Intervention de David Assouline

Réunion du 4 mai 2010 à 14h30
Vote par voie électronique lors des élections des membres de conseils des établissements publics — Adoption définitive d'une proposition de loi

Photo de David AssoulineDavid Assouline :

Madame la ministre, monsieur le président de la commission, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, quand on prétend soumettre un texte au Parlement, la question à laquelle il convient d’abord de répondre est : à quoi sert-il ?

M. Longuet s’est plaint, ces jours-ci, de l’ordre du jour surchargé du Parlement, saisi de lois portant sur tout et n’importe quoi. Le temps dont nous disposons doit donc être réservé à l’examen de textes qui servent à quelque chose.

J’ai donc cherché dans la proposition de loi sa raison profonde. Sa raison avouée et assumée a été développée ici par Mme la ministre : il s’agit de lutter contre l’abstentionnisme, en particulier celui du collège étudiant, qui participe peu aux élections.

Or cette proposition de loi va s’appliquer à tous les collèges. Pourtant, le taux de participation des personnels enseignants est de l’ordre de 65 % et celui des personnels IATOS de 60 %, soit des taux tout à fait convenables. L’objet de la présente proposition de loi est donc ailleurs.

Il est vrai que le taux de participation des étudiants, qui oscille entre 16 % et 17 %, est faible. Le problème est d'ailleurs endémique. D’un point de vue sociologique, ce ne sont pas ceux qui travaillent à l’université qui ne participent pas aux élections. La faible participation concerne avant tout les étudiants. On en connaît les raisons, et ce depuis très longtemps. Pourtant, on agit très peu dans ce domaine.

Contrairement aux personnels enseignants et aux autres professionnels, les étudiants ne passent pas l’essentiel de leurs journées à l’université. Ils n’y ont pas de perspectives à long terme – le but est tout de même d’en sortir ! De plus, pour des raisons que nous connaissons et que nous avons souvent évoquées ici, près d’un étudiant sur deux quitte l’université avant la fin du premier cycle. Le turn-over y est donc malheureusement énorme.

Parallèlement, rien n’est fait pour encourager les étudiants à se sentir concernés par la vie universitaire et ses enjeux. Il faudrait que les étudiants soient informés des questions débattues au sein du conseil d’administration, ce qui n’est pas toujours le cas, qu’ils sachent qu’ils peuvent y faire entendre leur point de vue et que celui-ci peut peser.

Il n’existe pas à proprement parler de vie étudiante dans notre pays. Ailleurs, ces questions ne se posent pas dans les mêmes termes. Les campus où les étudiants logent, disposent d’une bibliothèque universitaire et d’un restaurant, où ils ont des loisirs sportifs et culturels, sont de véritables lieux de vie. Ils s’apparentent à de petites villes.

La France n’a pas fait ce choix pour ses universités. Même dans une structure comme Jussieu, où 70 000 étudiants étaient concentrés sur une même dalle lorsque j’y faisais mes études, les étudiants se sentaient très seuls, encore plus seuls que dans de petites unités ne comptant que quelques milliers de personnes, l’individualisation et la dépersonnalisation y étant absolues.

Or qui a assumé la mission d’informer les étudiants afin de les faire participer aux élections ? Ce sont non pas les pouvoirs publics et les conseils d’administration, mais les organisations étudiantes ! Vous avez cité l’une d’elles, monsieur le rapporteur, l’UNEF, qui se trouve avoir émis un avis défavorable. Celle-ci étant majoritaire – je le signale au passage –, il conviendrait peut-être de tenir compte de son avis ! Au-delà de l’UNEF, il importe, me semble-t-il, de rendre hommage aux efforts constants engagés par les syndicats étudiants de toutes obédiences pour impliquer les étudiants dans les élections.

Voilà ce sur quoi nous devons agir ! Penser qu’il suffit de s’en remettre à une technologie pour régler des problèmes bien plus profonds, c’est être complètement à côté de la plaque. C’est même dangereux !

D’ailleurs, comme M. Renar l’a souligné, le vote par voie électronique, même s’il présente probablement certains avantages, n’a pas eu d’incidence sur l’abstention partout où il a été mis en place. On a observé des reculs de la participation, même s’ils ne sont pas dus au vote électronique, lors des élections prud’homales et de l’élection des membres de l’Assemblée des Français de l’étranger, et je pourrais citer d’autres exemples. La question est donc ailleurs, et j’y reviendrai à la fin de mon propos.

Mme la ministre a invoqué l’argument de la modernité. Très franchement, dans cet hémicycle, je ne suis pas le plus réticent à l’égard des technologies numériques ! J’ai même essayé de les encourager et de vaincre, par des démonstrations parfois très concrètes, les préventions et les frilosités de mes collègues afin de persuader ces derniers du fait que ces technologies pouvaient nous faciliter la vie.

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