Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, le texte dont nous sommes saisis et qui porte sur la ratification de deux ordonnances marque une évolution positive, même si elle est d’ampleur mesurée, dans le sens d’une meilleure gestion des projets affectant l’environnement, exclusivement dans le champ du code de l’environnement – je reviendrai sur ce point.
Le sujet principal, évoqué par M. le secrétaire d’État, est la création d’une étape nouvelle de participation préalable du public, jugée nécessaire à la suite du drame survenu à Sivens. Ce travail s’est fait en concertation avec l’ensemble des parties prenantes. Sommes-nous pour autant arrivés à une solution réellement satisfaisante ? Mon jugement sera mesuré.
Je ne peux manquer de souligner que le compromis auquel nous étions parvenus avec les différents partenaires était plus sobre que le texte dont nous débattons, à la fois dans sa rédaction – on peut toujours rédiger le droit avec davantage de brièveté et de simplicité – et le développement des procédures.
Cela étant, je ne suis pas là pour faire part de mes regrets. L’idée de faciliter un dialogue ouvert permettant d’envisager des alternatives ou des variantes au début ou en cours d’élaboration d’un projet, pour permettre une certaine conciliation des points de vue, ainsi qu’une prévention des conflits et des éventuels blocages, est effectivement mise en œuvre.
Il en résulte une procédure relativement souple, peu formaliste, avec un garant chargé d’équilibrer la discussion et de faciliter la recherche d’informations et de données sur le dossier, tout en veillant à ce que les obstacles ne soient pas trop significatifs pour le maître d’ouvrage.
Cette formule est valable pour les projets de taille moyenne, ce qui nous renvoie à la question du seuil, sur laquelle nous reviendrons lors de la discussion des articles.
Ce système, que le gouvernement précédent a introduit dans l’une des ordonnances qui nous sont soumises, et que nous allons ratifier, offre-t-il une garantie de non-conflictualité ? La réponse est clairement non.
Ce mécanisme permet certes de réduire les différences d’appréciation et les incompréhensions par manque d’information, mais pas de faire reculer des adversaires résolument déterminés à empêcher un projet – je pense notamment aux écoles de pensée prônant la décroissance. Il n’est donc nullement garanti qu’un effort de conciliation et d’écoute au moment du lancement du projet empêche la contestation et le développement de contentieux par la suite.
Mais c’est aussi, en partie, le résultat du principe « éviter », adopté à l’échelle européenne, et dont on tire dans notre droit des conséquences, que je trouve discutables. C’est avec une certaine hâte, pour ne pas dire une certaine légèreté, que nous avons posé comme obligation procédurale dans la préparation des projets une évaluation de la possibilité même d’éviter le projet. Ce n’est ni logique ni cohérent, et cela conduit à des manœuvres pour empêcher, effectivement, la réalisation de projets.
Toutefois, l’ordonnance n° 2016-1060 contient d’autres améliorations, en particulier un assouplissement des enquêtes publiques, et l’ordonnance n° 2016-1058 permet de réduire légèrement le nombre d’études d’impact.
Au-delà de ces quelques motifs de satisfaction, il subsiste tout de même des interrogations. Nos procédures d’autorisation en matière d’environnement restent globalement très formalistes, ce qui alimente le contentieux, lequel génère d’énormes pertes de temps et d’énergie.
Il y aura donc encore du travail à faire pour limiter le nombre et la durée des contentieux. De ce point de vue, d’ailleurs, je ne trouve pas logique d’avoir écarté la proposition du groupe de travail consistant à vider définitivement le contentieux de la concertation préalable à la fin de celle-ci, ce qui éviterait d’y revenir au moment de l’approbation du projet définitif, c’est-à-dire parfois deux ans après. J’espère que nous pourrons revenir sur cette erreur de raisonnement juridique. Ensuite, les études d’impact, telles qu’elles sont conçues en France, puis vérifiées par les tribunaux, sont encyclopédiques, avec à la clef des coûts tout à fait injustifiés.
Je me souviens, monsieur le secrétaire d’État, que lorsque le président Hollande avait lancé ce chantier à l’occasion d’une conférence environnementale, il avait demandé une normalisation des études d’impact, afin que l’on puisse reprendre les données d’une première étude d’impact concernant un projet de tel ou tel canton ou commune pour un nouveau projet similaire, tout étant déjà connu. Je ne suis pas sûr que ce processus de normalisation et d’accumulation d’informations ait été mené. Quand on connaît la surcharge des services, c’est pourtant un défi à relever.
Je n’ajoute rien à la demande de plusieurs collègues, notamment du rapporteur, de procéder à un comparatif sérieux, qui en revanche n’a rien de « limité ». Il est assez compliqué d’effectuer un véritable comparatif européen de procédures. Mais si vous trouvez quelques centaines de milliers d’euros, monsieur le secrétaire d’État, et une écoute attentive de l’OCDE, qui accomplit déjà ce travail, ce sera un outil utile.
En attendant, faisons fonctionner ces nouvelles dispositions et continuons à travailler pour alléger les procédures trop complexes.