La reconnaissance de la qualité de travailleur handicapé, la déclaration d’inaptitude professionnelle sont actuellement une double peine pour le salarié : d’une part, celui-ci subit les conséquences de son inaptitude dans sa vie quotidienne, en dehors du travail ; d’autre part, dans la très grande majorité des cas, l’avis d’inaptitude est suivi, à plus ou moins brève échéance, par un licenciement.
Dans son rapport du mois de novembre 2014 relatif aux liens entre handicap et pauvreté, l’Inspection générale des affaires sociales, l’IGAS, particulièrement François Chérèque, dont je tiens en cet instant à saluer la mémoire et l’engagement, dresse un constat plus qu’alarmant sur les conséquences de l’inaptitude professionnelle.
Ce rapport fait écho aux résultats d’enquêtes régionales et à des données nationales sur le sujet : ainsi, dans une région, 97, 5 % des salariés déclarés inaptes ont été licenciés ; 94 % dans une autre. Dans ce deuxième cas, un an après leur licenciement, 27 % sont inactifs et 43 % sont toujours au chômage ; seules 18 % des personnes occupent un emploi. Par ailleurs, seule une petite moitié des personnes licenciées est inscrite à Pôle emploi.
Comme on peut s’y attendre, dans les avis d’inaptitude rendus, les études relèvent également une surreprésentation des salariés peu ou pas qualifiés – 80 % sont titulaires d’un diplôme infrabac –, ainsi que des plus âgés. Or il s’agit de deux populations qui parviennent plus difficilement à reconstruire un parcours de formation dans un autre secteur d’activité.
Il est impératif que nous sortions de ce paradigme de l’inaptitude, selon lequel les personnes sont jugées et stigmatisées pour ce qu’elles ne sont plus en mesure de faire, alors que nous devrions valoriser ce qu’elles sont aptes à réaliser, avec leurs capacités restantes, à développer ou acquérir.
Avec cet amendement, nous proposons une nouvelle rédaction de l’alinéa 7 qui va dans cette direction, puisque nous souhaitons autoriser chaque branche professionnelle à définir en son sein les aptitudes recherchées suffisantes pour occuper un poste, et ainsi valoriser les aptitudes de travailleurs handicapés, ce qui devrait leur permettre de conserver ou de retrouver par conversion un emploi dans leur secteur d’activité. Cette disposition a également pour objet de clarifier les obligations de reclassement de l’employeur, et de contribuer à la sécurisation du parcours des salariés.
La situation actuelle est inacceptable, et il est urgent d’agir pour améliorer le système d’aptitude-inaptitude professionnelle, actuellement responsable d’un immense gâchis humain. Votons cet amendement, et je suis convaincue que le Gouvernement et les partenaires sociaux prendront leurs responsabilités pour que les dispositions en résultant soient utiles à l’ensemble de notre société.