Intervention de Pascal Savoldelli

Réunion du 9 novembre 2017 à 15h00
Projet de loi de finances rectificative pour 2017 — Adoption d'un projet de loi modifié

Photo de Pascal SavoldelliPascal Savoldelli :

En vérité, il est évident que c’est quelque peu contraint et forcé que le Gouvernement s’est trouvé dans l’obligation de nous proposer ce collectif.

Au moment même où l’on supprime l’impôt sur la fortune, ou ISF, pour pas moins de 3, 2 milliards d’euros et où l’on réinvente le prélèvement libératoire sur les revenus financiers pour 1, 3 milliard d’euros, et sans doute bien plus dans les années à venir, cela fait un peu désordre !

Je comprends que M. le ministre ait voulu éviter toute critique émise à l’encontre des gouvernements précédents sur ce sujet. En effet, on ne peut pas oublier que la contribution sociale sur les bénéfices a été codifiée à l’article 235 ter ZCA du code général des impôts, à l’issue de l’adoption du collectif budgétaire d’août 2012.

Vous avez raison, monsieur le ministre, il faut sans doute faire la lumière sur le travail de conception-réalisation de cette disposition à l’été 2012. Cela nous évitera une seconde déconvenue.

Toujours est-il que nous sommes aujourd’hui dans une situation où nous devons rembourser 9 milliards d’euros en principal et 1 milliard d’euros de plus d’intérêts de retard aux contribuables injustement sollicités.

La solution trouvée par le Gouvernement est peut-être l’une des moins mauvaises, mais elle offre une palette de situations pour le moins variée. Ainsi, nous avons probablement des entreprises qui vont récupérer le montant des impôts indûment perçus sans contribuer, si leur chiffre d’affaires ne dépasse pas la limite du milliard d’euros, et d’autres qui vont payer la contribution, alors que, parfois, elles ne distribuent pas ou n’ont pas distribué de bénéfices.

Au demeurant, je dois l’avouer, le dispositif a un gros défaut, monsieur le ministre : il favorise les entreprises à distributions importantes au détriment de celles qui auront fait le choix prioritaire du réinvestissement.

Nous aurons même probablement des entreprises pour lesquelles le télérèglement du 20 décembre prochain sera le plus important de l’année, vu qu’il ne peut être corrigé par les niches, variations saisonnières et crédits d’impôt potentiellement applicables à l’impôt sur les sociétés.

Pas de créance CICE à mobiliser, pas de « retour en arrière » ou de « report en avant », pas d’imputation d’excédents d’acomptes provisionnels. L’article 1er, c’est l’impôt brut de décoffrage !

Cela va-t-il poser un problème insurmontable à la situation de nos entreprises, mettant en cause leur compétitivité ou je ne sais quelle position dans la mondialisation des affaires et des échanges ?

Je rappelle, par exemple, que le projet Salmon mis en œuvre par la direction d’Engie pour faire échapper environ 1 milliard d’euros à l’impôt semble nous montrer que l’optimisation fiscale est un jeu fort pratiqué au niveau auquel frappe l’article 1er. Je veux vous citer, monsieur le ministre, et je peux vous assurer que ma citation est tout à fait fidèle à vos propos : « Sur les 320 entreprises redevables, 80 % clôturent leur exercice le 31 décembre, et cela représente 94 % du produit de l’impôt sur les sociétés. Le problème ne serait donc que marginal.

« Le nombre d’entreprises dont le chiffre d’affaires est supérieur à 3 milliards d’euros est de 143, dont 109 sont bénéficiaires au titre des exercices clos en 2016. Ces 109 sociétés ont déclaré au total un chiffre d’affaires de 1 620 milliards d’euros, soit un chiffre d’affaires moyen de 14, 9 milliards d’euros au titre des exercices clos en 2016. Le montant moyen de bénéfices est estimé, sur la base de ces chiffres, à 412 millions d’euros.

« Quelques remarques sur ces chiffres. […] il y a effectivement une très forte concentration de l’IS sur les entreprises au chiffre d’affaires le plus élevé, puisque le ticket moyen est estimé à 412 millions d’euros ; cela explique que le produit de la taxe soit concentré sur les entreprises qui ont un chiffre d’affaires supérieur à 3 milliards d’euros. » Je voudrais partager avec vous un petit calcul : j’ai pris une entreprise moyenne, mais assez costaude, qui a fait près de 15 milliards d’euros de chiffre d’affaires – ce n’est pas mal, monsieur le ministre ! – et qui présente un bénéfice fiscal moyen de 412 millions d’euros.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion