Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, les lois de bioéthique ne sont pas des textes ordinaires. Elles transcendent les clivages et nous parlent de ce que nous avons de plus précieux : l’humain.
Nous voici très avancés dans la discussion de ce projet de loi, une discussion qui a soulevé de nombreux et très importants problèmes éthiques. Sur quelques sujets, le débat est parvenu à des solutions équilibrées.
Ainsi, grâce à l’adoption d’un amendement de notre collègue Valérie Létard, le dispositif d’information de la parentèle a été amélioré pour y inclure les personnes ayant fait un don de gamètes.
Par ailleurs, alors que nous n’étions pas favorables au transfert d’embryons post mortem, celui-ci est aujourd’hui écarté du texte.
Un modus vivendi a également été trouvé pour ce qui concerne le double diagnostic préimplantatoire, désigné sous le terme de « bébé médicament ».
Mes chers collègues, vous savez à quel point je suis opposée à cette technique. Mon sentiment profond est que nous aurions dû l’interdire purement et simplement. Cependant, l’adoption de mon amendement de repli, qui précise que le double diagnostic préimplantatoire ne peut être qu’un ultime recours, est déjà un moindre mal.
Je regrette aussi que nous n’ayons pas, lors de la première lecture, levé l’anonymat du don de gamètes afin de garantir à chaque enfant le droit à connaître ses origines, car l’adoption conforme par l’Assemblée nationale de l’article correspondant a exclu la question de la seconde lecture.
En revanche, restent en débat des questions fondamentales. La plus importante d’entre elles concerne la recherche sur l’embryon, le fragile embryon humain.
La commission des affaires sociales a voté, ce matin, en faveur du régime d’interdiction avec dérogations. Cette position est en harmonie avec le choix de la France de respecter la vie et la dignité de l’embryon humain dès le commencement de son développement.
L’article 16 du code civil dispose ainsi que « la loi assure la primauté de la personne, interdit toute atteinte à la dignité de celle-ci et garantit le respect de l’être humain dès le commencement de sa vie ». Pourtant, depuis 1994, le législateur ne s’est pas départi d’une conception utilitariste de l’embryon humain, qui conduit à distinguer entre les embryons qui répondent à un projet parental et ceux que n’accompagne pas un tel projet, vulgairement appelés « embryons surnuméraires », comme s’ils étaient « en trop » pour l’humanité.
Les uns, destinés à voix le jour, sont considérés comme des êtres humains, alors que les autres vont devenir, demain plus encore qu’en 2004, des matériaux de recherche pour les scientifiques. Le critère de distinction entre ces deux catégories d’embryons est purement subjectif et tient au projet que leurs parents conçoivent pour eux.
La grandeur de la civilisation ne consiste-t-elle pas à reconnaître la dignité inaliénable et intangible de chaque être humain, quel que soit le projet que d’autres ont formé pour lui ?
La réponse à cette question ne fait pour moi aucun doute. Je soutiendrai donc l’amendement de M. Gaudin. Si l’on veut prendre les problèmes à leur source, il faut réduire le nombre d’embryons surnuméraires, n’effectuer aucune congélation et réimplanter immédiatement les embryons artificiellement fécondés. Cela me paraît être la solution la plus sage.
Je crois que nous pouvons encore améliorer d’autres aspects non négligeables du texte. C’est le cas en matière d’aide médicale à la procréation. Sur ce thème, le texte a déjà beaucoup progressé. Je ne peux que me réjouir de la suppression par l’Assemblée nationale de l’ouverture de l’AMP aux couples homosexuels, qui avait été introduite par manque de vigilance au Sénat.