, les conseillers experts à la Cour des comptes, ainsi que les rapporteurs extérieurs de la Cour et des chambres régionales et territoriales des comptes.

Les règles d’incompatibilité et de récusation des membres de la Cour et des rapporteurs sont également précisées afin de se conformer à l’exigence d’impartialité.

Cette ordonnance a enfin pour objectif de clarifier les règles relatives à l’organisation et la procédure applicable à la Cour de discipline budgétaire et financière sans toucher à ses compétences, que ce soit sur le plan des infractions et sanctions ou sur celui des justiciables.

Il s’agit principalement de tenir compte des règles de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, de l’adaptation des pratiques et d’évolutions jurisprudentielles.

La rapporteur de la commission des lois a proposé cinq amendements visant soit à corriger des erreurs matérielles, soit à préciser des dispositions. Ces modifications permettent de conforter encore davantage cette ordonnance qui fait œuvre utile.

Nous voterons en conséquence le projet de loi de ratification.

Permettez-moi d’ajouter – j’aurais préféré que M. Delahaye soit encore présent dans l’hémicycle pour l’entendre – que, lorsque les commissions des finances et des affaires sociales du Sénat ont auditionné le Premier président de la Cour des comptes hier, ce dernier a évoqué non pas la non-sincérité du budget, cette appréciation relevant au reste du seul Conseil constitutionnel, mais des « éléments d’insincérité » dans le budget.

Je dois rappeler également que le Sénat n’a pas rejeté la loi de finances pour 2017, mais qu’il a choisi de ne pas l’examiner. C’est, certes, bien dommage, mais ce n’est pas tout à fait la même chose !

Mme Odette Herviaux applaudit.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Caffet

La parole est à M. Thani Mohamed Soilihi, pour le groupe La République en marche.

Debut de section - PermalienPhoto de Thani Mohamed Soilihi

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, nous examinons le projet de loi visant à ratifier l’ordonnance du 13 octobre 2016 modifiant la partie législative du code des juridictions financières qui découle de la loi sur la déontologie et les droits et obligations des fonctionnaires et qui autorisait le Gouvernement à prendre par ordonnances diverses mesures législatives en rapport avec le code des juridictions financières.

En effet, après avoir proposé dans son projet initial de prendre par voie législative de nombreuses dispositions, notamment en matière de déontologie et dans le domaine statutaire, le précédent gouvernement avait, par lettre rectificative, réintégré ces sujets dans le champ d’une future ordonnance.

Une série de réformes étaient à l’époque en cours de discussion et leurs conclusions devaient pouvoir être intégrées à l’issue du dialogue social interne aux institutions concernées.

L’ordonnance dont la ratification nous est proposée ce matin modernise donc les dispositions relatives aux missions et à l’organisation des juridictions financières dans quatre champs.

Le premier est l’adaptation des dispositions relatives à l’activité, au régime disciplinaire et à l’avancement des magistrats et personnels de la Cour des comptes, ainsi que des magistrats et rapporteurs des chambres régionales et territoriales des comptes afin d’améliorer la garantie de leur indépendance.

Le deuxième est la modification des règles statutaires relatives aux magistrats de la Cour des comptes et des chambres régionales et territoriales des comptes afin de diversifier leur recrutement et de déterminer les règles qui leur sont applicables en matière d’incompatibilité ou de suspension de fonctions.

Le troisième est la modernisation du code des juridictions financières.

Enfin, le quatrième est la limitation de la durée de certaines fonctions juridictionnelles ou administratives exercées par les magistrats de la Cour des comptes et des chambres régionales des comptes.

Harmonisation des procédures d’enquêtes lorsque la Cour est saisie par le Parlement, simplification de certaines procédures qui tombaient en désuétude, modifications des statuts des membres de la Cour ou des chambres régionales et territoriales des comptes, renforcement des droits des personnes contrôlées par la Cour de discipline budgétaire et financière, force est de constater que ce sont là autant de dispositions qui ne sont ni complexes, ni clivantes, ni contraires au champ d’habilitation donné au Gouvernement, qui a scrupuleusement respecté le périmètre arrêté par le Parlement.

Ces modifications permettent notamment de prendre pleinement en compte le rapprochement opéré entre la Cour et les chambres régionales et territoriales des comptes, qui se voient confier de nouvelles responsabilités, en particulier quant à l’évaluation des politiques publiques.

Enfin, et cela a été souligné en commission la semaine dernière, l’examen de ce projet de loi peut nous conduire à nous interroger sur l’existence même de la Cour de discipline budgétaire et financière, qui est une juridiction administrative, mais dotée de pouvoirs de sanction dans une matière presque pénale pour condamner les faits avérés de mauvaise gestion et de malhonnêteté.

La Cour de cassation semble estimer que de telles sanctions ne devraient pas être du ressort d’une juridiction administrative.

Cependant, tel qu’il est prévu par l’ordonnance, le renforcement des critères d’impartialité de la Cour de discipline de façon à s’aligner sur les critères de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales permet d’asseoir la crédibilité de la Cour. Les spécificités propres aux entreprises et services publics justifient pleinement l’existence de cette chambre.

C’est pour toutes ces raisons qu’une unanimité s’est dégagée lors de l’examen de ce texte en commission. Les ajouts apportés par celle-ci ont permis de préciser le contenu et de coordonner les dispositions relatives à l’outre-mer que le précédent gouvernement n’avait pas prises en compte et que l’Assemblée nationale avait ignorées en février dernier.

Je terminerai en soulignant l’unanimité du jour autour de la procédure de recours aux ordonnances, cette même procédure qui est pourtant fortement décriée en ce moment et dont certains contestent la pertinence ou remettent en cause le caractère démocratique. J’avoue que j’en ai fait partie…

Le projet de loi que nous examinons permet donc de relativiser les critiques dont je vous parlais à l’instant : tout en étant encadré par le Parlement, le recours aux ordonnances peut permettre à l’action gouvernementale une plus grande efficacité en alliant rapidité et souplesse.

Nous saluons donc toutes ces modifications qui étaient attendues et nécessaires. Elles tiennent compte d’évolutions jurisprudentielles et s’adaptent aux exigences de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales.

Ce projet de loi permet aussi de mettre en lumière le travail indispensable de la Cour des comptes, dont l’audit annuel a été dévoilé il y a une semaine, ainsi que le travail de la Cour de discipline budgétaire et financière et des différentes juridictions financières, et par là même de faciliter leur travail.

Cette suite attendue du travail accompli par le Parlement dans le cadre du texte relatif à la déontologie des fonctionnaires contribuera à améliorer l’image de l’administration et du monde politique.

Cependant, ces efforts doivent être amplifiés, et la crise de défiance que nous vivons aujourd’hui nous oblige à toujours plus d’exemplarité. Nous aurons l’occasion d’en reparler ici même dès la semaine prochaine lors de la discussion du projet de loi et du projet de loi organique rétablissant la confiance dans l’action publique.

Le groupe La République en marche votera donc ce texte dans la version issue des travaux de notre commission.

Mme la rapporteur et Mme Éliane Assassi, vice-présidente de la commission des lois, applaudissent.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Caffet

La parole est à M. Thierry Foucaud, pour le groupe communiste républicain et citoyen.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, devant la profusion du recours à la procédure des ordonnances durant le quinquennat précédent, l’article 38 ayant été sollicité pour promulguer plus de 500 textes durant la législature, nous allons, avec l’examen de cette ordonnance relative au code des juridictions financières, entamer un exercice de ratification de longue haleine puisque l’actualité législative est emplie d’une bonne quarantaine de projets de loi de même nature.

Le texte de l’ordonnance en lui-même ne constitue pas vraiment un objet de controverse.

L’adoption du projet de loi de ratification par l’Assemblée nationale s’est avérée d’une grande facilité et simplicité, et il a fallu le travail scrupuleux de notre commission des lois pour que, sans rien modifier à la philosophie générale du texte, le projet de loi compte enfin plus d’un article.

Les ajouts qui ont été apportés au texte initial nous rappellent d’ailleurs qu’en dernière instance c’est le législateur qui peut reprendre la main et apporter les derniers éléments nécessaires à la qualité de la loi.

Nous pouvons aussi exercer notre droit de rejeter l’habilitation ou de modifier les règles législatives que l’ordonnance a rendues applicables entre sa promulgation et sa ratification.

Cela étant posé, nous ne voterons pas ce projet de loi, pas plus que nous ne l’avions fait lors de son examen au terme de la commission mixte paritaire, ainsi que l’avait indiqué mon collègue Christian Favier.

Je vous propose néanmoins de dépasser quelque peu le cadre de ce projet de loi pour nous interroger sur le rôle même des juridictions financières, élément parmi d’autres du paysage institutionnel de notre pays. Et ce d’autant que la Cour des comptes, en charge de l’examen des comptes publics et de la certification de ceux de l’État, entre autres fonctions, vient de se manifester par la production d’un audit dans son rapport intitulé Le budget de l’État en 2016 dont le moins que l’on puisse dire est qu’il a déjà fait couler beaucoup d’encre.

Dans un premier temps, la Cour souligne que malgré la fixation d’un déficit budgétaire relativement contenu à 69, 1 milliards d’euros, la trajectoire de réduction des déficits que la France semble avoir suivie ne correspond ni aux attentes de la Commission européenne ni aux engagements que nous avions pris.

En foi de quoi la Cour des comptes propose-t-elle un certain nombre de recommandations allant du gel du point d’indice des traitements et du non-remplacement des départs en retraite à la maîtrise des emplois occupés par les titulaires et contractuels au sein des opérateurs de l’État, en passant par un énième coup de rabot sur les dotations aux collectivités locales ou les taxes affectées au fonctionnement et à l’action de certains organismes publics et parapublics.

Je dois dire qu’une telle orientation me surprend d’autant plus que la Cour, dans le même document, souligne la faible progression des recettes fiscales sur la dernière période.

Ainsi trouve-t-on, page 25, l’intertitre suivant : « Des recettes à un niveau proche de la LFI malgré des recettes fiscales sensiblement inférieures ».

De même, page suivante, le rapport d’audit souligne le caractère limité de la progression des recettes fiscales, pointant notamment la chute de près de 3 milliards d’euros du produit de l’impôt sur les sociétés.

Une chute largement imputable à la suppression de la contribution exceptionnelle en principe acquittée par les plus grandes entreprises, dispositif supprimé alors même que sa raison d’être, participer au redressement des comptes publics, ne me semble nullement avoir disparu.

Le rapport d’audit met en exergue le déficit primaire du budget de l’État, à savoir une somme de 27, 6 milliards d’euros, représentant la différence entre le service de la dette, c’est-à-dire les intérêts versés, et le déficit budgétaire constaté in fine.

Comment ne pas rapprocher cette somme des 24, 5 milliards d’euros que le même budget aura consacrés en 2016 pour financer le crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi, le CICE, et le pacte de responsabilité et de solidarité passé entre l’État et les entreprises ?

Ajoutons-y un crédit d’impôt recherche distribué sans contrôle ni examen, et voilà réunies quelques-unes des conditions qui nous amènent au piteux résultat annoncé.

Certes, la Cour souligne aussi, au fil du rapport, la nécessité de procéder à l’évaluation critique des dépenses fiscales tous les trois ans. On peut d’ailleurs se demander pourquoi ce n’est pas le cas ni pour le coûteux CICE ni pour recentrer ou interroger la pertinence des « niches fiscales » qui minent depuis le quinquennat de M. Sarkozy le produit de l’imposition des patrimoines.

Signe des temps : la bonne tenue des rentrées de l’impôt de solidarité sur la fortune et le produit élevé des droits de mutation montrent la vigueur de la progression des patrimoines les plus importants, dont la base d’imposition au titre de l’ISF dépasse désormais allègrement les 1 000 milliards d’euros.

Nous nous devions d’envoyer ce message à tous les contempteurs de la dépense publique et à ceux qui prétendent que les « rapports de classe » sont une vieille lune idéologique. De la même manière, nous sommes attentifs à la mobilisation des fonds publics dans l’action quotidienne de l’État, qui peut effectivement être améliorée.

Que voulez-vous ? Quand nous devons assurer un minimum de revenus et parfois d’activité à ceux qui sont placés hors jeu du monde du travail, force est de s’interroger plus encore sur les dépenses destinées au CICE ou aux allégements de cotisations sociales au niveau du SMIC.

De notre point de vue, ni la Cour ni les chambres régionales et territoriales des comptes ne doivent outrepasser leurs fonctions, essentielles, de contrôle de l’allocation des ressources publiques.

Elles n’ont pas à s’immiscer dans le débat politique sur les choix fondamentaux menés au niveau du pays ou d’une collectivité territoriale, choix qui doivent rester de la pleine compétence de celles et de ceux qui ont reçu pour cela l’onction du suffrage universel et se doivent de respecter les règles de bonne gestion fixées par la loi. Il nous semble qu’il importait de le rappeler.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Caffet

La parole est à M. Pierre-Yves Collombat, pour le groupe du Rassemblement démocratique social et européen.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre-Yves Collombat

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, le résultat de l’habilitation accordée au Gouvernement par la loi du 20 avril 2016 relative à la déontologie et aux droits et obligations des fonctionnaires n’appelle pas de longs développements de ma part, d’autant moins qu’étant le dernier orateur je risque de vous assoupir complètement !

Je me bornerai donc à quelques observations.

D’abord, le délai d’adoption de l’ordonnance, de six mois, et le délai de dépôt du projet de loi de ratification, de trois mois, ont été respectés.

Ensuite, les clarifications du code des juridictions financières qui ont été introduites, complétant les dispositions de la loi du 20 avril 2016, par exemple le remplacement de la liste d’entreprises publiques, devenue obsolète, par des critères d’appartenance à la sphère publique, sont les bienvenues.

Est également bienvenue la pleine reconnaissance des fonctions d’évaluation des politiques publiques et de certification de la Cour des comptes et des chambres régionales et territoriales des comptes.

Sont enfin bienvenus les compléments apportés par notre rapporteur en commission, notamment l’inscription dans la loi de la liste des formations des juridictions financières exerçant des fonctions juridictionnelles et l’élargissement du champ des possibilités d’audition par des personnes ayant fait l’objet d’observations.

On regrettera cependant l’absence de débat lors de l’habilitation, celle-ci ayant été introduite dans l’un des derniers articles de la loi relative à la déontologie et aux droits et obligations des fonctionnaires, de même que l’absence de reprise par le texte des dispositions de la loi d’habilitation concernant la diversification du recrutement des magistrats financiers et la limitation de la durée de certaines fonctions.

On regrettera enfin, à l’inverse, le dépassement du périmètre de l’habilitation en ce qui concerne la réforme du fonctionnement et des compétences de la Cour de discipline budgétaire et financière, dépassement souligné par notre rapporteur.

Au final, il s’agit de modifications de forme et de détail plus que de modifications substantielles et de fond. J’en déduis que d’autres textes seront nécessaires si le Gouvernement entend mener à bien la réforme mise en chantier depuis plusieurs années. Je vous renvoie sur ce point au projet de loi portant réforme des juridictions financières du 28 octobre 2009 et à la loi du 13 décembre 2011 relative à la répartition des contentieux. Est notamment concernée la Cour de discipline budgétaire et financière, qui appelle manifestement une réforme approfondie.

Vous aurez compris que le RDSE n’a aucune raison de ne pas voter le texte qui nous est ici proposé.

Applaudissements sur les travées du RDSE. – Mme la rapporteur et Mme Éliane Assassi, vice-présidente de la commission des lois, applaudissent également.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Caffet

La discussion générale est close.

Nous passons à la discussion du texte de la commission.

(Non modifié)

L’ordonnance n° 2016-1360 du 13 octobre 2016 modifiant la partie législative du code des juridictions financières est ratifiée.

L'article 1 er est adopté.

Le code des juridictions financières est ainsi modifié :

1° Au premier alinéa de l’article L. 142-1-2, la référence : « au I » est remplacée par la référence : « à l’article L. 142-1 » ;

2° À la troisième phrase du premier alinéa de l’article L. 220-12, les références : « quatrième alinéa de l’article L. 122-2 et au troisième alinéa » sont remplacées par les références : « premier alinéa du II de l’article L. 122-3 et au premier alinéa du III » ;

3° Au premier alinéa de l’article L. 243-4, le mot : « est » est supprimé. –

Adopté.

Le code des juridictions financières est ainsi modifié :

1° Après le premier alinéa de l’article L. 142-1-2, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Les décisions en matière juridictionnelle sont rendues par la Cour des comptes réunie soit par chambre ou section de chambre, soit toutes chambres réunies statuant en formation plénière ou en formation restreinte. » ;

2° Après le premier alinéa de l’article L. 242-4, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Les décisions en matière juridictionnelle sont rendues par la chambre régionale des comptes réunie soit en formation plénière, soit en formation restreinte, soit en section, soit en sections réunies. » ;

3° Après le premier alinéa de l’article L. 262-57, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Les décisions en matière juridictionnelle sont rendues par la chambre territoriale des comptes réunie soit en formation plénière, soit en formation restreinte, soit en section, soit en sections réunies. » ;

4° Après le premier alinéa de l’article L. 272-55, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Les décisions en matière juridictionnelle sont rendues par la chambre territoriale des comptes réunie soit en formation plénière, soit en formation restreinte, soit en section, soit en sections réunies. » –

Adopté.

À la première phrase des articles L. 262-25 et L. 272-28 du code des juridictions financières, la référence : « n° 2016-483 du 20 avril 2016 relative à la déontologie et aux droits et obligations des fonctionnaires » est remplacée par la référence : « n° … du … ratifiant l’ordonnance n° 2016-1360 du 13 octobre 2016 modifiant la partie législative du code des juridictions financières ». –

Adopté.

Au début de l’article L. 143-0-2 du code des juridictions financières, sont ajoutés les mots : « Les observations qui font l’objet d’une communication au Parlement ainsi que ». –

Adopté.

Au premier alinéa du II de l’article 6 de l’ordonnance n° 58-1100 du 17 novembre 1958 relative au fonctionnement des assemblées parlementaires, les références : « L. 143-5 et L. 132-4 » sont remplacées par les références : « L. 132-5 et L. 143-4 ». –

Adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Caffet

Personne ne demande la parole ?…

Je mets aux voix, dans le texte de la commission, l'ensemble du projet de loi ratifiant l’ordonnance n° 2016–1360 du 13 octobre 2016 modifiant la partie législative du code des juridictions financières.

Le projet de loi est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Caffet

Mes chers collègues, je rappelle au Sénat que le groupe du Rassemblement démocratique et social européen a présenté la candidature de M. Jean-Claude Requier pour remplacer, en qualité de secrétaire du Sénat, notre regretté collègue François Fortassin.

Le délai prévu par l’article 3 du règlement est expiré.

La présidence n’a reçu aucune opposition.

En conséquence, je déclare cette candidature ratifiée et je proclame M. Jean-Claude Requier secrétaire du Sénat.

Applaudissements.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Caffet

Toutes mes félicitations, cher Jean-Claude Requier !

Mes chers collègues, l'ordre du jour de ce matin étant épuisé, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à quinze heures.

La séance est suspendue.

La séance, suspendue à dix heures vingt, est reprise à quinze heures, sous la présidence de M. Gérard Larcher.