Intervention de Alain Dufaut

Réunion du 5 décembre 2017 à 14h00
Loi de finances pour 2018 — Immigration asile et intégration

Photo de Alain DufautAlain Dufaut :

… est en totale contradiction avec la volonté affichée par le Gouvernement.

Oui, monsieur le ministre d’État, cette lutte est incontestablement le parent pauvre de la présente mission, dont elle ne représente que 6 % des crédits totaux.

À présent, entrons dans le détail de ces crédits, qui atteindront 82, 82 millions d’euros en 2018. Je le rappelle à mon tour, quelque 40, 4 millions d’euros permettront le financement des vingt-sept centres de rétention administrative, ou CRA, dont vingt-trois en métropole et quatre outre-mer. Au total, ces centres représenteront 1 780 places. S’y ajouteront quatre locaux de rétention administrative et la zone d’attente des personnes en instance de départ à l’aéroport de Roissy. Enfin, 30 millions d’euros seront consacrés aux frais d’éloignement des étrangers en situation irrégulière.

J’insiste : tous ces montants sont manifestement insuffisants par rapport à la réalité des besoins.

Ainsi, les crédits de frais d’éloignement, que je viens d’évoquer et qui représentent 30 millions d’euros, sont en baisse de 10 % par rapport à 2017, alors que les correctifs que vous souhaitez apporter à la sous-occupation chronique des CRA vont automatiquement augmenter le nombre des candidats au retour, sans compter que les rétentions peuvent désormais durer jusqu’à quarante-cinq jours.

Une baisse des crédits à destination des CRA est, en effet, particulièrement dommageable dans un contexte de crise migratoire qui conduira inévitablement à une augmentation considérable des placements en rétention.

Comme l’écrit fort justement François-Noël Buffet dans son rapport, pour le seul premier semestre de 2017, l’augmentation du taux d’occupation était déjà de 66 %.

Actuellement, le nombre d’étrangers en situation irrégulière sur le sol français est certainement supérieur à 400 000. Il suffit de constater que le nombre de bénéficiaires de l’aide médicale d’État, l’AME, était de 311 310 à la fin de l’année 2016 : il affichait, ainsi, une augmentation de 49 % par rapport au 31 décembre 2011. Ces chiffres permettent d’imaginer le nombre réel des étrangers illégaux.

L’éloignement des étrangers en situation irrégulière doit donc être une vraie priorité si l’on veut rendre leur crédibilité à nos politiques d’immigration. Faut-il rappeler que 92 000 mesures d’éloignement ont été prononcées en 2016 et que seuls 18 % d’entre elles ont réellement été exécutées, par un éloignement forcé, aidé ou encore spontané ?

Il faut donc se donner les moyens d’agir et renégocier avec les pays d’origine, en particulier le Maroc, la Tunisie et le Pakistan, afin de multiplier ces retours. La tâche s’annonce difficile, c’est vrai, mais les laissez-passer consulaires devraient aboutir à des résultats nettement supérieurs.

Monsieur le ministre d’État, voilà ce qu’il faudrait faire. Mais les chiffres annoncés pour cette mission démontrent que votre gouvernement sera, en 2018, dans l’incapacité de tenir ses engagements en matière d’éloignement forcé.

Mes chers collègues, c’est pourquoi nous sommes, au sein du groupe Les Républicains, pleinement d’accord avec l’avis défavorable émis par la commission des lois au titre des crédits qui nous sont proposés aujourd’hui dans le projet de loi de finances pour 2018.

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