Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, depuis l’entrée en vigueur, en 2014, du Foreign Account Tax Compliance Act, le FATCA, et de l’accord conclu entre Washington et Paris, un an plus tôt, pour qu’il soit appliqué sur le territoire français, les banques se trouvent contraintes d’identifier et de déclarer auprès de l’administration américaine les clients présentant des « indices d’américanité ».
Les banques doivent depuis lors analyser un certain nombre de pièces et de documents fournis par le client avant de fournir les informations détaillées des comptes concernés à l’agence du gouvernement fédéral américain chargée de collecter l’impôt et de veiller au respect des lois fiscales encadrant le budget fédéral américain.
Dans ce contexte, le principe de la fiscalité fondée sur la citoyenneté conduit à ce que soit considérée comme contribuable américain toute personne détenant la nationalité américaine, alors même qu’elle résiderait à l’étranger.
Dès lors, dans le cadre de la législation actuelle, nombreux sont nos concitoyens ayant acquis la nationalité américaine à la naissance, à l’occasion d’une résidence occasionnelle ou d’un voyage de leurs parents par exemple, sans pour autant avoir résidé aux États-Unis. À cet égard, nombre d’entre eux n’ont bien souvent pour seul lien avec ce pays que celui de la naissance.
Depuis l’entrée en vigueur en 2013 de l’accord conclu entre la France et les États-Unis et en 2014 du FATCA, un nombre important de Français ont ainsi découvert qu’ils étaient considérés comme citoyens américains. Ils subissent un traitement injuste sur le plan tant bancaire que fiscal et financier.
En effet, abusivement considérés comme « résidents fiscaux américains », ces Français, « Américains accidentels », se sont vus réclamer des sommes importantes par l’administration fiscale américaine, alors qu’ils n’ont, dans la majorité des cas, jamais travaillé ou vécu aux États-Unis.
Au surplus, ce processus de mise en conformité fiscale ou de renonciation à la citoyenneté américaine se révèle extrêmement onéreux et compliqué. En effet, les Français « américains accidentels » se trouvent contraints de payer une indemnisation correspondant à la clôture de leurs frais de dossiers. À cela s’ajoutent encore les frais d’avocats nécessaires à la régularisation de leur situation. En outre, la renonciation à la citoyenneté américaine suppose une régularisation de leur situation fiscale auprès du fisc américain sur une période de cinq ans, puis le paiement d’une taxe.
Ils sont soumis à l’obligation de fournir à l’administration américaine une quantité importante de renseignements fiscaux, mais aussi d’ordre plus privé, s’étalant sur de nombreuses années.
Face à cette accumulation de vicissitudes, notre collègue député Marc Le Fur a enjoint au Gouvernement de garantir le droit au compte bancaire pour les « Américains accidentels ». Il recommandait par ailleurs d’informer les Français vivant aux États-Unis des conséquences fiscales liées à leur expatriation et de garantir la réciprocité dans la mise en œuvre de l’accord bilatéral FATCA.
Richard Ferrand, pour sa part, a appelé à l’obtention d’un traitement dérogatoire susceptible de permettre aux « Américains accidentels » soit de renoncer à la citoyenneté américaine au travers d’une procédure simple et gratuite, soit d’être exonérés d’obligations fiscales américaines.
Au début de 2016, les commissions des affaires étrangères et des finances de l’Assemblée nationale décidaient conjointement de constituer une mission commune d’information sur l’extraterritorialité de certaines lois américaines. Cette mission commune dénonçait dans son rapport d’information les « abus d’extraterritorialité juridique américaine ».
Elle recommandait d’obtenir, au travers soit de la négociation d’un amendement à l’accord fiscal bilatéral, soit d’une « action diplomatique forte » favorisant le vote d’une disposition législative américaine ad hoc, que les Américains accidentels puissent renoncer à la nationalité américaine par une procédure simple et gratuite ou être exonérés de leurs obligations fiscales américaines.
Enfin, la mission appelait le Gouvernement à exercer l’action diplomatique nécessaire pour que soient tenus les engagements de réciprocité pris par l’administration américaine dans le cadre de l’accord FATCA.
Ces différentes recommandations n’ont, pour l’heure, pas été suivies d’effets. La proposition de résolution de notre collègue Jacky Deromedi s’inscrit dans la continuité de ces différentes initiatives et de ces recommandations. Elle vise à assurer, dans un premier temps, le droit au compte bancaire des « Américains accidentels ». Elle préconise en outre que soit garantie la réciprocité dans la mise en œuvre de l’accord bilatéral relatif au FATCA. Elle prévoit aussi la meilleure information des Français vivant aux États-Unis sur les conséquences fiscales attachées à leur expatriation.
J’observe par ailleurs que l’administration fiscale américaine reconnaît elle-même qu’il existe un problème.
L’absence de réciprocité du FATCA, ratifié en 2014, n’est en outre plus à prouver. Il me semble donc opportun d’en appeler à une meilleure réciprocité, le Gouvernement ayant reconnu en septembre 2017 que des progrès méritaient d’être faits dans ce domaine.
C’est pourquoi je voterai en faveur de la proposition de notre collègue, qui ouvre la voie à la raison et qui permettrait de revenir à un dialogue constructif, pour corriger la situation baroque et inconfortable dans laquelle se sont retrouvés bon nombre de nos compatriotes.