Un des amendements que nous avons déposés sur cet article – et cela s’est également produit pour d’autres articles – est tombé, avant sa présentation en commission, sous le couperet de la commission des finances, celle-ci y ayant opposé l’article 40 de la Constitution.
Je respecte cette procédure et ne remets pas en cause l’article 40, qui a toute sa légitimité. Mais nous souhaitons alerter la Haute Assemblée sur un point et nous le ferons autant de fois que nécessaire : on ne peut pas invoquer l’article 40 de la Constitution, comme cela a été fait, sans avoir à se justifier et sans avoir à faire preuve d’un minimum de cohérence : on l’invoque contre certains amendements et pas contre d’autres qui ont pourtant exactement les mêmes effets financiers !
L’application de cette nouvelle règle, qui est de plus en plus en rupture avec ce qui se pratiquait il y a encore deux ans, revêt un caractère discrétionnaire, et cela commence vraiment à bien faire !
Je vais donner un exemple tout à fait significatif.
Nous venons de voter sur des amendements tendant à mettre en œuvre les prescriptions et recommandations de la CNIL. Toutes étaient susceptibles d’accroître dans une certaine mesure la dépense publique ; mais, après tout, c’est le prix à payer pour sécuriser les systèmes ! Quoi qu'il en soit, sur ces amendements-là, l’article 40 n’a pas été invoqué. On aurait également pu faire valoir l’article 41 au motif que ces dispositions relevaient du domaine réglementaire, mais on ne l’a pas fait non plus. En revanche, celui de nos amendements qui prévoyait le recours à une expertise indépendante, là aussi conformément aux recommandations de la CNIL, a été déclaré irrecevable au titre de l’article 40 parce que sa mise en œuvre aurait coûté de l’argent ! Il y a là une incohérence absolue !
J’ajoute – et c’est dommage pour votre argumentation, madame la ministre, puisque vous prétendez vouloir appliquer toutes les recommandations de la CNIL et que cette expertise indépendante est, selon la CNIL, obligatoire – que, selon la commission des finances, le financement de cette disposition n’est pas prévu dans le budget.
Il apparaît donc nécessaire, lorsque l’irrecevabilité au titre de l’article 40 est invoquée, de justifier cet avis par au moins cinq lignes d’explication – c’est bien le moins ! – et de nous montrer en quoi cet avis est cohérent avec ceux qui ont été précédemment émis. Car, pour l’heure, la coupe commence vraiment à déborder !
D’ailleurs, je me suis exprimé sur ce point ce matin devant la commission de la culture et son président a bien conscience du problème – il nous fera part, s’il le souhaite, de son point de vue sur la question – puisque nous avons demandé au président de la commission des finances de venir s’expliquer devant nous. Nous aimerions en effet comprendre quelle est la logique qui sous-tend de tels avis. Pour m’en être entretenu avec des sénateurs de tous bords, je me rends compte que personne n’a encore compris la logique fulgurante du président de la commission ; je veux évidemment parler du président de la commission des finances.