Intervention de Alain Richard

Commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du Règlement et d'administration générale — Réunion du 2 août 2017 à 10h00
Articles 56 et 13 de la constitution — Audition de M. Michel Mercier candidat proposé par le président du sénat pour siéger au conseil constitutionnel

Photo de Alain RichardAlain Richard :

J'éprouve toujours une forme de gêne dans ce type d'auditions, car le Conseil constitutionnel est une instance collégiale, dont chaque membre fait appel à sa conscience et exerce son indépendance. On n'y est donc pas élu sur un programme, mais nommé par une autorité de la République, pour exercer de façon indépendante la mission consistant à vérifier le respect de la Constitution et des principes découlant de la Déclaration des droits de l'homme. Ces auditions avant nomination sont un apport récent à notre Constitution, dont les partisans disent qu'il est d'inspiration parlementariste, quand il constitue aussi une imitation d'un rite américain, et que la Constitution des États-Unis n'est guère parlementariste... La Cour suprême américaine est d'ailleurs officiellement divisée entre une majorité et une minorité, ce que je trouve absolument tragique. Nous ne sommes pas dans un contexte similaire. Aussi nous faut-il quelque peu meubler cette audition, car il serait vain de chercher à obtenir de l'impétrant des engagements sur tel ou tel sujet. En somme, nous avons là une discussion entre personnes de bonne compagnie.

J'ai écouté attentivement vos propos sur le bicamérisme. À mon sens, la composante libérale a une grande importance car le Sénat est d'abord une création orléaniste. C'est d'ailleurs parce qu'il est devenu majoritairement républicain en janvier 1879 que le régime a basculé et que M. de Mac Mahon a démissionné. Certes, au cours des dernières décennies, le Sénat a aussi été un soutien de l'autorité de l'État, ce qui est moins séduisant mais essentiel. Le Conseil constitutionnel a rappelé que l'ordre public est aussi un principe à valeur constitutionnelle, car s'il n'est pas respecté, les autres principes ne peuvent l'être.

Sur les CMP, je ne partage pas votre avis. La Constitution parle bien du texte dans son ensemble. Si on commence à envisager un accord partiel, le résultat sera que des initiatives risquent d'être prises sur les parties n'ayant pas fait l'objet d'un accord en CMP, au risque de remettre en cause l'équilibre de l'ensemble d'un texte. Mieux vaut donc en rester à l'état actuel du droit. La création des CMP, d'ailleurs, a représenté un vrai progrès pour la cohérence législative.

Je souhaite vous interroger sur le fait que le Conseil constitutionnel se saisisse parfois lui-même, en choisissant d'étendre son examen à d'autres articles que ceux qui lui sont déférés. Selon quels critères prend-il cette décision ? Il ne s'en est jamais vraiment expliqué. C'est pourtant un facteur - modeste - d'incertitude juridique.

Si vous entrez au Conseil constitutionnel, vous y assumerez la défense d'une espèce menacée : les universitaires ! Je m'en réjouis.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion