Intervention de Yves Daudigny

Réunion du 27 juillet 2017 à 14h30
Renforcement du dialogue social — Article 5

Photo de Yves DaudignyYves Daudigny :

Notre collègue Nicole Bonnefoy, qui, à son grand regret, ne pouvait être présente parmi nous cet après-midi, aurait souhaité s’exprimer dans les termes suivants :

« L’article 5 prévoit de modifier les règles de prise en compte de la pénibilité au travail dans le sens d’un allégement des obligations de déclaration des expositions à certains facteurs de pénibilité et de compensation, en redéfinissant les conditions d’appréciation de l’exposition.

« Je souhaite m’arrêter sur la question de l’exposition aux risques chimiques, dont la déclaration et la mesure dans le compte pénibilité furent un progrès important du dernier quinquennat.

« Cette avancée devait notamment contribuer à la prévention de ces maladies contractées au travail, qui, nous devons le rappeler, tuent encore régulièrement et ne font que rarement et dans une faible mesure l’objet de reconnaissance en tant que maladies professionnelles.

« Le Premier ministre a indiqué aux organisations syndicales le sens de la réforme voulue : les travailleurs soumis acquerront des “droits à départ anticipé à la retraite” s’ils développent une “maladie professionnelle” ayant été “reconnue” et entraînant un taux d’incapacité permanente supérieur à 10 %.

« Nous allons sortir d’une démarche de prévention pour passer à une logique de réparation. Avec le dispositif ainsi remanié, il ne s’agit pas de réduire l’exposition des travailleurs aux facteurs de pénibilité ; il importe qu’ils soient en mauvaise santé pour pouvoir bénéficier du dispositif…

« S’agissant des cancers professionnels, et plus généralement des “risques invisibles”, dont la matérialité n’est établie que lorsque s’en manifestent les effets, le problème essentiel réside dans le temps de latence entre l’exposition et l’apparition de la pathologie, laquelle survient souvent après la retraite : le dispositif risque donc d’être peu opérant et extrêmement injuste.

« Il risque en outre d’entretenir la faible connaissance des effets sanitaires et environnementaux de l’extrême contamination chimique dans l’activité au travail, laquelle contribue essentiellement à l’insuffisante protection des travailleurs et citoyens contre les risques chimiques.

« Le suivi lacunaire de l’exposition rend régulièrement impossible la détermination des causalités et des responsabilités dans l’empoisonnement. La très récente demande de non-lieu formulée par le parquet dans le volet pénal du dossier de l’amiante, en raison de la présumée impossibilité de dater le début de l’intoxication des victimes, en est un témoignage éloquent.

« Plus fondamentalement, le problème posé est celui de l’inscription dans notre droit de la légitimation de l’exposition en pleine connaissance de cause des travailleurs à des risques connus.

« Plutôt que de poursuivre l’objectif de faire cesser le scandale de l’empoisonnement, parfois mortel, des travailleurs exposés à des agents chimiques sur leur lieu de travail, le Gouvernement privilégie la logique d’une indemnisation censée compenser ce qui ne peut l’être : les atteintes irréversibles à la santé des travailleurs. »

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