Intervention de Marlène Schiappa

Réunion du 5 juillet 2018 à 15h00
Lutte contre les violences sexuelles et sexistes — Article 4

Marlène Schiappa :

Je me permets, monsieur le président, de prendre quelques minutes pour expliquer la position du Gouvernement sur cet article et ces amendements.

Tout d’abord, je me réjouis sincèrement que nous fassions ensemble le constat que le harcèlement de rue est un fléau et qu’il faut trouver des solutions pour le combattre. Je rappelle que, selon une étude récente, huit jeunes femmes sur dix ont peur, quand elles sont toutes seules dans la rue. Cette étude concerne bien la France de 2018 et s’applique, quel que soit le lieu d’habitation !

Il s’agit donc d’un sujet véritablement important. Certes, ces pratiques, qui ont pu apparaître comme une fatalité à une époque, existent depuis des générations, mais il faut, enfin, les faire cesser ! Le seuil de tolérance de la société a évolué et cela nous paraît maintenant insupportable. C’est pour cela que je me réjouis que nous ayons aujourd’hui ce débat, important, je le répète, sur les meilleurs moyens de lutter contre le harcèlement de rue.

Je rappelle que la verbalisation du harcèlement de rue était un engagement de campagne du Président de la République. Pourquoi avons-nous opté pour une verbalisation, plutôt que pour le dépôt d’une plainte au commissariat et une judiciarisation ?

Premièrement, il est très difficile pour des femmes, victimes de violences sexistes ou sexuelles, quelles qu’elles soient, de se rendre dans un commissariat pour dénoncer les faits, même quand elles savent en identifier l’auteur. A fortiori, il est assez improbable, assez théorique, d’imaginer qu’une femme aille dans un commissariat pour dénoncer des faits de harcèlement de rue ou d’outrage sexiste, sachant que, la plupart du temps, elle ne peut même pas en identifier l’auteur.

Deuxièmement, nous avons examiné la situation en Belgique, où une loi contre le harcèlement de rue a été votée. Elle prévoit le dépôt de plainte et la judiciarisation. Quel est le résultat ? C’est un échec : seules trois plaintes ont été déposées, et aucune n’a abouti, précisément en raison des difficultés que j’ai évoquées précédemment.

Ce sont ces éléments qui ont forgé la conviction du Président de la République et l’ont amené à opter, durant sa campagne, pour une verbalisation du harcèlement de rue en flagrant délit. Le groupe de travail, qui a réuni des députés sur l’initiative du Gouvernement, a appelé cette infraction un outrage sexiste, terme que nous avons conservé dans le projet de loi.

Il reviendra aux 10 000 agents de la police de sécurité du quotidien, dont le recrutement a été annoncé par Gérard Collomb, de remplir ce rôle ; ils seront formés et équipés à cet effet.

De notre point de vue, une verbalisation en flagrant délit est le seul moyen de lutter efficacement contre le harcèlement de rue, ce que ne pourra pas faire une procédure judiciaire par dépôt de plainte.

C’est pourquoi le Gouvernement émet un avis défavorable sur ces amendements identiques.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion