Intervention de Sonia de La Provôté

Réunion du 21 février 2018 à 14h30
Régime d'ouverture des établissements privés hors contrat — Adoption d'une proposition de loi modifiée

Photo de Sonia de La ProvôtéSonia de La Provôté :

À ce titre, ces enfants ont le droit d’étudier dans des conditions d’accompagnement pédagogique et de sécurité satisfaisantes.

Face à la radicalisation croissante de certains établissements ou face au risque d’indigence éducative, face au danger potentiel qui en résulte pour les élèves, cette proposition de loi apporte des solutions pour traiter plus efficacement les situations les plus inquiétantes et éviter le développement de nouvelles dérives.

Voter ce texte, c’est mieux garantir la sécurité des enfants scolarisés. Il s’agit là d’un objectif incontestable et fédérateur. C’est pourquoi je dis un grand merci à Françoise Gatel de l’avoir rappelé au travers de cette proposition de loi.

Le régime d’ouverture des écoles hors contrat, aujourd’hui, n’est pas satisfaisant. Tout d’abord, la procédure est complexe et source d’ambiguïté. Ensuite, les moyens d’action sont limités, et l’impossibilité d’agir pour les élus locaux et les services de l’État amène à ce qu’ils soient souvent placés devant le fait accompli.

Malgré l’évidence de situations identifiées comme graves, les procédures ne répondent pas à l’urgence.

Ce qui frappe, c’est qu’il y a aujourd’hui une incohérence entre, d’un côté, la capacité dont dispose l’État à agir rapidement et fermement dans les établissements publics ou privés sous contrat, d’ailleurs parfois sur injonction des parents ou des enseignants, et, de l’autre, le sentiment de secret et de silence, source de fantasmes plus ou moins fondés, qui peut régner autour des écoles hors contrat.

Cette proposition de loi entend donc simplifier et harmoniser les procédures, mieux encadrer et renforcer le régime de déclaration et introduire la transparence nécessaire à la protection des enfants.

La proposition de loi de notre collègue Françoise Gatel intervient dans un contexte où l’enseignement privé hors contrat connaît un véritable essor. Notre rapporteur, Annick Billon, a rappelé les chiffres ; ils sont éloquents. Il y avait 800 établissements scolaires privés hors contrat en 2010. Il y en a aujourd’hui 1 300 ; ils ont donc connu une croissance de plus de 60 %.

Ce qui frappe, c’est que 57 % des effectifs concernent le primaire, donc l’entrée des enfants dans la scolarité. Cela signifie un nombre croissant de parents qui choisissent dès le début une école hors contrat pour éduquer leurs enfants.

Monsieur le ministre, cette question interpelle, bien sûr, même si elle n’est pas l’objet du présent texte, quant aux motivations, quant aux raisons de ce choix délibéré. Elles sont multiples, obéissent certainement à des ressorts différents, mais suscitent toutes une analyse approfondie pour faire évoluer notre propre système scolaire.

Je ferme ici cette parenthèse, pour revenir à notre sujet. Aujourd’hui que se passe-t-il ?

Quand ces établissements ouvrent, les autorités sont démunies, car l’effectivité du contrôle des établissements est limitée, d’une part, par la brièveté et la disparité des délais d’opposition et, d’autre part, par la restriction des motifs pouvant être invoqués à l’appui d’un refus d’ouverture. Il n’y a rien d’étonnant à tout cela : le régime déclaratif actuel se décline en trois procédures qui datent de la fin du XIXe et du début du XXe siècle et qui répondent donc à une situation scolaire désormais datée. Il est évident que ce système est devenu obsolète et qu’il doit être réformé.

J’y insiste, si ce changement doit s’effectuer, c’est sans porter atteinte à la liberté de l’enseignement. Pourtant, il est indispensable de contrôler ces établissements, d’y faire entrer le regard extérieur de la puissance publique, garante de la neutralité de la République et de la protection des enfants. Tout l’enjeu de cet équilibre est de rendre effectif le contrôle et de préserver la liberté fondamentale de l’enseignement. Cet équilibre est le fondement du présent texte.

Par-delà les clivages politiques et les différences, c’est la question de l’enfant qui doit tous nous préoccuper en premier lieu.

À l’occasion de l’examen du projet de loi Égalité et citoyenneté, en octobre 2016, ces principes avaient été réaffirmés. La majorité sénatoriale avait d’ailleurs salué une solution d’équilibre, au moment de l’examen de ce texte.

La proposition de loi de notre collègue Françoise Gatel conserve cet équilibre, au travers d’une procédure de déclaration, tout en permettant que des contrôles réels soient effectués. C’est une proposition de loi pragmatique, simplificatrice, dont le but unique est de garantir davantage d’efficience et d’efficacité.

Ainsi, ce texte fusionne les trois régimes actuels en un seul. Par la voie d’un amendement, Françoise Gatel proposera aussi de simplifier la procédure avec un guichet unique auprès du recteur.

De plus, cette proposition de loi renforce le contenu de la déclaration obligeant le déclarant à indiquer les modalités de financement de l’établissement et à donner un « objet de l’enseignement ». Elle allonge également les délais de recours, uniformise et actualise les motifs de refus d’ouverture et rend plus effectifs les contrôles. En effet, en l’état actuel du droit, le maire ne peut s’opposer à l’ouverture d’un établissement que sur le fondement des « bonnes mœurs » – quid des bonnes mœurs ? –, « de l’hygiène et des exigences de sécurité et d’accessibilité ».

La proposition de loi fixe quatre motifs de refus d’ouverture invocables par le maire, le recteur, le préfet et le procureur de la République. Elle renforce le pouvoir des maires, en leur permettant de s’opposer à l’ouverture pour des motifs liés à la sécurité et à l’accessibilité des locaux. Elle permet également aux services de l’État d’intervenir en cas de non-respect des conditions de titres et de moralité du chef d’établissement et des enseignants.

Quant aux délais d’opposition, ils sont portés à deux mois pour le maire et à trois mois pour les services de l’État. Ainsi, on donnera plus de temps pour approfondir les situations et on ne laissera plus de place au doute.

Mes chers collègues, rien n’est plus normal que de demander aux écoles hors contrat de se conformer aux obligations de sécurité et d’accessibilité qui s’imposent à tous les établissements recevant du public. Rien n’est plus normal que d’autoriser la fermeture d’un établissement qui n’a pas le caractère d’un établissement scolaire.

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