Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le président de la commission, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, cette proposition de loi ne pose pas de problème en elle-même. Elle a pour objet d’empêcher que des partis et groupements politiques puissent profiter de l’inattention, voire de l’état de faiblesse, de certains citoyens pour les inscrire, à leur insu, sur une liste de candidats et en faire des « candidats malgré eux ».
Les modalités de dépôt des candidatures aux différentes élections locales, municipales et régionales, sont aujourd’hui des démarches collectives, qui ne prémunissent pas contre des tentatives de manœuvre. Ces démarches sont accomplies par les responsables de liste pour l’ensemble des candidats. Or ces responsables usent parfois de subterfuges pour recueillir le consentement de certaines personnes contre leur gré, profitant ainsi de leur crédulité, et souvent de leur état de faiblesse.
De nombreuses manœuvres ont été ainsi signalées, non seulement lors des élections municipales de 2014, mais aussi, ce qui est encore plus inquiétant, en 2015, lors des élections départementales et régionales.
Ainsi, en ayant signé de fausses pétitions ou, pis, de faux recours devant le Conseil constitutionnel, des électeurs ont en réalité signé des formulaires de candidature et se sont retrouvés candidats malgré eux, avec toutes les conséquences que l’on connaît.
Ces manipulations frauduleuses ainsi organisées sont lourdes de conséquences : elles dupent les électeurs, ruinent la confiance qu’ils peuvent avoir dans les institutions et pénalisent l’ensemble des listes. Elles peuvent en outre engendrer des dépenses publiques nouvelles lorsqu’elles rendent nécessaire l’organisation de nouvelles élections.
Ces manœuvres touchent donc au fondement même de notre démocratie, dont elles remettent en cause le bon fonctionnement.
Il faut également prêter attention au préjudice subi par ces « candidats malgré eux », qui ont vu leur nom associé à un parti politique dont ils ne partagent pas forcément les valeurs.
À cet égard, je partage totalement le point de vue de Philippe Bonnecarrère et d’Arnaud de Belenet : il faudrait sans doute, par voie réglementaire, permettre aux candidats de cocher une case « sans étiquette », ce qui n’est pas possible aujourd’hui.
Enfin, les sanctions prévues par le droit en vigueur ne semblent pas suffisantes pour lutter contre ce type de fraude. Elles induisent même certains effets pervers. Ces sanctions administratives ou pénales sont en effet prononcées après l’élection et n’empêchent donc pas de mentionner ces « candidats malgré eux » dans les actes de propagande électorale et sur les bulletins de vote.
L’annulation du scrutin porte par ailleurs préjudice aux vainqueurs, qui doivent se soumettre à une élection partielle alors même qu’ils ne sont pas responsables des fraudes constatées.
Pour lutter contre ce type de manœuvre, le texte adopté par l’Assemblée nationale prévoit deux nouvelles formalités lors du dépôt de candidature et de l’enregistrement des déclarations de candidature : l’apposition d’une mention manuscrite des colistiers ou suppléants confirmant leur volonté de se présenter à l’élection et la transmission d’une copie du justificatif d’identité des candidats et de leurs suppléants.
La commission des lois a approuvé les objectifs de la proposition de loi, l’inscription de « candidats malgré eux » constituant un problème qui doit être combattu avec fermeté et sans plus attendre, même si certains voient parfois dans ce texte un excès de formalisme.
Il est vrai que la proposition de loi imposerait deux nouvelles formalités aux candidats et rendrait leur démarche un peu plus complexe. De même, les services de l’État auraient de nouveaux documents à vérifier. Mais, au fond, que représente un peu plus de formalisme s’il permet de se prémunir contre tous les types de détournement, toutes les fraudes et de s’assurer du consentement des candidats ?