Intervention de Jean Desessard

Réunion du 26 juillet 2017 à 21h30
Renforcement du dialogue social — Article 3

Photo de Jean DesessardJean Desessard :

Madame la ministre, vous avez défendu cet alinéa 4 en expliquant que lorsque les petites entreprises licencient, les employeurs, de bonne foi, commettent des erreurs et sont condamnés. Vous avez dit qu’il y avait, en la matière, des exemples à foison, et que les conseils de prud’hommes n’avaient pas le temps de les traiter.

Je ne partage pas cette analyse. On pourrait d’ailleurs penser, à l’ère du numérique, à l’heure où nous sommes censés rendre le code du travail lisible, que l’administration puisse aider celles et ceux qui ont des problèmes d’ordre administratif pour remplir correctement les dossiers. Ce n’est pas la méthode que vous avez choisie, madame la ministre. Il vaut mieux tout changer, avez-vous dit !

Mais qui craint que les entreprises embauchent peu à cause des contentieux prud’homaux et des frais qu’ils peuvent entraîner ? C’est le MEDEF ! L’organisation patronale affirme continuellement que les entreprises embaucheraient davantage si ce type de contentieux était sécurisé. On a l’impression que tous les chefs d’entreprise tiennent le raisonnement suivant : « oh là là, je ne peux pas embaucher ; rendez-vous compte : les papiers ! ». Vous comprenez : même remplir un bulletin de salaire, c’est difficile !

Sur ces questions administratives, on est donc en plein délire. Afin de répondre à cette demande répétée, le Gouvernement introduit dans le présent projet de loi le plafonnement des indemnités dues en cas de licenciement sans cause réelle et sérieuse. Sorti par la porte lors de l’examen de la loi El Khomri – il était devenu indicatif à l’issue du processus législatif et politique –, le plafonnement des indemnités prud’homales revient aujourd’hui par la fenêtre.

On constate la détermination du Président de la République sur ce sujet : les premières dispositions en la matière avaient été instaurées par la loi Macron, comme l’a dit Mme Bricq, et celui qui était alors ministre de l’économie n’était pas étranger à la première mouture de la loi El Khomri. Désormais grand décisionnaire, le Président de la République est en mesure d’accéder à cette revendication du MEDEF.

Cette solution nous paraît insatisfaisante à un double point de vue. D’une part, elle s’oppose au principe de la réparation intégrale du préjudice – cela a été dit par M. Tourenne. Selon ce principe du droit privé, tout le dommage causé, mais rien que le dommage causé, doit être réparé. Par définition, il y a contradiction avec l’idée d’un plafonnement des indemnités.

D’autre part, madame la ministre, nous devons faire confiance aux juges prud’homaux, d’autant plus qu’ils représentent à la fois les employeurs et les salariés !

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