Intervention de Esther Benbassa

Réunion du 18 juillet 2017 à 14h20
Sécurité intérieure et lutte contre le terrorisme — Article 2

Photo de Esther BenbassaEsther Benbassa :

L’article 2 permet au préfet de police à Paris ou au représentant de l’État dans le département, aux seules fins de prévenir des actes de terrorisme, d’ordonner « la fermeture d’un lieu de culte dans lequel les propos qui sont tenus, les idées ou théories qui sont diffusées ou les activités qui se déroulent, provoquent à la violence, provoquent à la commission d’actes de terrorisme ou font l’apologie de tels actes ».

Disons-le clairement : nous sommes ici en présence d’un article se fondant sur l’arbitraire le plus complet ! Comment définir clairement les « idées » ou « théories » qui pourraient entraîner une fermeture ? Ce motif imprécis ouvre en réalité un véritable boulevard aux fermetures abusives de lieux de culte. Bien sûr, cela ne signifie pas qu’il ne conviendra pas de fermer des mosquées quand la radicalité de son imam est attestée.

Le droit de tout individu à exercer paisiblement son culte – ce que, bien sûr, personne dans cet hémicycle n’oserait remettre en question ! – se trouvera profondément bafoué par cette disposition. Que penser d’un pays où la pratique du culte est entravée au moindre soupçon ?

Le commissaire européen aux droits de l’homme ne s’y est pas trompé, lui qui s’est récemment inquiété de la portée de cet article, susceptible de limiter considérablement la liberté de culte garantie par l’article 9 de la Convention européenne des droits de l’homme.

Enfin, comment ne pas reconnaître le caractère punitif et stigmatisant d’une telle mesure pour les communautés religieuses entières concernées ? Soyons réalistes, cette disposition vise particulièrement les musulmans et l’arbitraire des fermetures ne fera que raviver un sentiment de stigmatisation et de discrimination §déjà bien installé – et à juste titre ! – au sein de cette communauté.

Cette disposition, plus étendue que celle qui est contenue dans la loi sur l’état d’urgence, est insuffisamment encadrée et menace lourdement la liberté de culte. Nous en proposons donc la suppression.

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