Intervention de Catherine Procaccia

Réunion du 4 mai 2010 à 21h30
Rémunération des salariés reclassés — Adoption définitive d'une proposition de loi

Photo de Catherine ProcacciaCatherine Procaccia :

Madame la présidente, monsieur le ministre, madame la présidente de la commission, mes chers collègues, le texte dont nous débattons ce soir revêt une acuité particulière en cette période de crise économique qui voit se succéder les plans sociaux. Régulièrement, les salariés, déjà déstabilisés par la perspective d’un licenciement et dans l’attente d’offres de reclassement, reçoivent des offres inacceptables de reclassement à l’étranger sur des postes dont la rémunération est sans doute adaptée au pays, mais ridiculement faible pour la France.

M. le ministre, M. le rapporteur et les intervenants qui m’ont précédé ont cité de multiples exemples d’entreprises ayant proposé à leurs employés des postes en Inde, en Tunisie ou en Roumanie, pour des salaires mensuels s’échelonnant de 69 euros à 137 euros.

Pourtant, il ne s’agit pas d’une pure provocation, condamnable sur le plan tant moral que juridique, mais de l’application de l’article L. 1233-4 du code du travail. En effet, le législateur, afin d’obliger l’entreprise à ne négliger aucune possibilité de reclassement, a, en 2002, introduit, selon moi en toute bonne foi, des dispositions prévoyant que le licenciement économique ne pouvait « intervenir que lorsque tous les efforts de formation et d’adaptation ont été réalisés et que le reclassement de l’intéressé ne peut être opéré dans l’entreprise ou dans les entreprises du groupe auquel l’entreprise appartient ».

La jurisprudence en a fait une interprétation stricte, qui conduit les entreprises souhaitant éviter une condamnation à une situation ridicule, absurde et blessante pour leurs salariés. Ainsi, la cour d’appel de Reims a condamné la société Olympia à verser 2, 5 millions d’euros d’indemnités à 45 anciens salariés pour ne pas leur avoir proposé un reclassement en Roumanie. Cette condamnation met toute l’entreprise en danger, puisqu’elle risque de provoquer le licenciement des 280 salariés qui ont encore un emploi en France. Il est anormal qu’une entreprise soit condamnée par les tribunaux parce que sa direction a choisi, en conscience et avec l’accord du comité d’entreprise, de ne pas proposer à ses salariés des offres de reclassement absurdes.

Puisque seule une loi peut défaire une loi, le groupe UMP soutient cette proposition de loi émanant de l’Assemblée nationale : elle remet les choses en place et évitera des interprétations jurisprudentielles contraires à l’esprit de ce qu’avaient recherché le législateur et le gouvernement en 2002.

La proposition de loi prévoit plusieurs cas.

Lorsque le reclassement conduit à un emploi relevant de la même catégorie que celui que le salarié occupe, l’offre de reclassement devra alors assurer au salarié une rémunération équivalant à celle qu’il percevait auparavant.

Dans le second cas de figure, un emploi de catégorie inférieure, à défaut d’un emploi de catégorie équivalente, pourra être proposé. Des garanties devront alors être données, afin que les salariés bénéficient du champ le plus large possible d’offres de reclassement interne, y compris à l’étranger.

L’option retenue par l’Assemblée nationale me semble judicieuse, car elle s’appuie sur une méthode déjà éprouvée, celle du questionnaire préalable, imaginé par certaines entreprises pour éviter d’avoir à présenter à leurs salariés des postes disponibles mais inacceptables. Il s’agit également de ne pas proposer des places à l’étranger aux salariés qui ne le souhaitent pas, quelles qu’en soient les conditions. Cette méthode n’a malheureusement pas été admise par les juridictions de l’ordre judiciaire, alors qu’elle l’a été par celles de l’ordre administratif. Elle aura bientôt, grâce à ce texte, valeur législative.

Notre rapporteur a présenté le principe retenu : l’employeur devra préalablement demander aux salariés s’ils acceptent de recevoir des propositions de reclassement à l’étranger et sous quelles conditions. Si un reclassement à l’étranger leur est proposé par la suite, celui-ci devra répondre aux conditions de salaire et de localisation qu’ils auront préalablement exprimées. Il s’agit d’un principe simple, qui devrait permettre d’éviter tous les inconvénients rencontrés depuis l’adoption de la loi du 17 janvier 2002.

Je tiens à souligner que le rapporteur du texte à l’Assemblée nationale a fait adopter ce dispositif après consultation des partenaires sociaux

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