Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, c'est un grand d'honneur d'être devant vous aujourd'hui, après la proposition du Président de la République de me nommer présidente-directrice générale de la RATP.
La RATP est aujourd'hui une référence mondiale dans le transport urbain. C'est une entreprise dynamique, rentable et innovante, dotée d'équipes de grande qualité : 60 000 hommes et femmes au service de 16 millions de voyageurs, qui empruntent quotidiennement son réseau en Île-de-France, en France et dans le monde. Son histoire est celle d'une entreprise responsable sur le plan environnemental, avec une très forte culture de service public et d'innovations techniques et sociales. La qualité, le dévouement et l'attachement aux valeurs du service public des équipes en font une entreprise à la fois attachante et performante.
La RATP entretient des relations étroites avec les collectivités locales et les autorités organisatrices, au premier rang desquelles Île-de-France mobilités. En tant que gestionnaires d'infrastructures et opérateurs de transport, elles jouent un rôle majeur dans le développement territorial et économique.
Enfin, l'entreprise est résolument engagée dans une politique de lutte contre les gaz à effet de serre et de réduction de son empreinte environnementale. Socialement et économiquement responsable, elle est un acteur incontournable de la ville durable.
La RATP est une entreprise au coeur du quotidien de nos concitoyens, avec une forte notoriété, qui devra affronter dans les années à venir de nombreux défis.
Le premier est celui de la mise en concurrence progressive du réseau en Île-de-France, qui transformera l'entreprise et, plus généralement, le paysage des transports franciliens.
Dans le contexte sécuritaire que nous connaissons, nous devons aussi relever le défi de la sécurité et de la sûreté des voyageurs, des salariés et des installations.
La qualité de service est également une préoccupation majeure, car le niveau d'exigence des voyageurs et des autorités organisatrices n'a jamais cessé de croître.
Autre défi, celui de la conception et de la construction de nouvelles infrastructures de transport, pour répondre aux besoins grandissants de mobilité et à la saturation de certaines lignes franciliennes.
La RATP devra également faire face au défi de la lutte contre les gaz à effet de serre, par le recours à des modes de transport sobres en énergie et peu polluants.
Enfin, elle devra relever le défi de l'innovation, et notamment celui des nouvelles mobilités et des opportunités offertes par la révolution digitale.
Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, les enjeux de la RATP sont particulièrement nombreux et importants. C'est avec une détermination sans faille, mais aussi beaucoup de modestie que je viens aujourd'hui solliciter votre confiance.
Permettez-moi d'évoquer mon parcours professionnel. J'ai été dirigeante d'entreprise, dans le secteur public comme dans le secteur privé. J'ai accumulé une expérience de dix ans dans les transports et de six ans dans le secteur des infrastructures et des télécommunications. Ces trois dernières années, j'ai été mandataire social de Rexel, société dont j'étais la directrice générale déléguée. Il s'agit d'un leader de la distribution professionnelle de matériel électrique, dont les produits et services sont destinés à réduire la consommation d'énergie et d'électricité. Il regroupe 27 000 salariés, est présent dans 32 pays, et a réalisé l'année dernière un chiffre d'affaires de 13,2 milliards d'euros.
Je suis juriste de formation. J'ai commencé ma carrière à la direction du Trésor, au ministère de l'économie et des finances, où je suis restée quatre ans. J'ai rapidement choisi de travailler dans une entreprise publique, Air France, que j'ai servie pendant dix ans, dans le cadre d'un parcours riche et complet et dans des domaines variés : projets de transformation, opérations, finances, ressources humaines.
J'ai travaillé non seulement aux affaires financières, mais également aux opérations aériennes, dont j'ai été le directeur délégué. Ce service englobe le personnel navigant technique, c'est-à-dire les 4 000 pilotes de la compagnie, ainsi que la direction technique et la direction des plannings des navigants. Je me suis également investie dans les ressources humaines : j'ai été déléguée générale ressources humaines et changements. C'est tout simplement le poste n° 2 de la direction générale des ressources humaines. À ce titre, j'ai été présidente du comité d'établissement des personnels navigants.
Il existe des enjeux communs à Air France et à la RATP. Ainsi la politique sociale est-elle un facteur clé de la productivité et de la compétitivité, ce qui passe par un dialogue social permanent, loyal et constructif. À cet égard, mon expérience de DRH et de présidente de comité d'établissement me sera indiscutablement utile.
La qualité des services aux voyageurs et la qualité des processus d'exploitation sont au coeur des modèles d'affaires, avec des enjeux similaires de qualité de l'offre de transport, de ponctualité, de régularité, d'information aux voyageurs, de sûreté et de sécurité.
Mon parcours professionnel m'a également permis d'avoir une bonne connaissance des modèles d'infrastructures, au travers de deux expériences distinctes, puisque j'ai été administratrice d'Aéroports de Paris et directrice financière de la société Eutelsat. Ce sont des métiers à forte intensité capitalistique, où la maîtrise des politiques d'investissement et des risques est déterminante. Or la RATP engage chaque année des programmes d'investissement très significatifs. Dans le contrat avec Île-de-France mobilités, il s'agit de 8,5 milliards d'euros, dont 4,2 milliards d'euros sur les fonds propres de l'entreprise.
J'ai également une expérience de développement à l'international. En effet, Eutelsat et Rexel se sont développés par acquisitions et voie organique. J'ai été pendant douze ans directrice financière de sociétés cotées, et j'ai donc acquis une solide expérience en matière de pilotage de la performance opérationnelle et financière de groupes internationaux.
J'ai aussi développé une expertise sur la transition énergétique, notamment chez Rexel, puisque notre but était de vendre des produits et services de plus en plus connectés, pour réduire la consommation d'énergie de nos clients.
Les raisons qui me poussent à présenter ma candidature sont extrêmement claires : je suis convaincue que la RATP peut devenir un leader mondial de la mobilité durable, si elle réussit sa transformation, en relevant le défi de l'ouverture à la concurrence. Son atout essentiel est la qualité des équipes, leur implication dans le projet d'entreprise et la richesse du savoir-faire technique. C'est une entreprise publique, attachée aux valeurs du service public, comme je le suis moi-même, résolument tournée vers l'avenir, et dont le modèle d'affaires est porté par des tendances de fond positives telles que l'urbanisation croissante de la population mondiale et l'augmentation de la demande de mobilité durable.
Si vous m'accordez votre confiance, c'est cette expérience que je souhaite mettre au service de la RATP, en mesurant le poids des responsabilités qui pourraient être les miennes à la tête de cette grande entreprise.
Avant de partager avec vous ma vision des grandes priorités de la RATP, je voudrais vous faire part de deux réflexions préliminaires.
C'est un fait, la RATP aura changé trois fois de PDG en deux ans. Il me paraît donc important d'avoir une approche pragmatique et efficiente et de m'inscrire dans la continuité des travaux lancés par mes prédécesseurs, notamment Élisabeth Borne, dont je tiens à saluer l'action.
Le contrat avec Île-de-France mobilités pour la période 2016-2020 a été signé et les grandes lignes de la feuille de route stratégique, nommée Défis 2025, qui ont été validées par le conseil d'administration en février dernier, me paraissent claires. Mon action se concentrera donc prioritairement sur l'exécution opérationnelle de ces priorités stratégiques, en veillant à la juste allocation des ressources humaines et financières nécessaires au succès de l'entreprise.
Par ailleurs, dans un contexte d'ouverture à la concurrence, la qualité des services offerts aux voyageurs doit être au coeur de la stratégie et des plans d'action de la RATP. Parce que la qualité des services devient en effet un avantage compétitif, je veillerai à une amplification des démarches de retours d'expérience clients et de comparaisons avec la concurrence.
Enfin, en termes de méthode, il me paraît indispensable que la RATP demeure à l'écoute de toutes les parties prenantes : voyageurs, autorités organisatrices, collectivités locales, associations d'usagers et, bien entendu, salariés et partenaires sociaux. Il s'agira pour moi de poursuivre un travail de dialogue, dans le respect de chacun et des valeurs du groupe, afin que l'entreprise s'adapte au nouveau paysage concurrentiel et trouve de nouvelles voies de développement.
J'articulerai ma vision de la RATP autour de quatre priorités stratégiques et de trois leviers majeurs de développement.
Tout d'abord, la RATP doit viser l'excellence opérationnelle au service des voyageurs, dans un contexte où le premier des devoirs est celui de la sécurité et de la sûreté. L'enjeu est de taille, face à l'ampleur des flux de voyageurs.
S'agissant de la sécurité ferroviaire et du risque d'incendie, l'expertise de la RATP fait autorité dans le monde des transports. Mais il ne faut jamais baisser la garde sur ces sujets, et je m'attacherai à ce que le niveau d'expertise soit préservé, voire amélioré.
La sécurité routière doit faire l'objet d'une même exigence. Car l'entreprise, en période de pointe, voit ses bus du réseau francilien parcourir une fois le tour de la Terre en une heure. En tant que gestionnaire d'infrastructures, la RATP a un haut niveau de suivi et de maintenance du réseau, grâce à des moyens très significatifs. L'enveloppe d'investissement pour la modernisation et l'entretien des infrastructures et des équipements a atteint cette année 743 millions d'euros.
La cybersécurité sera également au coeur de mes préoccupations. La RATP se doit d'avoir un haut niveau de vigilance en ce domaine, et l'actualité récente démontre que toutes les entreprises sont conduites à redoubler d'efforts pour la protection de leurs données.
En ce qui concerne l'enjeu de sûreté, la RATP devra continuer à faire face, avec le même professionnalisme, au niveau de menace particulièrement élevé que connaît notre pays, aux côtés de la préfecture de police de Paris. Elle dispose de son propre service de sécurité, le GPRS, Groupe de protection et de sécurisation des réseaux, qui compte aujourd'hui plus de 1 000 agents. Une centaine de recrutements sont prévus dans le contrat en cours avec Île-de-France mobilités. Depuis la loi du 22 mars 2016, ce personnel dispose de prérogatives amplifiées.
La sécurité et la sûreté sont la base du contrat de confiance passé avec nos concitoyens et les pouvoirs publics. Je m'attacherai donc à faire vivre et à amplifier la coordination avec l'ensemble des parties prenantes.
En outre, la RATP doit assurer un excellent niveau de services. Le contrat avec Île-de-France mobilités est exigeant, avec 141 indicateurs définissant un système de bonus-malus. En termes de régularité et de ponctualité, la satisfaction des voyageurs est mesurée annuellement. Le dernier état de cette mesure fait apparaître un taux de satisfaction supérieur à 81 % en 2016. Si les chiffres sont bons pour le métro, le tram et le bus, des améliorations sont attendues sur le RER A et B, dont la qualité de services reste perfectible, malgré les importants efforts d'investissement consentis ces dernières années. Une nouvelle enveloppe de 1 milliard d'euros est d'ailleurs prévue d'ici à 2020 pour le RER.
Je veillerai à ce que la mobilisation de l'entreprise sur les nombreux plans d'action en cours soit organisée de façon efficiente, afin d'améliorer de façon sensible et durable la qualité de service pour les voyageurs.
Quant à l'information aux voyageurs, elle doit être toujours plus claire, personnalisée, multimodale et multiopérateurs. Les voyageurs peuvent également compter, dans les gares et les stations, sur 6 000 agents, qui leur assurent, au quotidien, un service personnalisé.
S'agissant de l'accessibilité, la RATP a déployé des efforts très importants pour assurer sa mission de service public. Il en est de même pour la propreté, dont le budget représente désormais 80 millions d'euros par an.
Gérer la qualité de services, c'est aussi produire une offre supplémentaire de mobilité en Île-de-France. Ainsi 3,4 milliards d'euros seront-ils consacrés à l'augmentation des capacités de transport. En 2016, la RATP a consacré 1,7 milliard d'euros à l'amélioration des services en Île-de-France, dont 972 millions d'euros sur ses fonds propres, au travers de plus de 1 500 projets de taille variable, qui permettent aux voyageurs de disposer de transports plus confortables, plus accueillants, ainsi que d'espaces et de matériels roulants rénovés.
Au sein de cette enveloppe, la RATP a investi massivement dans l'augmentation des capacités de transport, à hauteur de 743 millions d'euros, en faveur du prolongement de quatre lignes de métro et de trois lignes de tramway, ainsi que l'achat de matériel roulant.
Elle doit aujourd'hui faire face au défi que représente l'exécution d'un nombre inédit de chantiers de construction, d'extension et de modernisation de son réseau, dans le contexte géologique complexe de la région parisienne. Ce sera pour moi un enjeu majeur.
Autre priorité stratégique, la réussite de l'ouverture à la concurrence. La réalité de la RATP est duale : elle est à la fois un opérateur de transport en situation de quasi-monopole sur son territoire historique et un groupe international, qui répond à de nombreux appels d'offres sur un marché fortement concurrentiel en France et à l'étranger.
C'est un groupe intégré, qui inclut une centaine de filiales proposant leurs services dans une trentaine de villes sur le territoire national et dans quinze pays du monde. Notre filiale RATP Dev opère sur quatre continents et Systra, copiloté par la SNCF, est leader de l'ingénierie en transport urbain. La concurrence est une réalité pour la RATP en Île-de-France depuis la loi du 8 décembre 2009, qui impose une mise en concurrence pour tout nouveau service de transport. Cela concernera prochainement les lignes de tramway T9 et T10, le réseau de bus OPTILE et, bien entendu, les lignes du Grand Paris Express.
La RATP devra progressivement affronter l'ouverture à la concurrence sur ses réseaux historiques : les bus seront concernés au 31 décembre 2024 ; les trams, au 31 décembre 2029 ; et le RER et le métro, le 31 décembre 2039.
Le passage d'une situation de quasi-monopole à une situation concurrentielle est un défi de taille, pour n'importe quelle entreprise confrontée à un tel changement de paradigme. Je suis convaincue que la RATP a de nombreux atouts pour réussir cette transformation, sans perdre son identité et ses valeurs. J'en citerai cinq, qui devront être approfondis sans relâche dans les mois et années à venir.
Premièrement, il s'agit du professionnalisme et de la motivation des 60 000 salariés travaillant aujourd'hui pour le groupe RATP. Deuxièmement, c'est sa capacité à fournir une excellente qualité de services, qu'il s'agisse de la régularité, de la ponctualité, de la sécurité, de la sûreté, de l'accessibilité, de la propreté ou de l'information aux voyageurs. Troisièmement, je pense à la recherche continue d'amélioration de la productivité et à la maîtrise des coûts de production, nécessaires pour assurer sa compétitivité. Quatrièmement, c'est la diffusion des savoir-faire au sein du groupe, en gagnant des appels d'offres en province et à l'étranger. Cinquièmement, c'est sa capacité d'innovation.
La RATP devra être en mesure de remporter les appels d'offres, dans le respect de la concurrence, en conjuguant son expertise francilienne et internationale. À ce titre, l'ouverture à la concurrence peut également être l'occasion de nouveaux partenariats permettant d'enrichir son offre de services.
Concrètement, cela conduit à deux actions majeures. Il convient de préparer les appels d'offres des projets de ligne T9 et T10, du réseau de bus OPTILE et du Grand Paris Express, en veillant, par la qualité de nos propositions en transports et en services, à maximiser nos chances de succès. La RATP est déjà, en vertu de la loi, responsable de la maintenance de la future infrastructure du Grand Paris Express et les appels d'offres sur ces lignes constituent un gisement de croissance important. Elle a déjà su convaincre les autorités organisatrices de son savoir-faire et de compétitivité. Toutefois, l'appel d'offres de la future ligne 15 est un enjeu majeur pour la RATP, qui est le leader du métro automatique de grande capacité. Je le rappelle, la ligne 1 et la ligne 14, qui constituera l'épine dorsale du Grand Paris Express, sont à ce titre exemplaires.
Parallèlement, nous devrons développer une offre de bus attractive et compétitive. L'ambition fixée par Pierre Mongin et Élisabeth Borne est claire : la mise à disposition, à l'échéance 2024, d'une flotte complète de bus zéro émission, dont 80 % rouleront à l'électricité et 20 % au biogaz. Il faudra surmonter des défis opérationnels et techniques tels que la transformation des centres de bus, ce qui placera la RATP dans une position favorable pour l'appel d'offres en Île-de-France et lui ouvrira également des perspectives de développement en France et à l'étranger.
Dans ce contexte, il est indispensable que la RATP dispose d'un cadre social harmonisé, afin d'éviter tout dumping social. Je le rappelle, l'entreprise emploie 15 000 conducteurs de bus, ainsi que 2 000 mainteneurs. Elle doit pouvoir faire jeu égal avec ses concurrents.
Autre priorité stratégique, faire de la RATP un leader de la mobilité durable et un acteur incontournable de la ville durable. La lutte contre le changement climatique est un combat à la fois local, national et international. La RATP place la protection de l'environnement au coeur de son action, en proposant des modes de transport plus propres, plus respectueux de l'environnement et de la santé des populations. Elle déploie dans la durée une politique environnementale cohérente et crédible. Elle vise une décarbonisation de ses modes de transport - le plan bus zéro émission est bien évidemment l'exemple le plus emblématique -, tout en s'efforçant de maîtriser les consommations et de réduire les nuisances, par des mesures concrètes de préservation de la qualité de l'air et de l'eau et de lutte contre le bruit. Elle s'est d'ailleurs fixé un objectif ambitieux : réduire ses émissions de gaz à effet de serre de 50 % par voyageur et kilomètre d'ici à 2025. Pour ce faire, elle a recours au principe d'écoconception, à des matériels roulants plus performants et à des bâtiments plus économes.
La RATP réussit donc à réduire son empreinte environnementale à une échelle ayant un réel impact sur les territoires.
Autre priorité, le développement international dans un cadre de croissance rentable. En 2016, la RATP était présente dans quinze pays, pour un chiffre d'affaires de 724 millions d'euros, soit 17 % du chiffre d'affaires du groupe.
Les grandes tendances que sont la constitution de grandes métropoles urbaines et le développement de villes intelligentes constituent un environnement bénéfique pour le développement international de la RATP. En effet, son savoir-faire est unique sur plusieurs vecteurs porteurs. Elle est leader dans le transport à haute densité, avec ses trois lignes de métro automatique ; elle est également leader dans l'exploitation des tramways, avec plus de 300 kilomètres de voies en France ; elle est un acteur incontournable dans le domaine du bus, avec une flotte internationale de 8 000 bus ; elle est leader dans l'ingénierie de l'infrastructure des transports publics, puisque Systra est à l'origine de 60 % de son chiffre d'affaires à l'international.
Je voudrais partager avec vous, mesdames, messieurs les sénateurs, quelques convictions. Tout d'abord, le développement à l'international est un moyen d'acquérir et de diffuser les savoir-faire au sein non seulement de la RATP, mais aussi de la filière industrielle française des transports urbains. Ensuite, la croissance à l'international doit être rentable et faire l'objet d'un suivi spécifique de ses résultats, séparément des contrats passés sur le territoire national. Enfin, concernant l'allocation des ressources en capital et en moyens humains entre les différentes priorités stratégiques de la RATP, nous devons faire preuve d'une certaine sélectivité dans le choix des appels d'offres. Une analyse des risques doit systématiquement être réalisée en amont, ainsi qu'un retour d'expérience en cas d'échec.
Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, je souhaite évoquer trois leviers de développement fondamentaux pour réaliser nos ambitions.
Premier levier, le dialogue social et une politique de ressources humaines innovante sont indispensables pour atteindre les ambitions fixées. La RATP est une entreprise où le dialogue social, profond, constant et organisé, constitue une priorité de premier plan. Comme les présidents précédents, je ferai mienne cette priorité si vous m'accordez votre confiance.
L'entreprise doit également poursuivre une politique de développement des ressources humaines innovante. C'est un employeur important, notamment en Île-de-France, avec 45 000 salariés et 25 000 emplois indirects au travers de la politique achats. L'entreprise recrutera cette année 3 100 personnes, ce qui témoigne de son dynamisme en matière de création d'emplois. Dans le cadre de l'ouverture à la concurrence, elle devra veiller activement à la protection de ses savoir-faire et à la rétention de ses talents.
Par ailleurs, la RATP s'est dotée, au fil du temps, d'une politique de responsabilité sociale des entreprises, qui constitue un véritable levier de sa performance. Il est rare qu'une entreprise ait une politique RSE aussi poussée et cohérente. Cela lui permet de contribuer à la vitalité économique et à la solidarité dans les territoires, en favorisant l'accès à l'emploi et en soutenant, avec sa fondation de nombreux projets d'insertion, d'éducation et de culture.
Pour finir, je porterai une attention particulière au plan Travailler ensemble, lancé par Élisabeth Borne en 2016 et élaboré avec les organisations syndicales. Il réaffirme les principes de laïcité, de non-discrimination et de neutralité, qui doivent impérativement être respectés dans une entreprise chargée de missions de service public. Je veillerai à ce que les managers de proximité, lesquels sont parfois confrontés à des situations difficiles, bénéficient d'une aide concrète.
Deuxième levier, une structure financière saine. La RATP doit veiller au maintien de ses grands équilibres financiers. Elle dispose d'un modèle économique vertueux et spécifique, puisque, contrairement aux délégations de service public classiques, elle est propriétaire et gestionnaire d'infrastructures. Elle participe donc au renouvellement des actifs de l'opérateur de transport en Île-de-France. Pour financer ses investissements, elle doit impérativement dégager des résultats significatifs et disposer d'une capacité d'autofinancement suffisante, les seuls amortissements ne permettant pas d'assurer la pérennité des actifs. Grâce à la contractualisation avec son autorité organisatrice, elle dispose d'une visibilité pluriannuelle et n'est pas dépendante des subventions d'investissement. Elle peut ainsi assurer la pérennité du réseau et adopter une politique continue d'investissements élevés, ce qui constitue un facteur de sécurité.
En 2016, les résultats du groupe RATP ont fait preuve de solidité dans un environnement peu porteur. Je pense notamment à la baisse de la fréquentation touristique et à l'inflation, quasi nulle. Deux éléments sont importants : l'impact du nouveau contrat conclu avec Île-de-France mobilités, qui a eu pour conséquence une baisse des contributions de 100 millions d'euros, et la normalisation fiscale de la RATP. Le chiffre d'affaires du groupe a diminué de 2 %, et le résultat opérationnel est en baisse de 216 millions d'euros. Fort heureusement, cela n'a pas eu d'incidence sur la capacité d'autofinancement. La RATP a ainsi pu poursuivre sa politique intensive d'investissement, avec 1,85 milliard d'euros investis, dont 1,784 milliard en Île-de-France. Quant à son endettement net, il s'est légèrement accru.
Troisième levier, sans doute l'un des plus importants, la politique d'innovation. Elle est nécessaire pour assurer les missions de service public auprès des voyageurs, et renforcer la compétitivité. Si la culture de la RATP en ce domaine est grande, elle doit s'ouvrir davantage vers l'extérieur pour gagner en agilité. La création d'un fonds d'investissement dédié aux start-up, RATP capital innovation, est un pas en ce sens. L'innovation, et notamment l'innovation digitale, doit se traduire concrètement dans de nouveaux services et de nouvelles formes de mobilité offertes aux voyageurs. Ainsi la RATP devra-t-elle chercher à intégrer de plus en plus d'autres mobilités, en proposant notamment des trajets porte-à-porte.
Par ailleurs, les données recueillies par la RATP sur les voyageurs constituent un actif incorporel précieux pour innover et créer de nouveaux services personnalisés. Dans un contexte d'ouverture à la concurrence, il conviendra de trouver un juste équilibre entre le devoir de libre accès aux données et celui de la protection du secret des affaires.
L'innovation est aussi un moyen pour faire gagner en efficacité les équipes et améliorer les performances opérationnelles. Le numérique est un facteur clé de l'efficience de notre exploitation. La RATP est donc en train de mettre en place un écosystème favorable à l'innovation. Je compte accélérer les actions en ce domaine, en interne et par la voie d'acquisition de savoir-faire et de technologies nouvelles.
En conclusion, je dirai que la RATP est une entreprise multidimensionnelle. Elle permet à des millions de voyageurs de bénéficier, chaque jour, d'une offre de mobilité durable, connectée et sûre. Elle est un puissant vecteur de développement des territoires qu'elle dessert. Elle est aussi une entreprise citoyenne, par son impact positif sur la politique de l'emploi et la réduction de son empreinte environnementale. Elle est engagée depuis plusieurs années dans une diversification de ses activités, qui doit la conduire à voir son chiffre d'affaires passer de 5,4 milliards d'euros à 7 milliards d'euros en 2020, dont 30 % seront engendrés par ses filiales.
La RATP est entrée dans une dynamique de transformation, pour se préparer à l'ouverture à la concurrence, qui s'amplifiera dans les mois et années à venir. Souvent appréhendée comme une menace, cette ouverture peut se transformer en opportunité de taille, si nous parvenons à mobiliser tous les atouts de l'entreprise.
Car le sens de l'histoire, c'est une urbanisation croissante. Ainsi, à l'horizon de 2050, 67 % de la population mondiale sera urbaine. La planète comptera une cinquantaine de mégacités, soit des villes de plus de 10 millions d'habitants, et la demande de mobilité urbaine sera multipliée par 2,6 entre 2010 et 2050. Le développement des villes intelligentes et de politiques environnementales plus respectueuses constitue un terrain propice au développement des activités de la RATP.
C'est donc un projet ambitieux que je vous propose. Il conjugue performance économique et performance sociale et environnementale et se fonde sur une vision partagée avec les salariés de l'avenir de l'entreprise. Grâce à leur professionnalisme et à la pertinence des politiques menées par les PDG précédents, que je tiens à saluer ici, la RATP dispose de tous les atouts pour devenir un leader mondial de la mobilité durable, répondre aux besoins de mobilité croissants des Franciliens, offrir un meilleur accès à l'emploi, aux services et à la culture et conforter l'attractivité de la région capitale, qui accueillera les grands évènements que seront les Jeux olympiques et paralympiques en 2024 et l'exposition universelle en 2025.
Si vous approuvez la proposition de nomination du Président de la République, c'est avec modestie et détermination que je m'efforcerai de mobiliser tous les atouts de cette entreprise, en particulier le professionnalisme des 60 000 hommes et femmes qui la composent, pour relever les défis et montrer qu'une entreprise publique innovante et performante peut trouver sa juste place dans le secteur concurrentiel, tout en restant fidèle aux valeurs du service public et du dialogue social.