Mes chers collègues, ce débat mérite assurément d’avoir lieu, et je tiens à rappeler un certain nombre d’éléments à ce titre, même s’ils ont déjà été énoncés.
Les décisions de justice dans notre pays sont évidemment transparentes. Chacun peut y avoir accès. Elles comportent les noms des magistrats, des avocats et des parties. Il ne s’agit pas ici de décider si l’on doit les rendre publiques ou pas : elles sont publiques, et elles le resteront. Il s’agit ici de décider quelle extension nous devons donner à la mise à disposition, en masse, des décisions de justice.
L’open data des décisions de justice a été décidée. Nous nous sommes prononcés sur cette question. Le premier président de la Cour de cassation anime un travail très important pour permettre la mise en œuvre de cet open data, et il faut lui en rendre hommage.
Cela étant, il faut aussi avoir à l’esprit les implications d’une exploitation à grande échelle, par des algorithmes, d’un certain nombre de données qui permettraient de déterminer à l’avance où l’on a le plus de chance d’obtenir satisfaction, et, dès lors, le cas échéant, s’il faut introduire son instance dans tel tribunal ou dans tel autre. En pareil cas, c’est le service public de la justice qui serait mis en cause.
À mes yeux, toutes ces questions méritent un tant soit peu de prudence. C’est la raison pour laquelle je tiens à exprimer des réticences face à ces deux amendements, auxquels je suis défavorable.
À ce stade, les dispositions dont il s’agit me semblent tout à fait imprudentes. Selon moi, elles induisent un choc latéral sur un travail déjà engagé. Ce dernier assurera l’exploitation des données de la justice, dans l’intérêt des justiciables, dans l’intérêt aussi des auxiliaires de justice, sans pour autant permettre, à grande échelle, la mise en cause des magistrats, voire des avocats de notre pays.
C’est pourquoi, je le répète, je vous invite à une certaine prudence.