Vous n’avez pas bien suivi : après le Trocadéro, je ne suis pas resté !
J’évoquerai maintenant cette question sous un angle plus juridique que politique, à savoir le risque que le préfet exerce une tutelle sur les collectivités territoriales. Comme si les préfets des départements étaient d’horribles personnages qui n’avaient pas aussi fondé la République !
Très franchement, qui peut croire que la contractualisation est une mise sous tutelle ? Je rappelle que cette tutelle est déjà prévue dans le code général des collectivités territoriales. En cas d’endettement trop important, le réseau d’alerte des finances locales est mis en place par le préfet. Cela arrive malheureusement de temps à autre.
Cela arrive assez peu aux grandes collectivités, dont on a parfois laissé filer l’endettement pour des raisons non pas administratives mais politiques, l’État n’ayant pas osé leur dire qu’elles étaient allées très largement au-delà des règles prudentielles et de bonne gestion. Même si tout le monde peut condamner ces pratiques, on est tous persuadé que seule une infime partie des élus locaux est à l’origine de difficultés budgétaires, mais il en existe. On peut parfois d’ailleurs discuter de leurs difficultés et les entendre. L’État, sous d’autres gouvernements, a ainsi ouvert des possibilités pour permettre à ces collectivités de faire face aux emprunts toxiques ou à d’autres difficultés n’étant pas propres, intrinsèquement, aux collectivités locales. La règle de mise sous tutelle existe donc. Aujourd'hui, nous proposons le contraire.
Ce que nous proposons dans le projet de loi de programmation présenté à la commission des finances, c’est au contraire un débat démocratique, un débat d’orientation autour de l’endettement. Depuis que des élus de l’opposition siègent dans les conseils municipaux, les conseils régionaux et les conseils départementaux, cela permet d’éclairer, notamment avant des élections, le débat sur la bonne gestion des finances publiques.
Seules ne sont concernées que les collectivités qui dépassent très largement les réseaux d’alerte. Le préfet écrit au président de région, au président de département, au maire ou au président de l’intercommunalité, quand ces ratios – nous ne les avons pas inventés, ils existent déjà – sont dépassés. L’élu propose alors un débat sur cet endettement, qui n’est pas fondé un an sur un an. C’est pourquoi votre second argument selon lequel la contractualisation empêchera les collectivités de mettre en œuvre des infrastructures de transport ou d’autres infrastructures importantes ou, pis, qu’elle empêchera le développement de villes nouvelles est complétement faux. Je rappelle que les collectivités ne sont pas les seules à financer de telles infrastructures. Heureusement que l’État y contribue de manière décisive, s’agissant notamment des infrastructures de transport, même si on peut parfois considérer que, ici ou là, sa contribution n’est pas suffisante.
Ce que nous souhaitons, c’est que la contractualisation se fasse sur cinq, six ou sept ans, un investissement n’étant pas annuel. L’objectif est que l’État puisse accompagner les collectivités. Un ressaut d’endettement peut se produire, c’est tout à fait logique, pour des raisons très concrètes.
Enfin, on ne peut pas faire preuve de schizophrénie et considérer que l’État ne doit s’intéresser ni à la sécurité sociale, gérée par les partenaires sociaux, ni aux collectivités locales, en raison du principe de libre administration, alors que le déficit est celui de toutes les administrations publiques, les APU. Quand nous sommes condamnés, que ce soit par la Commission européenne ou la Cour des comptes, ou quand, au contraire, on nous trouve quelques vertus, à l’instar du Haut Conseil des finances publiques qui a bien voulu souligner la sincérité de notre démarche, parfois même son originalité, ce qui est le cas pour les collectivités locales, c’est au regard de la situation toutes APU et non de la seule situation de l’État. Ce dernier ne représente qu’une branche de nos déficits ou de notre endettement. Si on est responsable à Bruxelles, devant le Parlement et l’opinion publique du déficit toutes administrations publiques confondues, on doit aussi avoir les moyens d’atteindre des objectifs.
Voilà ce que je souhaitais dire, madame la présidente. Nous aurons l’occasion de poursuivre ce débat lors de l’examen des articles, notamment de ceux qui portent sur les collectivités locales.