Cet amendement de suppression vise à remédier à une incohérence du Gouvernement. En effet, dans son discours de politique générale, le Premier ministre avait fait de la prévention une dimension phare du futur plan santé, or il nous est proposé ici d’en supprimer le principal outil.
Un récent rapport soulignait que les inégalités de santé se formaient principalement dans le monde professionnel. Plus précisément, ces inégalités sont principalement déterminées par « des expositions aux agents cancérogènes, mutagènes et reprotoxiques, des expositions à des facteurs de pénibilité – contraintes physiques marquées, environnement agressif, rythmes de travail contraints – et expositions à des facteurs de risque psychosociaux ».
Selon ce même rapport, en 2010, plus de 8 millions de salariés français, soit près de 40 % du total, étaient exposés à au moins un facteur de pénibilité, et 12 % à au moins un agent cancérogène.
Comme certains de mes collègues l’ont déjà dit, cet article marque le passage d’un système de prévention à un système de réparation. Cela pose notamment la question des effets qui se manifesteront après le départ à la retraite et qui, de ce fait, ne seront plus pris en compte. On ne peut pas ne pas évoquer l’exemple de l’amiante, qui illustre l’impossible réparation de maladies professionnelles qui se déclarent après le départ à la retraite.
Certes, vous avez raison de dire que, en principe, les entreprises ont un intérêt au moins économique à miser sur la prévention et à prendre soin des salariés. Le problème, c’est que cette logique, ou ce bon sens, n’est pas partagée par tous les chefs d’entreprise. Certains sont court-termistes et ne voient pas que, à moyen et long termes, la question de la prévention et de la santé est essentielle non seulement pour les salariés, mais aussi pour les performances économiques de leur entreprise.
Il ne faut pas que, sous couvert de lutter contre la bureaucratie, le dispositif des ordonnances désavantage les salariés. Nous attendons des réponses sur cette question sensible, madame la ministre.