Intervention de Richard Tuheiava

Réunion du 5 mars 2009 à 21h30
Loi pénitentiaire — Article 25, amendement 140

Photo de Richard TuheiavaRichard Tuheiava :

L’amendement n° 140 rectifié a pour objet d’attirer l’attention de la Haute Assemblée sur la question de l’incarcération des mineurs. Il s’agit de mettre en place un dispositif pénitentiaire propre à garantir l’intégrité physique - et morale, cela va sans dire - des détenus mineurs.

À la lecture de ce projet de loi ou du texte issu des travaux de la commission, on peut déplorer que seuls trois articles soient consacrés à la question de la détention des mineurs.

Je ne peux me satisfaire des arguments qui ont été opposés par le rapporteur à l'amendement n° 236, selon lesquels l’ordonnance du 2 février 1945 contient des dispositions de nature à satisfaire cet amendement ou qu’un projet de loi en cours d’élaboration permettra de couvrir ces points, à l’exception de ceux qui sont déjà constitutionnellement prévus.

Nous examinons un projet de loi pénitentiaire et nous en sommes parvenus à la section réservée à la détention des mineurs. S’il est bien un endroit dans le texte où il convient de mentionner la question du droit des détenus mineurs de manière un peu plus précise, c’est bien l’article 25 !

Je tiens ici à rappeler les dispositions de l’article 37 paragraphe c) de la convention internationale des droits de l’enfant :

« Les États parties veillent à ce que :

« c) Tout enfant privé de liberté soit traité avec humanité et avec le respect dû à la dignité de la personne humaine, et d’une manière tenant compte des besoins des personnes de son âge. En particulier, tout enfant privé de liberté sera séparé des adultes, à moins que l’on estime préférable de ne pas le faire dans l’intérêt supérieur de l’enfant... »

Cette convention a été ratifiée par la France en 1990 et trouve donc à s’appliquer dans l’ordre juridique national.

En 2005, la Cour de cassation s’est ralliée à la jurisprudence du Conseil d’État, qui reconnaissait la possibilité pour les tribunaux judiciaires français de se référer, dans leurs décisions, directement aux dispositions de la convention internationale des droits de l’enfant.

Dans la pratique, la confusion entre détention - ou incarcération - de détenus mineurs et majeurs est de nature à porter directement atteinte aux dispositions que je viens de rappeler.

Pour la Polynésie française en particulier, dont je me fais ici le porte-parole, cette situation a déjà été pointée dans un rapport alternatif rédigé conjointement par la Ligue polynésienne des droits de l’homme et par la Fédération internationale des ligues des droits de l’homme le 3 juin 2004, rapport qui a été officiellement déposé sur le bureau du Comité des droits de l’enfant de l’ONU, à Genève.

J’ai personnellement défendu ce rapport alternatif à Genève et cette situation a été à juste titre retenue par le Comité des droits de l’enfant de l’ONU, qui a émis des recommandations claires et précises à l’égard de la France.

Bien qu’elle soit régularisée dans la pratique, cette atteinte aux dispositions de la convention internationale des droits de l’enfant n’a toujours pas trouvé de solution législative.

Il s’agit donc de poser clairement dans la loi ce principe de séparation entre les quartiers réservés aux mineurs et ceux qui accueillent les majeurs. Ce projet de loi pénitentiaire, qui est présenté comme le texte permettant, à bien des égards, de mettre la France en conformité avec ses engagements internationaux, vis-à-vis de l’Europe comme des Nations unies, est le cadre adéquat.

Je souhaite donc que le consensus le plus large se dégage sur cet amendement.

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