Intervention de Laurent Duplomb

Commission des affaires économiques — Réunion du 21 novembre 2017 à 16h45
Projet de loi de finances pour 2018 — États généraux de l'alimentation - Audition de M. Stéphane Travert ministre de l'agriculture et de l'alimentation

Photo de Laurent DuplombLaurent Duplomb, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques :

Permettez-moi tout d'abord de vous présenter les excuses d'Alain Houpert, rapporteur spécial de la commission des finances, qui ne pouvait être présent.

Monsieur le ministre, je n'ai pas tout à fait la même interprétation que vous du budget de l'agriculture.

Vous prétendez que la baisse de sept points des cotisations d'assurance maladie des exploitants agricoles (AMEXA) constitue une mesure sociale. Pas du tout ! Cette mesure a été prise pour soutenir la compétitivité des exploitations agricoles durant une crise qui ne s'est pas véritablement résorbée. Selon vous, nous serions sortis de la crise ? Vous avez en face de vous un agriculteur qui est producteur de lait et éleveur : je peux vous affirmer que c'est loin d'être le cas ! On aurait au contraire bien besoin d'un rattrapage de compétitivité en matière de production laitière face à des pays comme l'Allemagne ou le Danemark !

Vous annoncez par ailleurs une provision de 300 millions d'euros. Or je crains que l'on n'affecte celle-ci aux aléas climatiques. Jusqu'à présent, une taxe sur les contrats d'assurance des agriculteurs, soit environ 60 millions d'euros par an, devait permettre de participer financièrement à la prise en compte des calamités, l'État devant intervenir chaque fois que ces ressources étaient insuffisantes.

Il me semble que cette provision sonne la fin du système, le ministère du budget pouvant fort bien décider d'utiliser cette somme à autre chose.

Si c'est le cas, l'État réalisera des économies au détriment de la compétitivité de notre agriculture. Les risques que subissent les agriculteurs ne sont pas de leur fait, car les crises sont imputables à des aléas climatiques non maîtrisables.

S'agissant des ICHN, quand allez-vous siffler la fin de la partie ? Tant qu'on n'est pas sûr du zonage, on n'est pas sûr de la quantité d'argent qui sera versée aux agriculteurs. Vous avez dit que le budget serait constant, après être allé chercher une part de son financement dans le premier pilier. On comprend que ce budget ne sera pas extensible. Si le périmètre reste identique, l'aide risque de le demeurer également. Si vous acceptez une modification du périmètre, cela signifie qu'on ira chercher la compensation dans la poche de certains.

Les ICHN, je le rappelle, sont des indemnités compensatrices des handicaps naturels. L'agriculteur ne choisit pas le lieu de sa naissance, mais c'est là qu'il implante son exploitation...

L'Europe, je le rappelle, a réclamé à la France un apurement des comptes de 41 millions d'euros en 2013, 427 millions d'euros en 2014, 812 millions d'euros en 2015, 710 millions d'euros en 2016 et 221 millions d'euros en 2017, l'administration française n'ayant pas respecté les consignes fixées par l'Europe dans la mise en oeuvre de la PAC. Ces sommes, qui représentent 2 milliards d'euros sur cinq ans, correspondent environ à la moitié du budget que vous avez annoncé.

Le ministère de l'agriculture compte aujourd'hui environ 17 000 ETP, et l'ONF 9 000. On arrive à un fonctionnaire pour 30 agriculteurs ! En avons-nous véritablement besoin d'autant ? N'y aurait-il pas là des économies à faire ?

Si encore cela nous permettait d'échapper à la somme de 2 milliards d'euros d'apurement - mais c'est loin d'être le cas !

Je rappelle également que nous avons deux ans de retard de paiement en matière de MAEC, ainsi que des retards importants sur le Plan de compétitivité et d'adaptation des exploitations agricoles (PCAE). Tout cela n'est pas supportable au regard des chiffres que je viens de citer !

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