Intervention de Jean-Marc Gabouty

Réunion du 27 juillet 2017 à 9h30
Renforcement du dialogue social — Article 3

Photo de Jean-Marc GaboutyJean-Marc Gabouty :

Le périmètre d’appréciation des difficultés économiques d’un groupe fait l’objet d’un débat récurrent. Le choix du périmètre mondial est sans doute intellectuellement plus satisfaisant et plus juste – je le reconnais volontiers –, mais il n’est pas très opérationnel.

Toutes les grandes entreprises qui opèrent à l’échelon mondial peuvent déplacer partiellement la création de valeur ajoutée, de manière plus ou moins justifiée, en fonction de la fiscalité locale. Il ne faut pas se voiler la face : c’est une réalité, c’est une possibilité. Certaines le font légalement et dans des proportions acceptables, d’autres le font de manière éhontée. Mais ce n’est qu’une dimension d’un phénomène qui est absolument incontrôlable.

Cette pratique est aussi celle d’entreprises françaises, y compris de certaines dans lesquelles l’État a des participations financières. Je ne citerai pas d’exemple, mais il est indéniable que certaines entreprises à capitaux d’État, d’anciennes entreprises nationales, pratiquent ainsi pour certaines de leurs activités, notamment en matière de gestion de flottes de véhicules ou d’avions ; ces flottes appartiennent en général à une filiale ayant son siège à l’étranger.

Pour ma part, je considère que ce n’est pas en rigidifiant nos protections que nous empêcherons le départ de certaines entreprises de notre territoire : celles qui voudront partir, de toute façon, fermeront. §Il y aura de longs contentieux et cela ne servira à rien d’établir une protection artificielle. Nous serons au contraire moins attractifs pour attirer les investissements étrangers en France, ce qui affectera à mon avis la création d’emplois. En effet, outre d’autres critères qui ont été cités par Mme Lienemann, le régime fiscal et la flexibilité demeurent malgré tout un élément de localisation des investissements étrangers dans notre pays. Bien sûr, nous souhaitons que le périmètre européen soit à l’avenir le périmètre pertinent, mais cela suppose au préalable un petit peu plus d’harmonisation sociale et fiscale.

Mes chers collègues, je veux prendre un exemple. Supposons que, demain, Uber perde le contentieux qui l’oppose à l’URSSAF et que ses chauffeurs soient requalifiés en salariés. Si le périmètre international était retenu dans la loi, on serait amené à constater, au cas où Uber voudrait procéder à des licenciements, que cette entreprise est en très grande difficulté. En effet, à l’échelle mondiale, c’est le groupe le plus endetté, et ses résultats d’exploitation sont absolument catastrophiques. Or son modèle est complètement différent ailleurs dans le monde. Pourtant, cette analyse lui permettrait de licencier. C’est pourquoi il faut se montrer très attentif dans notre économie, qui n’est pas quelque chose de figé.

En conclusion, nous suivrons l’avis de la commission tout en reconnaissant la bonne foi du Gouvernement dans la manière dont il présente les choses.

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