L’article 4 du projet de loi étend aux autorités administratives la possibilité d’ordonner des visites de tout lieu au sein duquel il existe des raisons sérieuses de penser qu’il est fréquenté par une personne répondant aux mêmes critères – trop peu restrictifs – que ceux de l’article 3, toujours aux seules fins de prévenir des actes de terrorisme.
Nombreux sont, ici encore, les droits fondamentaux susceptibles d’être mis à mal par cette mesure : droit de propriété, inviolabilité du domicile, droit au respect de la vie privée et familiale… Ici encore, les garanties apportées sont insuffisantes et le contrôle juridictionnel limité.
Ce texte est vertigineux, mes chers collègues, et l’unanimisme qu’il recueille contre lui parmi les professionnels du droit et les institutions de défense des droits de l’homme semble impuissant à faire vaciller les certitudes qui animent le Gouvernement.
Permettez-moi de citer les mots très forts de Mireille Delmas-Marty, professeure émérite au Collège de France, dans sa lettre ouverte au Président de la République : « Il n’y a pas à choisir, monsieur le Président, la sécurité ou les libertés. Vous-même et votre gouvernement, sous le contrôle du nouveau Parlement, vous devez assurer l’une et l’autre, en acceptant qu’elles ne soient absolues ni l’une ni l’autre. Quand Paul Ricœur – de qui M. Macron se dit proche et dont il ne semble pas avoir lu l’œuvre ! – rappelait la finitude humaine, il ne disait rien d’autre. Ce n’est pas en introduisant dans le droit de notre pays, après les réformes sécuritaires accumulées depuis la loi de novembre 2001, les principales dispositions qui accompagnent l’état d’urgence que vous vaincrez les fureurs sacrées du terrorisme radical. »
Si ces mots ne peuvent vous convaincre, mes chers collègues, peut-être peuvent-ils a minima vous faire réfléchir, vous pousser à prendre le temps du débat et à ne pas adopter en quelques heures, à quelques jours des congés d’été, des dispositions d’une telle gravité.