Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, permettez-moi de commencer cette question par quelques chiffres : en 2016, 60 % des enfants sont nés hors mariage en France et 44 % des mariages finissent par un divorce. La parentalité ne s’exerce donc plus que minoritairement dans le cadre d’un mariage.
S’il appartient au juge civil d’encadrer les questions de garde et de résidence, d’autorité, de pension ou de logement entre les parents, il ressort que l’administration a aussi un rôle à jouer s’agissant de la délivrance de papiers d’identité aux enfants.
En effet, les services municipaux chargés de la délivrance de ces titres n’ont juridiquement pas l’obligation de rechercher si le parent demandeur est titulaire de l’autorité parentale ou si l’adresse déclarée est celle de la résidence principale de l’enfant. Aucun des documents à fournir ne contient cette information, pourtant importante au regard de l’intérêt supérieur de l’enfant.
Tout au plus, nos textes prévoient qu’il appartient au parent titulaire de l’autorité parentale d’en faire la demande. Mais l’absence de contrôle de l’effectivité de la détention de cette autorité rend bien illusoire cette protection purement formelle.
Dans l’hypothèse de parents séparés, ce défaut de contrôle des informations se double d’une absence d’information de l’autre parent, qui n’apprend alors que fortuitement, lorsque lui-même en fait la demande, l’existence des autres papiers d’identité.
Cet état de fait entraîne parfois, chez le parent de bonne foi, une situation d’anxiété, d’autant plus grande que cette pièce d’identité, bien plus que les autres, permet un éloignement non consenti d’un enfant français de son sol d’origine, sans possibilité pour l’autre parent de s’y opposer.
Il existe en outre un problème quant à la situation de l’enfant vis-à-vis de l’administration. Cette dernière ne reconnaissant que la validité de la dernière domiciliation, elle fait porter la charge de la preuve de l’existence d’une fraude non pas sur l’émetteur de la demande litigieuse, mais sur celui qui la conteste.
En outre, le parent indélicat peut aussi, lors de sa demande, déclarer le titre précédent volé, avec, à la clé, des situations juridiquement kafkaïennes pour le parent de bonne foi.
Enfin, au-delà de la difficulté de cette situation pour les parents séparés, mon interrogation vise aussi à alerter au sujet d’une possible responsabilité de l’administration, par exemple en cas de départ non consenti de l’enfant du territoire national. On sait que ces questions peuvent prendre un relief particulier dans le contexte actuel.
Ainsi, je souhaiterais connaître, madame la ministre, la position du gouvernement auquel vous appartenez face à ce problème, qui peut concerner des millions de nos concitoyens.