Intervention de Jean-Claude Carle

Réunion du 22 janvier 2008 à 10h00
Avenir de la formation professionnelle en france — Discussion d'une question orale avec débat

Photo de Jean-Claude CarleJean-Claude Carle :

Ce qui est vrai .pour la formation initiale l'est également pour la formation continue, dans laquelle près de 26 milliards d'euros sont engagés.

En effet, je le répète, la formation ne va pas vers celles et ceux qui en ont le plus besoin, qu'il s'agisse des personnes physiques ou des personnes morales.

Pour les personnes physiques, 44 % des titulaires d'un BTS ou d'un diplôme de l'enseignement supérieur suivent une formation au cours de leur parcours professionnel, contre seulement 23 % des titulaires d'un CAP ou d'un BEP et à peine 12 % des non-qualifiés ou des non-diplômés.

La formation professionnelle continue reproduit les inégalités de la formation initiale.

Selon une formule souvent entendue lors des auditions que nous avons menées, la formation va à la formation.

Ce qui est vrai pour les personnes physiques l'est également pour les personnes morales.

Les très petites entreprises et les PME consacrent dix fois moins à la formation professionnelle que les grandes entreprises. L'effort moyen de formation par salarié représente ainsi 791 euros dans les entreprises de dix salariés et plus, contre 74 euros dans les autres.

Ces chiffres confirment les propos du Président de la République : la formation ne va pas à celles et ceux qui en ont le plus besoin, c'est-à-dire les petites entreprises, celles qui aujourd'hui créent la richesse et l'emploi, mais dans lesquelles les salariés ont les parcours les moins sécurisés.

Ce constat étant fait, il importe de comprendre pourquoi nous en sommes arrivés à une telle situation. Selon moi, il y a trois raisons essentielles.

Premièrement, le système, depuis des décennies, repose sur une logique de dépenses. La seule réponse qui a été apportée, tant en formation initiale qu'en formation continue, a été une augmentation des crédits budgétaires.

Monsieur le secrétaire d'État, j'ai beaucoup de doutes, mais je n'ai qu'une certitude : la bonne réponse n'est plus la seule inflation budgétaire.

Deuxièmement, les objectifs assignés à la formation professionnelle ne sont pas eux-mêmes judicieux.

La formation professionnelle initiale est considérée comme une voie d'orientation par défaut, « récupérant » les jeunes en situation d'échec dans la voie générale. La formation professionnelle continue, quant à elle, est chargée essentiellement du traitement social du chômage.

Comment alors s'étonner qu'avec de tels objectifs on arrive aux résultats évoqués ?

Troisièmement, enfin, les conclusions de notre mission viennent rejoindre l'appréciation d'un grand nombre d'observateurs : le système de formation professionnelle français est opaque, éclaté et trop complexe pour assurer efficacement l'adaptation de la main-d'oeuvre et la promotion sociale.

Monsieur le secrétaire d'État, la formation professionnelle souffre ainsi de trois maux, les « trois C » pour reprendre le qualificatif employé dans notre rapport : complexité, cloisonnements, corporatismes.

Le premier C est donc la complexité, et ce dans tous les domaines.

Au niveau des organismes de formation, il existe en effet 45 000 organismes publics ou privés déclarés, dont seulement 5 000 sont réellement actifs, avec une majorité de petits prestataires, soumis au simple régime déclaratif.

Pour apporter des garanties aux « acheteurs de formations », qui ont bien du mal à se repérer au travers du foisonnement de l'offre, la mission commune d'information propose d'instituer des garanties de solidité financière des organismes, sous la forme d'un dépôt obligatoire lors de la déclaration. De plus, un agrément régional pourrait être délivré par le conseil économique et social régional.

La complexité apparaît également au niveau des diplômes et des certifications.

Plus de 1 200 diplômes ou titres professionnels sont délivrés par sept ministères certificateurs. On peut ainsi recenser 198 CAP, 35 BEP, 73 baccalauréats professionnels et 109 BTS. Près de 1 450 licences professionnelles ont été créées pour seulement 20 000 étudiants, soit une licence pour 14 étudiants. Pour l'anecdote, nous avons même relevé l'existence d'une licence professionnelle « Clown » à l'université de Lyon !

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