Intervention de Arnaud de Belenet

Réunion du 1er février 2018 à 10h30
Réforme du droit des contrats du régime général et de la preuve des obligations — Adoption en deuxième lecture d'un projet de loi dans le texte de la commission modifié

Photo de Arnaud de BelenetArnaud de Belenet :

Monsieur le président, madame la garde des sceaux, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, voilà quelques semaines, l’examen en première lecture de ce texte m’avait donné l’occasion de m’exprimer pour la première fois à cette tribune, et c’est évidemment avec la même humilité, compte tenu de mon accession récente à cette fonction de parlementaire, que j’évoque ce texte.

Fruit d’une quinzaine d’années de travaux, riches de rapports, de contributions académiques, de réflexions, d’échanges nourris par la doctrine, les praticiens du droit et les acteurs économiques, ce texte a également été vertueusement enrichi par l’examen parlementaire.

Comme vous l’avez souligné, madame la garde des sceaux, ce projet de loi répond à deux objectifs principaux : la codification de la jurisprudence qui s’est développée depuis deux siècles et le renforcement de l’attractivité du droit français vis-à-vis des investisseurs étrangers en le clarifiant et l’adaptant aux enjeux des évolutions de l’économie mondialisée.

Gagner en attractivité sans renoncer à la justice contractuelle ; s’adapter aux exigences de l’économie de marché tout en protégeant les plus faibles : tel est l’esprit de ce texte, qui introduit plusieurs innovations en ce sens.

Je ne ferai qu’évoquer la définition dans le code civil d’un contrat d’adhésion et la consécration de l’annulation des clauses emportant un déséquilibre significatif dans ce type de contrat, le champ volontairement élargi de la réticence dolosive, ou encore la volonté d’étendre la sanction de la violence en cas de dépendance.

En revanche, madame la garde des sceaux, il nous reste effectivement un débat sur l’article 1195 du code civil, qui n’offre la possibilité d’adapter le contrat que lorsque celui-ci a vu son exécution rendue excessivement difficile pour l’une des parties à cause d’un changement de circonstances indépendant de la volonté des cocontractants.

Comme vous l’avez souligné, ainsi que notre collègue Jacques Bigot, ces dispositions ne nuisent pas à l’attractivité du droit français, puisqu’elles n’ont qu’un impact assez limité en matière de droit des contrats internationaux.

Vous avez précisé le rôle du juge, qui n’a pas vocation à refaire le contrat, mais, au contraire, à rétablir la relation telle qu’elle avait été envisagée par les parties initialement. On peut même presque considérer qu’il s’agit là d’un renforcement de la volonté des parties et d’un retour au contrat. Vous avez enfin explicité l’ensemble des aspects qui permettent d’envisager l’adoption de l’amendement que vous présenterez lors de la discussion des articles.

Tel est l’esprit qui a prévalu lors de nos travaux. À cet égard, je rends hommage à la responsabilité de la Haute Assemblée, qui, in fine, n’a apporté que de rares modifications au regard de l’ampleur de la réforme, qui porte sur plus de 300 articles du code civil, et qui a su, en première lecture, œuvrer pour de véritables clarifications.

C’est dans le même esprit de responsabilité que la commission des lois du Sénat, en seconde lecture, a cherché avant tout une position de compromis sur les principaux points divergents. Il en est ainsi, monsieur le rapporteur, du choix fait de ne pas définir l’abus de dépendance comme relevant uniquement du domaine économique, mais de préciser qu’il n’est pas applicable à un tiers.

Comme je l’ai rappelé, le Gouvernement lui-même s’est montré à l’écoute de nos travaux, puisqu’il a réintroduit une définition du contrat d’adhésion plus proche du sens que lui avait donné le Sénat, à savoir celle d’un contrat qui « comporte un ensemble de clauses non négociables, déterminées à l’avance par l’une des parties ». C’est une voie médiane qui a été empruntée et qui permet le compromis sur un texte équilibré auquel chacun a pu contribuer. Désormais, il nous semble que la ratification s’impose.

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