En matière financière, le rôle d'un président d'organisme est double : il doit tout faire pour obtenir plus de crédits de la part de son ministère de tutelle puis en faire la meilleure utilisation possible. La comparaison internationale s'impose. À première vue, le budget du CNRS est important : 2,6 milliards d'euros et même 3,2 milliards avec ses ressources propres. Mais on ne peut avoir l'ambition de jouer un rôle important sur la scène internationale sans se donner les moyens de conduire cette recherche, véritable investissement au profit de notre pays. Le budget du CNRS doit augmenter, mais à condition qu'il dise comment il entend utiliser ses crédits et qu'il définisse ses priorités.
La subvention pour charge de service public s'élève à 2,6 milliards d'euros tandis que les ressources propres du CNRS se montent à 600 millions. Pour augmenter ces dernières, j'ai évoqué diverses pistes dans mon exposé. Enfin, il faudrait que le CNRS ait beaucoup plus recours à l'argent venant des fondations, du public, comme cela se fait dans d'autres pays. Je souhaiterais organiser un marathon des sciences pour que nos concitoyens contribuent au financement d'opérations de recherche. Tout cela revient à poser une question simple : quelle place entend-on donner à la science dans notre pays ?
Les ressources financières et humaines sont très liées : un chargé de recherche qui entre au CNRS a le plus souvent un niveau Bac + 10, voire Bac + 12, et il perçoit moins de 2 500 euros bruts par mois. Il faut avoir la foi, surtout si un pays voisin lui propose 4 000 euros. La rémunération des jeunes chercheurs pose véritablement problème. Certes, le CNRS a décidé d'octroyer la prime d'encadrement doctoral et de recherche (PEDR) à l'ensemble des jeunes chercheurs, mais ce n'est pas suffisant.
Je crois beaucoup au système de double position, même s'il n'est pas possible de le généraliser dans tous les secteurs de la recherche. Ainsi, Yann Le Cun, professeur français, est devenu le patron du laboratoire Facebook en intelligence artificielle mais il est aussi professeur à l'université de New York. Aux États-Unis, beaucoup de chercheurs occupent ces doubles positions à l'université et dans les entreprises. C'est une excellente manière de développer les relations entre ces deux mondes, même si cela peut poser parfois des problèmes de propriété intellectuelle. Mais si les Américains y arrivent, il n'y a pas de raison pour que nous n'y parvenions pas. Des chercheurs à l'université pourraient être des CNRS-fellows. Alain Fuchs a ainsi créé un statut de professeur attaché. La solution miracle n'existe bien évidemment pas, mais nous devons explorer diverses pistes.