Madame la présidente, madame la ministre, monsieur le président de la commission, mes chers collègues, en juillet 2013, j’étais intervenu dans le débat sur l’actualisation de la loi organique du 19 mars 1999 relative à la Nouvelle-Calédonie et je reconnaissais bien volontiers mon ignorance des réalités sociologiques, historiques et politiques de ce territoire. Depuis, je pense m’être un peu rattrapé, notamment en me rendant sur place dans le cadre d’une étude triennale sur le foncier menée par la délégation sénatoriale aux outre-mer.
Je suis toujours convaincu que la spécificité du modèle calédonien depuis la révision constitutionnelle du 20 juillet 1998 est sans équivalent. Ce modèle est, néanmoins, l’héritage d’une histoire complexe, marquée par de violents affrontements entre communautés autour de la question de l’accession à l’indépendance.
La signature des accords de Matignon avait mis un terme à plusieurs années de tensions ayant atteint leur paroxysme lors de la tragédie de la grotte d’Ouvéa.
Ces accords ont été suivis par celui de Nouméa et par sa traduction juridique, la loi organique du 19 mars 1999, qui prévoyait des transferts progressifs de compétences de l’État vers la Nouvelle-Calédonie et la tenue d’une consultation de la population entre 2014 et 2018 pour décider de l’avenir institutionnel de cette collectivité.
Ce moment est aujourd’hui arrivé, mais l’une des questions essentielles de l’organisation de la consultation, qui devrait avoir lieu en novembre prochain, repose sur la composition du corps électoral qui y participera.
Il existe en Nouvelle-Calédonie trois listes électorales distinctes, selon les règles fixées par la loi organique précitée de 1999.
La première, dite liste électorale générale, regroupe les électeurs participant aux élections nationales françaises.
La deuxième, dite liste électorale spéciale, permet aux électeurs inscrits de participer à l’élection des assemblées délibérantes spécifiques de la Nouvelle-Calédonie.
Enfin, pour la troisième liste, à savoir la liste électorale spéciale à la consultation sur l’accession à la pleine souveraineté, les critères d’inscription sont plus restrictifs : les électeurs qui pourront participer au référendum d’autodétermination de la Nouvelle-Calédonie doivent se trouver dans l’un des huit cas prévus à l’article 218 de la loi organique du 19 mars 1999.
C’est l’inscription sur cette troisième liste qui fait l’objet de difficultés. Aujourd’hui, environ 160 000 électeurs y sont inscrits, tandis qu’entre 10 000 et 22 000 personnes pourraient demander à y figurer, si elles étaient inscrites sur la liste électorale générale.
Le 2 novembre dernier, sous l’égide du Premier ministre, le XVIe comité des signataires de l’accord de Nouméa a trouvé un consensus sur les modalités d’organisation du référendum d’autodétermination.
Le présent projet de loi organique est la traduction de cet accord politique.
Il permettra d’inscrire d’office sur la liste électorale générale les électeurs qui n’y figurent pas et qui ont leur domicile réel dans une commune située en Nouvelle-Calédonie ou y habitent depuis six mois au moins, conformément au droit commun.
Il permettra également de procéder à l’inscription d’office sur la liste électorale spéciale des électeurs nés en Nouvelle-Calédonie et domiciliés de manière continue pendant trois ans, lesquels seront réputés y avoir le centre de leurs intérêts matériels et moraux.
Par ailleurs, il prévoit que les électeurs inscrits sur les listes électorales des communes éloignées de Bélep, de l’île des Pins, de Lifou, de Maré et d’Ouvéa, mais résidant sur la Grande-Terre, pourront voter à Nouméa dans des bureaux de vote communaux délocalisés.
Enfin, il rendra possible l’ouverture d’une période de révision complémentaire de la liste électorale spéciale pour l’élection des membres du congrès et des assemblées de province, la présence sur cette liste étant également l’un des critères au titre duquel il est possible d’être inscrit sur la liste électorale spéciale.
Ce texte, qui est d’une importance capitale pour l’avenir de la Nouvelle-Calédonie, marque l’engagement pris par ce gouvernement d’honorer sa parole et de permettre la plus large représentation à cette consultation, afin qu’elle se déroule dans des conditions sereines et transparentes et que le résultat qui en découle se révèle par conséquent incontestable.
Ce résultat, quel qu’il soit, ne devra pas opposer deux camps : celui du « oui » et celui du « non ». Il devra permettre de continuer la construction de cette communauté de destin des Calédoniens, chère aux élus de ce territoire, notamment mes collègues et amis, Pierre Frogier et Gérard Poadja.
Pour toutes ces raisons, le groupe La République En Marche votera en faveur de ce projet de loi organique.