L’article 30 de l’ordonnance relative à la sécurisation des relations de travail prévoit d’étendre le recours aux CDI de chantier à d’autres secteurs que le bâtiment, selon des modalités fixées par accord de branche étendu.
Tout d’abord, je tiens à préciser que parler de « CDI de chantier » est une contradiction en soi : dans la mesure où la durée du contrat est assise sur la réalisation d’un chantier, il ne peut s’agir d’un contrat à durée indéterminée.
Avec le CDI de chantier, l’employeur n’a plus besoin d’invoquer un motif de licenciement, puisque la fin du projet ou du chantier suffit à constituer une cause réelle et sérieuse de licenciement. Elle place le salarié dans une situation de précarité permanente, sans possibilité de contester la rupture du contrat de travail.
Vous nous répondrez, une fois de plus, que les branches négocieront les modalités de recours à cette disposition et qu’il existera donc des garanties.
Or c’est la philosophie globale de ce dispositif que nous contestons. Pour nous, il s’agit d’un nouveau contrat de travail précaire. La Fédération française du bâtiment, la FFB, première organisation patronale du secteur, ne dispose pas de chiffres sur le recours au CDI de chantier dans le BTP. Elle estime que ce contrat concerne surtout les projets « très gros ou très longs », comme la construction de lignes à grande vitesse.
Les dirigeants de sociétés de services en ingénierie informatique, ou SSII, se frottent les mains à l’idée de bénéficier de ce contrat ultra-souple, dans un domaine où ces entreprises dépêchent leurs informaticiens chez les clients pour des missions plus ou moins longues.
Aujourd’hui, l’écrasante majorité des salariés du secteur restent embauchés en CDI classique, rémunérés et protégés entre chaque mission, une période dénommée « intercontrat ».
Les employeurs rêvent de recourir au CDI de chantier pour ne payer les salariés que le temps facturé au client, à des tarifs plus bas que ceux des informaticiens free-lance qui servent aujourd’hui de main-d’œuvre d’appoint.
Le CDI de chantier, c’est en réalité la fin du CDI pour toutes et pour tous, raison pour laquelle nous demandons son abrogation.