Intervention de Jean-Marc Gabouty

Réunion du 9 novembre 2017 à 15h00
Projet de loi de finances rectificative pour 2017 — Adoption d'un projet de loi modifié

Photo de Jean-Marc GaboutyJean-Marc Gabouty :

Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le président de la commission des finances, monsieur le rapporteur général, mes chers collègues, ce projet de loi de finances rectificative prévoit la création, pour l’exercice 2017, d’une contribution exceptionnelle à l’impôt sur les bénéfices des sociétés applicable aux sociétés réalisant plus d’un milliard d’euros de chiffre d’affaires, ainsi que d’une contribution additionnelle pour les sociétés réalisant plus de trois milliards d’euros de chiffre d’affaires.

Décidé dans l’urgence, ce collectif budgétaire est présenté comme une réponse législative à l’invalidation par le Conseil constitutionnel, le 6 octobre dernier, de la taxe additionnelle de 3 % sur les dividendes instituée en 2012. Cette décision se fonde sur la « méconnaissance des principes d’égalité devant la loi et devant les charges publiques », en particulier la « différence de traitement entre les sociétés mères, selon que les dividendes qu’elles distribuent proviennent ou non de filiales établies dans un État membre de l’Union européenne autre que la France ».

Le 17 mai dernier, la Cour de justice de l’Union européenne avait d’ores et déjà jugé la contribution de 3 % sur les revenus distribués incompatible avec le régime fiscal européen commun applicable aux sociétés mères et filiales.

À la suite de ces décisions, l’État est donc tenu de rembourser les sommes perçues aux entreprises concernées, soit près de 10 milliards d’euros. Eu égard aux montants en jeu, le Gouvernement risque de se trouver dans l’impossibilité d’atteindre l’objectif qu’il s’est fixé d’un déficit inférieur à 3 % dès 2017.

Dans ce projet de loi de finances rectificative pour 2017, le Gouvernement propose la mise en œuvre d’une contribution exceptionnelle à l’impôt sur les sociétés. Celle-ci, qui n’a vocation à s’appliquer qu’une fois, contient deux surtaxes dont le taux dépend du chiffre d’affaires de l’entreprise.

D’après les estimations données par le Gouvernement, ces dispositions concerneront environ 320 entreprises au total, dont 110 seront assujetties au taux de 30 %. Le rendement est estimé à 5, 4 milliards d’euros, dont 4, 8 milliards d’euros versés en 2017 au titre d’un acompte payé avant le 20 décembre de cette année.

Le solde public 2017 serait inchangé par rapport à l’estimation réalisée lors du dépôt du projet de loi de finances pour 2018, soit 2, 9 %.

Au-delà de 2017, le coût lié au contentieux serait intégré à la trajectoire des finances publiques sans compromettre le respect par la France de ses engagements européens. La prévision de solde pour 2018, établie dans le projet de loi de finances à 2, 6 %, serait réévaluée à 2, 8 %.

Ce dispositif ressemble quand même à un bricolage et peut brouiller le message du Gouvernement, qui souhaite, et qui va, diminuer le taux de l’impôt sur les sociétés dans l’optique d’une harmonisation européenne.

Il présente l’inconvénient de faire supporter un impôt exceptionnel à des entreprises pour compenser l’annulation d’une taxe qui n’était pas perçue sur le même périmètre ni dans les mêmes proportions pour les mêmes ou d’autres entreprises : plus de 200 d’entre elles vont être perdantes et 90 environ seront gagnantes.

Il ne s’agit donc pas d’une démarche très équitable ni même très cohérente, mais y avait-il une solution alternative qui n’aurait pas lourdement pénalisé nos finances publiques ? À l’évidence non !

Il convient à ce stade de rappeler que, dans ce processus, l’État prend à sa charge 5 milliards d’euros, soit environ la moitié du remboursement de la taxe sur les dividendes décidée en 2012. Une augmentation de cette part, demandée par la commission des finances du Sénat, semble s’écarter de la rigueur à laquelle celle-ci nous a habitués, nonobstant la théorie de l’élasticité développée par le rapporteur. Si l’on doit ne récupérer, sur cette opération, que 2, 5 milliards d’euros sur les 10 milliards d’euros que nous devons, je me demande si cela vaut le coup. Si l’élasticité nous permet d’avoir des recettes supplémentaires, compte tenu de la bonne orientation constatée actuellement, ces recettes pourraient être autrement employées à des fins utiles.

En conclusion, c’est sans enthousiasme, mais consciente des nécessités budgétaires, qu’une large majorité du groupe du RDSE est prête à soutenir les propositions du Gouvernement.

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