Avant de poursuivre, je voudrais revenir sur certaines préconisations qu’avait suggérées le groupe de réflexion parlementaire.
La mesure la plus originale consistait, sans doute, en un rebasage de la DGF, qui avait, en dépit de son côté savant, l’immense avantage de régler le problème des dotations « négatives », eu égard à la contribution au redressement des finances publiques, en faisant participer les collectivités les plus riches et en les soumettant aussi à la contribution à la péréquation verticale, alors que le système actuel de plafond, qui est abscons, en reporte la charge sur les autres collectivités.
Au prétexte de sa complexité – dont je vous laisse juge au regard de l’état actuel de la fiscalité locale… –, le Gouvernement refuse notre proposition de rebasage et fait le choix de satisfaire le premier mécanisme, tout en prorogeant la seconde iniquité, en la limitant seulement, pour partie, par une référence aux recettes réelles, qui est certes plus logique et évolutive. Quel dommage !
Nous notons toutefois que le Gouvernement a bien voulu retenir, pour partie, nos propositions de toilettage de la DSU et de correction de la DGF pour les communautés d’agglomération. Il consent aussi à attribuer une part de l’impôt national qu’est la TVA aux régions, dans le cadre du financement de leurs nouvelles compétences ; ce point va sans aucun doute dans le sens d’une bonne gouvernance systémique et pourrait constituer une base intéressante pour les réformes à venir.
J’évoquerai enfin deux sujets, qui sont symptomatiques d’une défiance à l’égard des collectivités locales et qui nous motivent dans notre détermination à choisir la voie de la question préalable.
Le premier concerne l’indexation des valeurs locatives, fixée lors de chaque débat budgétaire : elle vient d’être arrêtée par l’Assemblée nationale à 0, 4 % et sera désormais indexée sur la seule inflation.
Je n’en conteste pas le bien-fondé, alors que j’appelle périodiquement à une bonne gouvernance. Avouez toutefois, monsieur le secrétaire d’État, qu’il est paradoxal de constater qu’après avoir proposé régulièrement, durant ce quinquennat, une évolution sans aucune mesure avec l’inflation pour masquer les hausses de fiscalité locale dues à une politique ravageuse à l’égard des collectivités, vous imposiez à vos successeurs, pour demain, cette rigueur inédite.
J’en viens maintenant au second point, qui relève purement et simplement du coup de Jarnac ! Je veux évoquer la modification du régime d’imposition des indemnités des élus locaux, au prétexte d’adapter leur régime à une réforme du prélèvement à la source qui ne verra probablement jamais le jour en l’état.
Lorsque les élus locaux, notamment ceux des petites communes, constateront que leur indemnité sera, par le biais de la suppression du prélèvement libératoire, réduite d’un montant de l’ordre d’une à trois mensualités par an, je crains que nous n’assistions, dans nos campagnes, à une véritable insurrection. En effet, comme je le dénonce dans un amendement à l’article 5 du projet de loi de finances, dont vous n’avez pas souhaité retenir l’argumentation, c’est le résultat qu’on obtient quand on soumet à l’impôt sur le revenu l’indemnisation des élus des communes de 500 à 1 000 habitants, qui était considérée jusqu’alors comme équivalente à un remboursement de frais. Rien de tel pour exposer les élus locaux à la merci de l’électeur consommateur et décourager les vocations des bénévoles de la République !
Vous comprendrez qu’avec de telles conditions proposées aux collectivités locales et dans un contexte de réforme avortée de la DGF, dont vous ne reprenez même pas la perspective, nous retenions la question préalable.
Ajoutées au climat de désespérance des élus locaux, qui sont englués dans des réformes inadaptées des collectivités locales, les dispositions, qui ont été adoptées et qui ne tiennent pratiquement pas compte de nos travaux antérieurs, laissent augurer de ce qu’il serait advenu de nos propositions si nous les avions réitérées. Ainsi, le projet de loi de finances vient totalement obérer la respiration que vous avez pourtant consentie, en reportant, pour moitié, la baisse du prélèvement au bloc communal.
Dans ces conditions, avec la France des territoires et celle d’une ruralité que vous avez contribué un peu plus à désespérer, et malgré ma frustration en tant que membre de la commission des finances, je voterai sans état d’âme la question préalable.