Intervention de Annie David

Réunion du 26 juillet 2017 à 21h30
Renforcement du dialogue social — Article 3, amendement 134

Photo de Annie DavidAnnie David :

Je partage la philosophie qui vient d’être exprimée. Nous nous opposons nous aussi au plafonnement des dommages et intérêts pour licenciement illégal – je vous rappelle en effet qu’il s’agit en l’espèce des licenciements abusifs, soit à peu près 80 % des affaires traitées par les conseils de prud’hommes.

En vérité, par cet alinéa 4, madame la ministre, vous voulez reconnaître un permis de licencier abusivement, l’employeur connaissant à l’avance le coût du licenciement.

À l’inverse, si vous voulez rénover les conseils de prud’hommes, bien d’autres propositions sont à explorer : par exemple, le rétablissement de l’élection des conseillers prud’homaux au suffrage universel, la garantie du principe d’oralité de la procédure devant ces juridictions, la gratuité, la simplicité et la proximité de cette justice, à tous les niveaux – je vous rappelle, mes chers collègues, que plus de soixante-dix tribunaux de prud’hommes ont été supprimés. Pour rendre plus efficaces ces tribunaux, le retour des délais de prescription serait également envisageable.

Car enfin, dans votre projet d’ordonnance, madame la ministre, aucune précision n’est donnée ! Le présent alinéa 4 dispose qu’un référentiel obligatoire sera mis en place, mais sans aucune mesure ou échelle du plafonnement envisagé.

En réalité, comme je le disais, vous permettez à l’employeur de licencier abusivement alors que vous condamnez le salarié ou la salariée à la règle de l’arbitraire. Comment un salarié réclamerait-il le paiement de ses heures supplémentaires ou remettrait-il en cause une directive susceptible de porter atteinte à sa santé ou même au bon fonctionnement de l’entreprise si, du jour au lendemain, il peut être mis à la porte sans cause réelle et sérieuse, sans pouvoir se défendre et sans avoir la possibilité de voir reconnu son droit à l’indemnisation à hauteur du préjudice subi ?

Comme je vous le disais en présentant l’amendement n° 134 rectifié, c’est seulement après coup que l’on repère les licenciements boursiers : c’est après coup que l’on constate que les actions de l’entreprise grimpent et que la direction fait au passage de gros bénéfices !

Enfin, je partage la position que vient d’exprimer Jean-Louis Tourenne : le plafonnement proposé revient à méconnaître le rôle du juge, lequel, en fonction de la singularité de chaque situation, est à même de juger de la gravité du préjudice subi par le salarié, chacun étant, face à un licenciement abusif, un individu particulier.

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