Cet amendement prévoit que le salarié embauché dans le cadre d'un contrat à durée déterminée ou d'un contrat de travail temporaire, à qui l'employeur propose à l'issue de son contrat un CPE, doit percevoir l'indemnité de précarité visée à l'article L. 122-9 du code du travail, qu'il accepte ou refuse la poursuite des relations de travail.
Il me permet d'aborder la question du devenir de la prime de précarité et, en miroir, celle de l'indemnisation à laquelle la rupture d'un CPE ouvre droit, indemnisation forfaitaire de 8 %, inférieure au montant de la prime de précarité de droit commun de 10 %.
Par ailleurs, il rappelle utilement les employeurs à leurs obligations alors qu'ils sont plutôt poussés par le Gouvernement à contourner ces dernières et à s'engouffrer dans les brèches ouvertes pour profiter au maximum des effets d'aubaine ouverts par le CNE et le CPE.
Tous les chiffres publiés le prouvent aisément, en tout cas pour le CNE. Il suffit de regarder les chiffres du chômage pour se convaincre de l'inefficacité du CNE sur la création d'emplois et, en conséquence, de la grave erreur que constituerait l'institution du CPE.
Au lieu d'entretenir une polémique inadmissible sur l'approximation, voire l'inexactitude des statistiques de l'INSEE et de la DARES - elles déconnectent en effet la baisse du chômage enregistrée ces derniers mois des mesures du plan Villepin pour l'emploi et mettent en exergue la faiblesse chronique du nombre d'emplois créés -, acceptez cette réalité, et revoyez votre stratégie d'abaissement du coût du travail et de flexibilisation du droit du travail.
Les premières ruptures de CNE montrent que le mouvement de dérogation générale au droit du travail conduit à substituer à des CDI ou à des emplois précaires classiques du type CDD d'autres emplois encore plus précaires.
Depuis le début de ces débats, vous n'avez cessé de nous dire que 300 000 contrats nouvelles embauches ont déjà été signés, que ce type de contrat est très prisé dans le secteur du BTP et les services aux particuliers, par exemple, et que les 1 000 ruptures enregistrées sont infimes.
Je vous invite toutefois à vous interroger sérieusement sur la capacité des entreprises à pérenniser les 30 % de postes créés qui n'auraient pas vu le jour sans ce dispositif. Pourquoi les 70 % restants ont-ils été pourvus en CNE et non en CDI s'ils correspondent bien à des besoins réels des entreprises ?
Je vous invite enfin à vous pencher sur le parcours des salariés déçus du CNE qui parviennent à faire entendre l'abus de droit devant les juridictions prud'homales. Ils étaient en CDI ou en CDD avant qu'on ne leur propose d'enchaîner avec un CNE pour remplacer une personne en congé pour maladie ou pourvoir à des emplois saisonniers.
Fort opportunément, en référence à la présentation des termes du CNE faite par le Premier ministre, les juges affirment que le CNE, dont l'objet est de créer de nouvelles embauches, ne peut être utilisé ni en substitution à d'autres emplois, CDI ou CDD, ni pour contourner les règles en matière de licenciement.
La majorité des salariés en CNE ou en CPE - si ce dernier est adopté - qui seront congédiés n'iront pas devant les tribunaux non seulement parce qu'il faut pour cela énergie et moyens, notamment financiers, mais aussi parce que ce texte abaisse à un an le délai pendant lequel le salarié peut faire valoir ses droits en justice.
Pis encore, ainsi que cela est inscrit dans le projet de loi, ce délai n'est opposable qu'à la condition que le salarié en ait fait mention. Ce droit devient donc facultatif et variable au gré des connaissances des individus en matière de droit du travail.
Je ferai une dernière remarque, qui nous ramène directement à l'article 3 bis et à notre amendement : à la différence des CDD, pour lesquels le code du travail pose un certain nombre de garde-fous - certes insuffisants -, le texte ne prévoit aucun encadrement des cas de recours au CPE à l'exception des emplois saisonniers. Cela signifie que l'on pourra proposer un CPE pour remplacer un salarié absent, par exemple.
Le risque est donc bien réel de voir le contrat des nombreux salariés précaires employés aujourd'hui ponctuellement ou de façon permanente dans l'entreprise en CDD se poursuivre sous la forme d'un CPE.
Il ne faudrait pas que cette possibilité plus qu'avantageuse pour l'employeur, qui échappe ainsi notamment à la sanction de la requalification des CDD successifs en CDI, lui permette en plus de s'exonérer du paiement de la prime de précarité due au terme d'un CDD, afin de compenser pour le salarié la perte de son emploi.
Notre amendement garantit le versement de cette prime.