Intervention de André Reichardt

Réunion du 21 février 2018 à 14h30
Régime d'ouverture des établissements privés hors contrat — Adoption d'une proposition de loi modifiée

Photo de André ReichardtAndré Reichardt :

Madame la présidente, monsieur le ministre, ma chère collègue auteur de la proposition de loi, mes chers collègues, les établissements hors contrat ne doivent naturellement pas tous être mis dans le même panier. Certains d’entre eux peuvent être de véritables laboratoires de pédagogies innovantes et alternatives, notamment pour des enfants à profil particulier, tels que les hauts potentiels ou les « dys ». En cela, ils sont un espoir et une face lumineuse de notre système éducatif. D’autres établissements, en revanche, présentent une face plus sombre et constituent de véritables modèles d’enfermement.

C’est en tant que corapporteur de la mission d’information sur l’islam en France, dont le rapport a été rendu en juillet 2016, que j’ai souhaité prendre la parole cet après-midi. Pour mener à bien ce travail, nous avions évidemment procédé à bon nombre d’auditions et nous nous étions notamment intéressés à l’enseignement privé musulman. Apparu au début des années 2000, l’enseignement privé musulman a répondu à une demande grandissante de nombreuses familles qui, en plus d’un enseignement répondant aux normes de l’éducation nationale, souhaitaient qu’un projet éducatif répondant aux critères de l’islam soit dispensé à leurs enfants.

Là encore, il serait inopportun d’appréhender de manière identique toutes ces écoles confessionnelles musulmanes hors contrat. Certaines d’entre elles peuvent offrir de vrais modèles d’enseignement et d’ouverture, accueillant même des élèves d’autres religions ; d’autres, en revanche, sont plus fermées et vivent dans un « entre soi », proposant, par la formation confessionnelle, une vision rigoriste et obtuse de l’islam, tout en ayant l’obligation de respecter le socle commun et minimal de connaissances qui s’impose à tout établissement. C’est bien sûr sur cette partie facultative qu’il convient d’être vigilant, car de jeunes enfants ne peuvent disposer d’un esprit critique et le manifester face à ce qu’on leur indique et seront naturellement plus perméables à ce qu’ils recevront.

Au cours des travaux de la mission sénatoriale sur l’islam en France, les représentants du ministère de l’éducation nationale nous ont indiqué – il faut le dire ici – que les rapports d’inspection n’ont pas mis en évidence de dérives particulières dans les établissements confessionnels musulmans, comme la radicalisation ou un rejet des programmes ou des valeurs du socle commun, mais ont relevé que les porteurs de projet manquent souvent de connaissance suffisante des attendus et privilégient des méthodes d’apprentissage fondées sur la répétition ou le par cœur, pour ne pas dire que les élèves ânonnent souvent ce qu’on veut leur faire apprendre.

À la suite de cet échange, la mission a estimé indispensable d’accroître la périodicité des contrôles de ces établissements. À mon sens, l’intérêt de cette proposition de loi – que j’ai d’ailleurs cosignée – réside ainsi bien plus dans la périodicité et la mise en œuvre de ces contrôles que dans le contenu du dossier de déclaration, dont on peut penser qu’il sera souvent, sinon toujours, bien préparé et minutieusement ficelé.

Nous avons toute légitimité à poser la question de la réalité et de l’efficacité des contrôles. Il me semble fondamental que ceux-ci puissent certifier que les enseignements prodigués au sein de ces établissements ne servent pas à ancrer une quelconque idéologie.

Le manque de moyens de l’inspection de l’éducation nationale a, certes, fréquemment été évoqué, mais si nous ne nous donnons pas ces moyens, les éventuels risques de dérives ne seront pas contenus. Or il ne s’agit pas d’un épiphénomène, comme certains ont pu le dire. On sait que la radicalisation se développe au moyen de multiples outils : par certains prêches dans les mosquées – c’est de moins en moins fréquent –, sur la toile, surtout, mais aussi en prenant de jeunes enfants en otages de leur savoir dès leur plus tendre enfance, dans le but de les enrôler dans une idéologie qui pourrait être contraire aux valeurs de la République. Faut-il rappeler que les chiffres de la radicalisation sont alarmants ? Nous sommes passés en quatre années de 700 signalements à plus de 19 000 !

Je redis ici qu’il ne s’agit aucunement de freiner le développement des établissements hors contrat, bien au contraire. Ceux d’entre eux qui proposent des pédagogies nouvelles méritent d’être encouragés et soutenus. Il ne s’agit pas plus de stigmatiser les écoles privées hors contrat confessionnelles musulmanes, …

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