Pourquoi ne pas avoir décidé d’associer le plus largement possible les acteurs concernés à la décision de réduction de la vitesse maximale autorisée, notamment les présidents de département ?
À ce problème de méthode s’ajoute un problème lié au caractère uniforme de cette mesure. Une étude publiée par l’Observatoire national interministériel de la sécurité routière le 17 avril dernier, dont vous avez d’ailleurs parlé, madame la ministre, montre que, parmi les routes à double sens sans séparateur central, ce sont les routes nationales et les principales routes départementales drainant le plus fort trafic qui sont responsables du plus grand nombre d’accidents mortels.
En approfondissant ce travail, il aurait été possible de dresser une cartographie des routes accidentogènes département par département.
Pourquoi, dès lors, vouloir appliquer la réduction de vitesse à l’ensemble des routes bidirectionnelles ? Qui peut prétendre que toutes les routes nécessitent la même limitation de vitesse ? Qui peut affirmer qu’elles présentent toutes la même dangerosité ? C’est pour le moins une vision manichéenne et technocratique.
Les propositions formulées par nos rapporteurs, notamment celle de laisser aux présidents de département le soin de fixer la vitesse maximale autorisée en fonction de la dangerosité des routes, me semblent tellement plus logiques et mieux adaptées que ce que le Premier ministre a décidé. Pourquoi refuser d’en tenir compte ?
Nous ne pouvons donc que regretter cette décision, madame la ministre, et le fait que le Gouvernement, comme souvent malheureusement, ne fasse aucun cas des travaux menés par le groupe de travail sénatorial.
Nos rapporteurs ont formulé une proposition de bon sens qui favoriserait l’acceptabilité de la mesure de réduction de la vitesse maximale autorisée et la rendrait plus efficace.
Nous sommes prêts, nous l’avons dit, à soutenir les initiatives du Gouvernement en matière de sécurité routière et sommes majoritairement favorables aux mesures contenues dans le plan visant à renforcer les sanctions contre les auteurs d’infractions graves au code de la route et à sévir davantage contre l’usage du téléphone et l’alcoolémie au volant.
En revanche, vous l’avez compris, nous regrettons le caractère général de la réduction de la vitesse à 80 kilomètres par heure, la méthode choisie et l’entêtement du Premier ministre.
Vous nous dites, madame la ministre, que la mesure sera revue dans deux ans : cela ne me paraît ni réaliste, ni sérieux, ni même décent, ne fût-ce que parce que, selon les chiffres du Gouvernement, environ 9 millions d’euros auront été investis dans des panneaux de limitation de vitesse à 80 kilomètres par heure !
Lorsqu’il s’agit de mesures aussi significatives que l’abaissement de la vitesse autorisée sur l’ensemble du réseau, la moindre des choses est de faire preuve de pédagogie et de concertation. Le Gouvernement n’a fait preuve ni de l’une ni de l’autre. Cette mesure ne fera donc que renforcer davantage encore la défiance des Français à l’égard de la politique de sécurité routière et la colère des automobilistes qui vont être verbalisés, particulièrement en milieu rural.