Intervention de Christian Favier

Réunion du 26 juillet 2017 à 14h30
Renforcement du dialogue social — Articles additionnels après l'article 2

Photo de Christian FavierChristian Favier :

Cet amendement vise à compléter l’article 225-2 du code pénal relatif aux discriminations.

Si cet article prend déjà en compte les cas de discrimination à l’embauche ou à l’exercice d’activités, il ne fait que couvrir une part limitée des cas de discrimination dans le monde du travail. En effet, comme l’ont relevé successivement le Défenseur des droits, Jacques Toubon, le Conseil économique, social et environnemental, le CESE, ou l’Observatoire de la répression et de discrimination syndicales, les cas de discrimination syndicale sont largement sous-estimés par les pouvoirs publics.

Si la justice a déjà rendu des jugements contre des entreprises responsables de discrimination, les juges n’ont à l’heure actuelle aucune base légale solide sur laquelle s’appuyer. Ainsi le jugement ne tient-il que sur l’interprétation de l’article 225-2 du code pénal. On pense ici, par exemple, au groupe La Poste, à la SNCF ou à l’entreprise Ikea, condamnés ces dernières années pour avoir dévalué des salariés au motif qu’ils avaient des responsabilités syndicales. Malheureusement, en l’absence de base légale solide, ces jugements peuvent être facilement cassés à l’occasion d’un second recours.

Par ailleurs, à la difficulté de définition par le juge de ce qu’est une discrimination syndicale s’ajoute la question du taux de non-recours, favorisé justement par ce sentiment que la loi n’est pas appliquée.

Comme le disait à juste titre Simone Veil, « lorsque l’écart entre les infractions commises et celles qui sont poursuivies est tel qu’il n’y a plus à proprement parler de répression, c’est le respect des citoyens pour la loi, et donc l’autorité de l’État, qui sont mis en cause ».

Au final, cet amendement vise à mettre en application les recommandations du Comité des droits économiques, sociaux et culturels de l’ONU, qui déplorait en juin 2016 « les actes de représailles contre les représentants syndicaux signalés » et engageait la France à prendre des mesures efficaces en matière de protection des personnes engagées dans des activités syndicales, de prévention et de répression de toutes les formes de représailles. Ainsi, les dix-huit experts de l’ONU ont considéré que la France sous-estimait la répression syndicale, alors même que la jurisprudence a tenté, de manière incomplète, de donner un cadre juridique à la répression des actes de discrimination.

À ce titre, on ne peut que saluer l’arrêt de la Cour de cassation de janvier 2015, aux termes duquel le cas d’un salarié du secteur privé disposant de mandats syndicaux qui ne bénéficie d’aucun entretien d’évaluation depuis plusieurs années et ne connaît aucune évolution de carrière laisse supposer l’existence d’une discrimination.

Madame la ministre, mes chers collègues, nous débattons, à l’occasion de l’examen de ce texte, de la façon de renforcer le dialogue social et l’engagement syndical des salariés. Cet amendement s’inscrit donc dans cette dynamique en visant à sécuriser le parcours des salariés engagés, alors même que la crainte de représailles est le premier motif de non-engagement syndical.

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