Intervention de Thierry Carcenac

Réunion du 9 novembre 2017 à 10h30
Programmation des finances publiques de 2018 à 2022 — Discussion générale

Photo de Thierry CarcenacThierry Carcenac :

Madame la présidente, monsieur le ministre, monsieur le rapporteur général de la commission des finances, mes chers collègues, l’examen du projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2018-2022 fixe la trajectoire et les orientations du Gouvernement pour le quinquennat. Le projet de loi de finances et le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2018 en sont la première traduction.

Ce document propose de respecter les engagements européens de la France et de poursuivre les moyens mis en œuvre pour sortir notre pays de la procédure européenne pour déficit public excessif. Comme Européens, nous ne pouvons qu’y être favorables.

Cependant, les moyens retenus pour y parvenir, destinés à rompre avec « l’ancien monde », ne peuvent nous convenir. En effet, monsieur le ministre, nous ne pouvons nous satisfaire des fondements sur lesquels vous vous appuyez : à l'Assemblée nationale, vous avez affirmé que « l’impôt [était] la conséquence de la dépense publique » et poursuivi ainsi : « Pourquoi réduire les dépenses publiques ? Parce que l’argent public n’existe pas… » Nous verrons que, de l’argent, il y en a !

De même, monsieur le ministre, votre approche des relations de l’État avec les collectivités locales propose, et c’est une bonne chose, la concertation avec les élus, la Conférence nationale des territoires paraissant en être la traduction. Or les propos tenus par les ministres au congrès des régions, puis à celui de l’Assemblée des départements de France, ne correspondent pas aux objectifs affichés, puisque les présidents de région se retirent de la conférence et ceux des départements posent comme préalable le règlement des allocations individuelles de solidarité.

Dès lors, l’examen que nous effectuons de cette trajectoire pour les finances publiques se fonde sur des valeurs issues de l’ancien monde. Je retiendrai les dispositions contenues dans l'article XIII de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789 : « Pour l’entretien de la force publique, et pour les dépenses d’administration, une contribution commune est indispensable : elle doit être également répartie entre tous les citoyens, en raison de leurs facultés. »

Condorcet a, le premier, avancé la progressivité des contributions, et non les flat tax, et ce fut de haute lutte que l’impôt sur le revenu défendu par les socialistes est créé en 1914. Puis, après la Seconde Guerre mondiale, le pacte du Conseil national de la Résistance porte la création de la sécurité sociale et des redistributions sociales dans un objectif de réduction des inégalités de revenus entre les citoyens. Les incitations économiques et écologiques viendront ensuite.

Ce simple rappel vise à affirmer que la fiscalité n’est pas qu’une affaire de baisse des impôts pour diminuer les charges. Elle sous-tend une vision plus large sur la nature et les missions d’un État, l’économie d’un pays et la justice sociale, qui doit réduire les inégalités et non seulement rendre à chacun en fonction de sa contribution.

Les années quatre-vingt ont mis à mal le concept même d’impôt et favorisé le rejet des prélèvements, M. Reagan et Mme Thatcher évoquant des impôts confiscatoires et injustes, qui entravent l’activité économique.

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