Madame la présidente, madame la ministre, madame la rapporteur, mes chers collègues, la proposition de loi tendant à imposer aux ministres des cultes de justifier d’une formation les qualifiant à l’exercice de ce culte déposée par nos collègues Nathalie Goulet et André Reichardt fait suite à la mission commune d’information sur l’organisation, la place et le financement de l’islam en France et de ses lieux de culte.
Cette proposition de loi répond à deux objectifs principaux.
Tout d’abord, elle tend à rendre obligatoire l’organisation sous le régime de la loi du 9 décembre 1905 relative à la séparation des Églises et de l’État de toute association assurant l’exercice public d’un culte ou la gestion d’un lieu de culte, en supprimant la possibilité d’opter pour le régime plus souple de la loi du 1er juillet 1901 relative au contrat d’association.
Ensuite, cette proposition de loi vise à restreindre, sous peine de sanctions pénales, l’exercice de la faculté de célébrer publiquement un culte aux seuls ministres du culte ayant reçu une formation délivrée par une instance cultuelle dont la représentativité serait reconnue par l’État. Elle rend ainsi obligatoire la formation des ministres des cultes, afin de préciser le champ d’application des obligations ainsi posées.
Par ailleurs, le dispositif de cette proposition de loi a vocation à s’appliquer dans les départements du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle pour les cultes ne relevant pas du régime concordataire, c’est-à-dire, en premier lieu, l’islam.
Enfin, elle prévoit l’instauration d’infractions pénales sanctionnant la provocation à la discrimination, à la haine ou à la violence à caractère ethnique, national, racial ou religieux, ainsi que les agissements visant à inciter à la commission d’actes de terrorisme.
Si l’objet de cette proposition de loi est effectivement de remédier à des difficultés réelles, pouvant amener des dérives au sein de l’islam, force est de constater qu’elle se heurte à des obstacles, d’un point de vue tant constitutionnel que pratique.
Je tiens à saluer la qualité des travaux du rapporteur, notre collègue Françoise Gatel, qui s’est attachée à dégager des solutions alternatives, tout en répondant à l’intention des auteurs de cette proposition de loi.
En premier lieu, la commission a supprimé les dispositions du texte posant des difficultés d’ordre constitutionnel au regard des principes de liberté d’association et de liberté de culte. Elle a toutefois maintenu l’extension, prévue par le texte, de la réglementation relative à la célébration des cultes aux locaux loués par une association cultuelle, et pas seulement aux locaux dont cette dernière est propriétaire ou qui sont mis à sa disposition.
En deuxième lieu, la commission a décidé d’instaurer un conseil consultatif des cultes, placé auprès du ministre chargé des relations avec les cultes et comprenant des parlementaires, afin de favoriser le dialogue entre les pouvoirs publics et les représentants des cultes, ainsi que de contribuer à la réflexion sur l’exercice de la liberté de culte et sur la formation des cadres religieux et des ministres des cultes.
En troisième lieu, la commission a décidé d’instituer une formation obligatoire civile et civique, sans dimension religieuse et dans le respect du principe de liberté de culte, pour les aumôniers intervenant dans les établissements pénitentiaires, les centres hospitaliers et les armées.
En dernier lieu, la commission a modifié le volet pénal du texte, qui pose une difficulté au regard des principes constitutionnels de nécessité des peines et de légalité des délits et des peines, car il prévoit, pour les infractions qu’il crée, des sanctions différentes de celles qui sont prévues pour des infractions identiques existant déjà.
La commission a ainsi prévu la création, pour les délits visés par la proposition de loi et pour des délits connexes, d’une circonstance aggravante s’ils sont commis dans le cadre d’une réunion pour la célébration d’un culte, justifiée par l’influence qu’exerce un ministre du culte ou tout animateur d’un culte sur les fidèles. Sont ainsi concernés les délits de provocation ou d’apologie du terrorisme, ainsi que les délits de provocation à la discrimination, à la haine ou la violence, les délits de diffamation et les délits d’injure en raison de l’ethnie, de la nation, de la race ou de la religion.
Madame la ministre, mes chers collègues, le Sénat a la mission fondamentale de garantir nos libertés. Aussi, je souscris pleinement aux modifications apportées par la commission, qui visent à trouver un point d’équilibre entre les libertés, d’une part, et la sécurité, d’autre part.
Le groupe Les Indépendants – République et Territoires votera donc en faveur de cette proposition de loi, ainsi modifiée par la commission, qui a cherché à respecter les intentions des auteurs du texte, tout en retenant d’autres dispositifs.