Je note qu’il y a d’abord un problème d’emploi des mots : il ne s’agit pas du délit de solidarité, mais du délit d’aide au séjour irrégulier sur le territoire national. Utilisons les mots justes !
Ce délit permet de poursuivre les réseaux mafieux et ceux qui font commerce de leur mise en place – Dieu sait s’ils sont nombreux –, mais aussi, grâce au discernement des procureurs, de ne pas poursuivre ceux qui, de façon spontanée, généreuse, sans arrière-pensée de réseau à construire ou de bénéfice à retirer, apportent, à un moment ou à un autre, un soutien à un étranger en situation irrégulière. Ce que chacun d’entre nous serait tout à fait capable de faire – et ferait d’ailleurs sans aucun doute.
L’Assemblée nationale a introduit quelques dispositions qui affaibliraient ce délit, notamment l’élargissement de l’aide à la circulation et celle du conseil aux dimensions sociales, linguistiques et autres. En ouvrant ainsi le champ, on affaiblirait le dispositif et on gênerait nos procureurs – il faut dire les choses telles qu’elles sont.
Que disent nos services quand on les interroge ? Globalement, ils souhaitent tous garder le dispositif tel qu’il existe aujourd’hui, qui leur permet de poursuivre ou de ne pas poursuivre, selon les éléments de preuve dont ils disposent sur le comportement des personnes. Sachez, mes chers collègues, que de nombreuses filières ont été démantelées : un peu plus de 275 l’année dernière. En 2016, 764 condamnations ont été prononcées pour aide à l’entrée et au séjour irréguliers et 320 pour infraction aggravée.
C’est là qu’est le sujet ! Qui sont ces passeurs ? Ceux qui, par exemple dans la vallée de la Roya, avec des véhicules qu’on appelle aujourd’hui des SUV, dont ils enlèvent les sièges, transportent dix-sept personnes et touchent 15 000 euros par passage. Ainsi, dans les Hautes-Alpes, nous savons qu’il existe une organisation très puissante entre l’Italie et la France, avec des réseaux extrêmement forts et même des bénévoles qui, manipulés, participent de façon tout à fait involontaire à des réseaux mafieux.
Pour ces raisons, la commission des lois a émis un avis défavorable sur tous les amendements.